Evangile de dimanche: le toucher de la foi…

Il a un air d’Orient cet évangile: des gens en deuil pleurent et crient; et dans la foule une femme tente à tout prix de toucher Jésus… Elle souffre d’hémorragie, après avoir épuisé médecines et médecins, et voit en lui un ultime recours: «Si je viens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée». En relevant la petite fille de Jaïre, Jésus annonce sa propre résurrection, en présence des témoins privilégiés: Pierre, Jacques et Jean, qui seront aussi ceux de son agonie. Il les prépare ainsi à affronter sa propre mort sur le Calvaire.

Dans la seconde scène, Jésus, ému par la démarche de la femme, la guérit de son mal et par là-même de son impureté: en effet, aux yeux des juifs, ces flux de sang faisaient d’elle une impure, écartée et du temple et de la communion de table.

Associer le toucher à la foi: les pèlerins d’Orient, ceux du sud de l’Europe ou de l’Afrique par exemple, sont familiers de la démarche. A Lourdes, ils veulent toucher le rocher, ailleurs une statue de la Vierge; à Jérusalem, ils se prosternent devant la pierre de l’onction, dans la basilique du Saint-Sépulcre, sortant de leurs sacs mouchoirs et fichus pour en faire des reliques tangibles de leur pèlerinage.

«La foi appelle des gestes pour l’inscrire dans notre expérience humaine»

Plus on monte vers le nord de l’Europe, et plus les croyants ont tendance à prendre de la distance vis-à-vis de ces pratiques considérées comme flirtant avec la magie: la Réforme protestante a passé par là. De fait, un christianisme qui ne serait fait que de processions, de rites et de reliques court le risque de flirter avec la magie. Mais le risque inverse n’est pas moindre: une foi qui ne serait que cérébrale, sans geste pour l’inscrire sur toute la personne avec son corps et ses sens, devient cérébrale et peu capable de toucher la personne tout entière. La foi appelle des gestes pour l’inscrire dans notre expérience humaine, et les gestes de dévotion appellent la foi pour en faire l’expression d’une relation authentique au Seigneur.

En tout cas, Jésus ne méprise pas ces tentatives très humaines que nous avons tendance à regarder de haut. Il ne fait aucun reproche à cette femme, au contraire des disciples qui se transforment en gardes du corps et s’étonnent que Jésus cherche à savoir qui est cette femme qui, au milieu d’une foule, a touché son vêtement. Il tient à entrer en contact avec elle. Non seulement il ne lui fait aucun reproche, mais il la rassure, la guérit et la sauve. Il a su lire dans cette démarche toute simple et spontanée, l’expression d’une foi et d’une confiance qu’il tient à honorer. Ne pensez-vous pas que la démarche des pèlerins et de beaucoup de petites gens (sans donner aucun sens péjoratif à l’expression) nous invitent au même respect? Oui, il y a un toucher qui relève de la foi.

Jean-Michel Poffet | 29 juin 2018


Mc 5,21-42

 En ce temps-là,
Jésus regagna en barque l’autre rive,
et une grande foule s’assembla autour de lui.
Il était au bord de la mer.
Arrive un des chefs de synagogue, nommé Jaïre.
Voyant Jésus, il tombe à ses pieds
et le supplie instamment :
« Ma fille, encore si jeune, est à la dernière extrémité.
Viens lui imposer les mains
pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. »
Jésus partit avec lui,
et la foule qui le suivait
était si nombreuse qu’elle l’écrasait.

Or, une femme, qui avait des pertes de sang depuis douze ans…
– elle avait beaucoup souffert
du traitement de nombreux médecins,
et elle avait dépensé tous ses biens
sans avoir la moindre amélioration ;
au contraire, son état avait plutôt empiré –
… cette femme donc, ayant appris ce qu’on disait de Jésus,
vint par-derrière dans la foule et toucha son vêtement.
Elle se disait en effet :
« Si je parviens à toucher seulement son vêtement,
je serai sauvée. »
À l’instant, l’hémorragie s’arrêta,
et elle ressentit dans son corps qu’elle était guérie de son mal.
Aussitôt Jésus se rendit compte qu’une force était sortie de lui.
Il se retourna dans la foule, et il demandait :
« Qui a touché mes vêtements ? »
Ses disciples lui répondirent :
« Tu vois bien la foule qui t’écrase,
et tu demandes : «Qui m’a touché ?» »
Mais lui regardait tout autour
pour voir celle qui avait fait cela.
Alors la femme, saisie de crainte et toute tremblante,
sachant ce qui lui était arrivé,
vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité.
Jésus lui dit alors :
« Ma fille, ta foi t’a sauvée.
Va en paix et sois guérie de ton mal. »

Comme il parlait encore, des gens arrivent de la maison de Jaïre,
le chef de synagogue, pour dire à celui-ci :
« Ta fille vient de mourir.
À quoi bon déranger encore le Maître ? »
Jésus, surprenant ces mots,
dit au chef de synagogue :
« Ne crains pas, crois seulement. »
Il ne laissa personne l’accompagner,
sauf Pierre, Jacques, et Jean, le frère de Jacques.
Ils arrivent à la maison du chef de synagogue.
Jésus voit l’agitation,
et des gens qui pleurent et poussent de grands cris.
Il entre et leur dit :
« Pourquoi cette agitation et ces pleurs ?
L’enfant n’est pas morte : elle dort. »
Mais on se moquait de lui.
Alors il met tout le monde dehors,
prend avec lui le père et la mère de l’enfant,
et ceux qui étaient avec lui ;
puis il pénètre là où reposait l’enfant.
Il saisit la main de l’enfant, et lui dit :
« Talitha koum »,
ce qui signifie :
« Jeune fille, je te le dis, lève-toi! »
Aussitôt la jeune fille se leva et se mit à marcher
– elle avait en effet douze ans.
Ils furent frappés d’une grande stupeur.
Et Jésus leur ordonna fermement
de ne le faire savoir à personne ;
puis il leur dit de la faire manger.

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