APIC – PORTRAIT
Un prêtre qui ne manque pas de verdeur
Paris, 10août(APIC) De petite taille, une figure ronde à la moue dubitative, le Père François le Kemener, Fanch pour les amis, cultive la verdeur
du langage. « C’est un bon prêtre, mais il n’a pas un langage d’ecclésiastique », disent de lui ses supérieurs. Langage direct, sans hypocrisie et
nourri de ses origines terriennes. « Ici, je suis le permanent, le Père manant », affirme-t-il.
Créée en 1947 par un abbé du diocèse de Saint-Brieuc, la Mission bretonne ou « Ti-ar-Vretonned », dans le 14ème arrondissement, continue d’être un
lieu d’accueil et de rencontre pour les nombreux Bretons venus chercher du
travail à Paris. Après avoir été dix-neuf ans vicaire dans le diocèse de
Vannes, le Père Fanch consacre tout son temps à la mission. Tout son temps,
depuis 1966.
Au « pays natal » comme dans la capitale, une même exigence: servir les
plus petits. Des marins de Lorient aux « gars et filles » montés à Paris.
Gens de maison, agents de collectivités ou manoeuvres, une même idée le
conduit: « Les aider à être des hommes debout ». Au besoin en les aiguillant
vers la JOC (Jeunesse ouvrière chrétienne) ou vers le syndicalisme. Combien
de ces filles utilisées comme « bonnes » – à tout faire -, souvent durement
exploitées, n’a-t-il pas mis en relation avec le syndicat CFDT des employés
de maison?
Aujourd’hui ce sont surtout des étudiants qui frappent à la porte. des
enfants de Bretons de Paris en quête de racines culturelles et de convivialité. La mission leur propose des ateliers de langue, histoire, musique et
lutte bretonnes. Plus quelques Fest Noz ou Fest Deiz (fêtes de nuit ou de
jour), comme « là-bas ».
Manants d’hiers et d’aujourd’hui
Dans la cordialité des rencontres, le Père le Kemener cherche à donner
un souffle spirituel. Dimension de son ministère assumée plus explicitement
une fois par mois, lors d’un dimanche consacré à la recherche spirituelle.
Mais aussi à l’occasion de la messe dominicale, une messe en FLB (autrefois
sigle du Front de libération de la Bretagne), c’est-à-dire en français pour
l’homélie, en latin pour le gloria et le credo, en breton pour les cantiques…
Quant à la dimension sociale, plus discrète, elle n’en est pas moins
présente. Manants d’hier et manants d’aujourd’hui ne sont plus tout à fait
les mêmes. Mais des manants, il y en a encore, sinon plus. Fanch le Kemener
répond toujours aux nombreux courriers et appels de détresse. Il aide autant que possible ceux qui le sollicitent pour un travail, un abri, pour
sortir de leur isolement relationnel.
Curé tout entier dans l’action extérieure et peu soucieux du spirituel?
Cela le fait sourire. « Sans le Christ, ma vie n’aurait pas de sens », martèle celui qui, au séminaire, passait pour un mystique et songeait à la Trappe. Quotidiennement, il consacre une heure à l’adoration silencieuse. Et,
une fois par mois, muni de ses godillots, d’un chapelet, d’oranges et des
Evangiles, il marche 15 km dans une forêt de la ceinture parisienne. Sa
journée de désert… (apic/jcn/fs)
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