Lourdes: «Un moment de profonde humanité»

Lors du pèlerinage romand à Lourdes en cette troisième semaine de juillet, une quarantaine de jeunes Suisses vivent au plus près des malades . En nette augmentation en 2018, leur nombre ne suffit pourtant pas à renouveler les effectifs décroissants de l’Hospitalité.

«Nous vivons à Lourdes un moment de profonde humanité». Mélanie dit y tisser des liens plus solides qu’à l’ordinaire. Le statut social s’estompe derrière les échanges gratuits et ces moments de grâce vécus entre pèlerins. «Nous venons volontiers à l’accueil, aider les malades». La jeune femme de 21 ans est venue pour eux et, concède-t-elle, «un peu pour moi aussi, tellement je reçois de leur part». Passé le premier moment d’appréhension, le lien s’établit rapidement. «Ils te rassurent lorsque tu hésites sur un geste à faire». Elle évoque sa foi, parfois remise en cause lors de discussions intenses sur Dieu, la Trinité, le rôle des femmes en Eglise. «On ne refait pas le monde. C’est plus subtil et cela m’amène à affermir ma foi».

 

La journée a commencé à la chapelle Notre-Dame, une vieille bâtisse cachée derrière le musée Sainte-Bernadette. Les jeunes de Lourdes (JDL) y ont suivi la messe célébrée par les prêtres qui les accompagnent, Pierre-Yves Pralong et Etienne Catzéflis. Les jeunes de l’accueil ont naturellement trouvé leur place au milieu de la quarantaine de leurs congénères. Certains sont immobilisés sur leur fauteuil, ils ne perdent pas une miette de la célébration. Les autres se sont fondus dans l’assemblée. La communion est entière au moment de la paix du Christ. Tous passent vers eux leur donner la main.

Avant de quitter les lieux, les jeunes qui travaillent à l’accueil ajustent les lunettes de soleil, les casquettes, remettent un peu de crème solaire à certains malades. En cette saison, le soleil de Lourdes est mordant. Une procession désordonnée et joyeuse ramène tranquillement les jeunes à l’hospitalité.

Des moments «cadeaux»

«Je pensais que j’étais venu pour moi. En fait je suis là pour les malades». Benjamin effectue son premier pèlerinage à Lourdes avec le groupe des jeunes. L’étudiant en théâtre évoque l’heure passée à chanter et à prier à l’hospitalité avec les malades, la veille au soir. «Un de ces moments cadeaux» où il a partagé sa foi et son instrument de musique. «Tu reçois leur joie immense, juste parce que tu as partagé un moment avec eux». Pousser leur chaise roulante, tout le monde peut le faire. Rien que pour cela tu reçois une joie immense, poursuit le jeune homme.

Lourdes, un lieu de vie

«Je ne pensais pas qu’il y avait autant de vie sur le sanctuaire». La tristesse éprouvée à la vue des nombreuses boutiques de souvenirs de la ville a fait place à la surprise. Benjamin se dit étonné de sa découverte. «Le monde entier se trouve à Lourdes. On ne se sent pas seul, surtout lorsqu’on croise autant de jeunes d’autres nationalités», rapporte Marie, vice-présidente des JDL. Elle y a trouvé une source de joie supplémentaire à la dimension d’humanité de ce pèlerinage:  Elle peut également trouver un peu de tranquillité pour aller prier à la grotte. Des moments de recueillement qu’elle n’a pas eu lors des JMJ par exemple.

Le groupe a pris la direction de la prairie. Il s’agit de préparer la célébration pénitentielle de l’après-midi, où on attend leur témoignage. L’occasion de partager en petits comités sur les Béatitudes. Les grands adolescents, âgés de 15 ans, ont été conviés à partager cette journée avec leurs aînés. Ils sont susceptibles de passer chez les jeunes l’année prochaine. La pédagogie et la possibilité de mieux faire connaissance sont mises en avant. Jérémy, responsable des JDL, y voit surtout un bon moyen d’assurer la relève pour remplacer des jeunes qui, espère-t-on au sein de l’hospitalité, viendront travailler à l’accueil. Le manque de bénévoles commence à se faire sentir.

Afin de ne pas perdre des adolescents, qui apportent une aide appréciable au transport lors des célébrations qui rassemblent tous les Romands, il a été décidé il y a quelques années de favoriser le contact entre groupes pour assurer la continuité. Il en est de même pour les plus grands des enfants qu’on espère voir intégrer le groupe des adolescents.

Assurer la relève à l’hospitalité

L’enjeu est de taille, à tel point que le directeur du pèlerinage, les responsables de l’accueil et du transport sont venus sensibiliser les jeunes à la nécessité d’aider. On recherche notamment des brancardiers. Avec 42 jeunes cette année, dont beaucoup de nouveaux, Marie est optimiste, même si on est loin de la soixantaine de jeunes qui descendaient habituellement à Lourdes. Une augmentation des effectifs bien réelle mais fragile. «Il faut assurer la continuité. Nos jeunes sont motivés, ouverts comme ils le sont avec nos malades».

Les jeunes viennent pour les malades, la joie qu’ils reçoivent, celle qu’ils leurs apportent. «C’est Lourdes!». Marie a bien conscience qu’il va falloir convaincre d’autres jeunes de venir. Leur expliquer qu’on ne récite pas des «Je vous salue Marie» à longueur de journée, qu’ils rentreront probablement comblés de la cité mariale. Et que leur foi, dans un premier temps ébranlée, s’en trouvera par la suite raffermie.

Après le dîner, jeunes et ados se retrouvent au pied de l’hospitalité pour répéter les chants de la célébration pénitentielle. Les jeunes de l’accueil sont encerclés, placés à l’ombre, par la petite troupe qui entonne les premières notes de la partition. Les hospitaliers, les brancardiers et des pèlerins se sont rapprochés. L’assemblée s’est immobilisée et écoute un «Resucito» chorégraphié avec énergie: un moment de grâce et de légèreté. (cath.ch/bh)

Bernard Hallet

Portail catholique suisse

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