Effets collatéraux

La sinistre «affaire Harvey Weinstein» n’a pas fini de provoquer quelques effets surprenants. Dans un premier temps, ces révélations sordides ont suscité des indignations planétaires qui ont remis en question, surtout dans certains milieux, le comportement de beaucoup d’hommes à l’égard des femmes. On ose espérer que ces mâles dominants ont enfin progressé dans le respect dû à la dignité et à la personnalité des femmes. Il est grand temps. Mais une telle bataille, on le devine, ne sera jamais définitivement gagnée. Soyons vigilants, hommes et femmes tous ensemble.

On aurait pu en rester là, autrement dit dans le rayon des relations affectives, voire érotiques. Heureusement, le courage des femmes les a conduites à ausculter d’autres dimensions de la vie humaine. Par exemple les relations de pouvoir établies dans les milieux de l’économie et de la politique. Et l’on remet sur la table des débats, très opportunément, des disparités criantes qui, si elles peuvent s’expliquer par l’histoire, ne sont plus justifiables dans le contexte de notre civilisation, du moins chez nous. Pourquoi si peu de femmes dans la direction et la gestion des entreprises? Pourquoi de telles différences dans les salaires octroyés, pour des travaux d’égale valeur, entre hommes et femmes? Pourquoi encore de trop rares femmes dans les instances politiques de décision et d’administration?

«Il est temps d’ajouter partout les couleurs et les parfums de l’autre moitié de l’humanité»

Entendons-nous bien! Il ne s’agit pas de viser des quotas d’égalité rigoureusement mathématique. Il ne s’agit pas non plus de transformer les femmes en doublures des hommes, comme si elles n’avaient pas des apports originaux à offrir, avec leurs compétences propres. Mais justement, pourquoi nous priver des manières féminines d’exercer ces responsabilités? Ne serions-nous pas tous enrichis – les hommes et les femmes – par le libre déploiement des charismes féminins dans des secteurs où, depuis si longtemps, règnent les usages très masculins d’imposer l’autorité et l’influence décisive? Il est temps d’ajouter partout – pour les goûter et les apprécier à leur juste valeur – les couleurs et les parfums de l’autre moitié de l’humanité.

J’entends aussitôt les réactions, pleinement justifiées, de certaines femmes. Qu’en est-il dans les Eglises, et en particulier dans l’Eglise catholique? Bonne question! Il ne suffit pas de dire, comme le concile Vatican II l’a proclamé prophétiquement, qu’il faut reconnaître à l’homme et à la femme une égale dignité personnelle (Gaudium et Spes no 49), que toute forme de discrimination fondée sur le sexe doit être dépassée et éliminée comme contraire au dessein de Dieu (Gaudium et Spes no 29). Encore faut-il que l’Eglise, et singulièrement la nôtre, examine sérieusement sa conscience et surtout revoie sa pratique. Pas pour céder à une mode, mais par meilleure fidélité à l’évangile et pour qu’on ne puisse pas l’accuser, une fois de plus, de fournir de bons conseils à la société sans les mettre en pratique d’abord en son sein. Il y va de la cohérence avec notre mission et de notre crédibilité à la face du monde.

Toutes choses à vérifier régulièrement.

Avec ou sans la triste actualité de Weinstein.

Claude Ducarroz, 28 février 2018

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