«Fake news»: le remède pire que le mal

Le président français Emmanuel Macron entend légiférer sur les «fake news», ces «fausses nouvelles» qui prolifèrent sur les réseaux sociaux. Il s’en prend nommément aux médias russes RT (anciennement Russia Today) et Sputnik, financés par le Kremlin. Il les a accusés d’être des «organes d’influence».

A Washington, le Congrès enquête sur les soupçons d’ingérence de Moscou dans la campagne présidentielle de 2016, qui aurait favorisé la victoire de Trump. Et ce dernier, auteur de nombreux tweets grotesques et coutumier de sorties indignes du chef de la première puissance mondiale, a pourtant la prétention de décerner des «Fake News Awards» aux seuls médias qui ne lui sont pas favorables.

Les théories du complot se portent bien !

Facebook, Twitter et Google ont également été mis en cause durant la campagne sur le «Brexit», la présidentielle française et les législatives allemandes… Et pourquoi pas dans les élections du Conseil de paroisse de mon village, pendant qu’on y est… Par les temps qui courent, les théories du complot se portent bien !

Qui décide qu’une nouvelle peut être ou non qualifiée de «fake news» ? Les gouvernements occidentaux produisent, eux aussi, de l’intox. Il n’y a qu’à songer aux fameuses armes de destruction massives de Saddam Hussein. Elles n’ont jamais existé, mais ont pourtant servi d’argument devant l’assemblée générale de l’ONU et l’opinion étatsunienne pour agresser un pays souverain, l’Irak.

On connaît la suite: un pays autrefois prospère à jamais ruiné, un monceau de cadavres, et toute une région déstabilisée! La liste de ces «faux» peut être allongée à souhait…

Le réseau IFEX (International Freedom of Expression Exchange, basé à Toronto) regroupe des professionnels des médias au niveau mondial. Il se bat pour défendre et promouvoir la liberté d’expression de tous, que ce soient celle des professionnels des médias, des citoyens-journalistes, des militants, des artistes ou des intellectuels. La liberté d’expression et d’information est pour l’organisation internationale un droit humain fondamental.

Pour elle, comme pour de nombreux spécialistes et professionnels des médias, les tentatives des gouvernements de contrer les «fake news» pourraient bien être un remède pire que le mal. Les fausses nouvelles sont aussi vieilles que le monde: déjà aux temps anciens, Ramsès II faisait graver sur les murs des temples égyptiens sa glorieuse victoire sur les Hittites à Qadesh, au sud de l’actuelle Syrie, alors que les troupes du pharaon avaient en réalité subi une défaite. Pour l’IFEX, rien de nouveau sous le soleil, mais les fausses nouvelles sont l’inévitable prix à payer pour jouir de notre précieuse liberté d’expression.

Faux sur CNN, véridique sur Fox News

Le  vrai remède face aux «fake news» est l’esprit critique et l’éducation. Non pas des règles et des restrictions imposées par un quelconque gouvernement. Pensez au sort des journalistes d’information au pays d’Erdogan ! Nos pays disposent déjà d’un arsenal de lois qui punissent l’injure, la diffamation, la calomnie ou l’incitation à la haine raciale ou autre. Elles s’appliquent de même aux médias et les journalistes doivent, évidemment, eux aussi, s’y tenir.

Cela devrait suffire, d’autant plus que la notion de «fake news» n’a rien de scientifique: ce qui est une «fake news» pour CNN peut être au contraire qualifiée de tout à fait véridique sur Fox News.

Par contre, ce que le public ignore souvent et qui est éminemment bien plus pernicieux, c’est le fait que les ingénieurs de Google travaillent à modifier les algorithmes des moteurs de recherche afin de reléguer en queue de classement les «fausses nouvelles» et promouvoir les sites «faisant autorité».

Comme par hasard, les «relégués» par cette entreprise étatsunienne ne seraient-ils pas, de quelconque manière, hostiles aux intérêts du «phare du monde libre» ? Vous avez dit: neutralité des canaux de communication ?  Encore une fois, l’histoire de la paille et de la poutre…

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