Hypothétique accord du Saint-Siège avec la Chine

Le Saint-Siège fait face à de grandes difficultés pour parvenir à un accord avec la Chine. Avant de décoller pour son voyage au Chili et au Pérou, le pape François a reçu au Vatican le cardinal chinois Joseph Zen le 14 janvier 2018, a informé le Saint-Siège le même jour.

La rencontre est passée inaperçue, entre la messe célébrée par le pape pour la Journée des migrants, et le départ le 15 janvier du voyage papal au Chili. Rien n’en a filtré pour l’instant, mais en soi, ce type d’audience – très rare le dimanche – témoigne que le pape François suit de très près les complexes affaires chinoises.

Le cardinal Joseph Zen, 86 ans, évêque émérite du diocèse de Hong Kong, avait déjà exprimé à plusieurs reprises, depuis un an, ses grandes réticences face à la perspective d’un accord entre la Chine et le Saint-Siège, dont les relations diplomatiques sont rompues depuis 1951.

Consensus pour un accord ?

Il y a un an, en février dernier, le cardinal John Tong Hon, alors évêque de Hong Kong et successeur du cardinal Zen, créait en effet la surprise en affirmant qu’un «consensus préalable» à un tel accord avait été trouvé. Et en particulier sur un des points de blocage majeur: la nomination des évêques.

Selon le cardinal Tong Hon, il pourrait y avoir une sortie de crise à cette situation, qui donnerait le dernier mot au pape dans la nomination des futurs évêques. La conférence épiscopale chinoise, liée au gouvernement, pourrait-elle faire des recommandations, mais cela ne serait que de simples suggestions, le Souverain pontife disposant d’un droit de veto.

Régression de la liberté religieuse

Mais cet accord risquait de provoquer une «régression» pour les catholiques chinois, avait critiqué au mois de mai le cardinal Zen. En octobre, il a récidivé en critiquant «l’optimisme» forcé du cardinal secrétaire d’Etat Pietro Parolin.

Malgré les appels à la prudence des observateurs et la première réaction timide des autorités chinoises, le site d’information catholique AsiaNews rapportait ensuite, le 26 octobre, les propos considérés comme positifs de Wang Zuoan, directeur de l’administration chinoise pour les affaires religieuses. Celui-ci affirmait que le Souverain pontife était «sincère».

Cependant, deux conditions, excessives, étaient mises à cet accord: le Saint-Siège devrait rompre ses relations diplomatiques avec Taiwan, au nom du principe de la Chine unique. Ensuite, Rome ne devrait pas intervenir dans les «affaires internes» de la Chine, «pas même au nom des affaires religieuses».

«Nécessaires concessions»

En novembre dernier, nouveau signal positif, du côté de l’Eglise cette fois, avec un article du Père Federico Lombardi, président de la Fondation Joseph Ratzinger-Benoît XVI et ancien directeur du Bureau de presse du Saint-Siège, dans revue jésuite La Civiltà Cattolica. Dans cet organe de presse officieusement proche du pape, le jésuite écrit que les discussions entre la Chine et le Vatican valent bien «quelques renoncements», et qu’il faut avoir une «vision d’ensemble».

Mais la question des nominations n’est pas tout. Lors de ses vœux aux ambassadeurs, le 8 janvier dernier, le pape n’a pas mentionné la Chine. Il a toutefois consacré tout un paragraphe de son long discours à la liberté religieuse. Le texte du pontife se borne à regretter les violations du droit à la liberté religieuse, qui provoquent «l’extrémisme» ou «l’exclusion sociale», voire «des formes de persécutions des croyants».

De fait, le 1er février prochain entrera en vigueur en Chine une nouvelle réglementation étatique, très restrictive, qui imposera de lourdes amendes aux organisateurs d’événements religieux ›non-officiels’. Mais seront aussi interdits les dons aux communautés religieuses, la diffusion d’information religieuse en ligne, et l’enseignement aux enfants.

Les difficultés pour parvenir à un accord avec la Chine ne semblent donc pas prêtes de s’estomper. Une chose est sûre: lors de ses interventions publiques dans les médias occidentaux, le cardinal Zen déplorait que son point de vue ne soit pas entendu, et de ne pas avoir été consulté par le pape. C’est désormais chose faite. (cath.ch/imedia/ap/be)

Jacques Berset

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