Ne faisons pas de l’autonomie le nouveau veau d’or des temps modernes!

Notre époque a découvert une cinquième vertu cardinale! Elle ajoute l’autonomie au courage, à la tempérance, à la justice et à la prudence. Très vite, l’adolescent doit être autonome, c’est-à-dire (selon le dictionnaire) déterminer librement les règles auxquelles il se soumet. La personne âgée se doit de rester autonome le plus longtemps possible. Les époux doivent rester autonomes l’un par rapport à l’autre. Quelle horreur si l’un devait reconnaître sa dépendance! Tous les stages de développement personnel mettent l’accent sur le nécessaire développement de l’autonomie.

Entendons-nous bien. Il ne s’agit pas ici de remettre en cause les progrès des droits mis en place par le monde moderne. Il s’agit simplement de contester le diktat de l’autonomie qui nous est imposé aujourd’hui car celle-ci rentre en conflit avec deux réalités profondes: celle de l’amour et celle de l’interdépendance.

Il existe donc un antagonisme entre amour et autonomie que la pensée libérale préfère passer sous silence.

Aimer ne supprime pas notre liberté mais créée une certaine dépendance. Nous ne pouvons plus choisir les règles auxquelles nous nous soumettons selon notre bon plaisir.

Le chrétien qui aime son Dieu se doit de respecter les commandements du Décalogue et d’intégrer les enseignements de Jésus.

Les époux doivent écouter leur conjoint ou leur conjointe et l’accompagner dans des chemins parfois difficiles, ce qui impose certains renoncements.

Les parents doivent assistance à leurs enfants toute leur vie, ce qui peut créer une certaine dépendance. Certains la refusent et abandonnent pour cette raison leur progéniture. Etant professeur, j’ai vu nombre d’étudiants privés brutalement de ressources parce que le jugement de divorce de leurs parents avait prévu un subside jusqu’à une certaine date.

On pourrait multiplier les exemples. Il existe donc un antagonisme entre amour et autonomie que la pensée libérale préfère passer sous silence.

Notre interdépendance dans nos relations économiques et avec la nature rentre également en conflit avec l’autonomie. La nature nous impose ses lois et quand on les enfreint, la facture arrive comme celle du changement climatique. Dans nos rapports avec notre environnement, notre autonomie n’est donc pas vérifiée. Faute d’avoir été éduqué dans ce sens, certaines personnes et certains pays commettent encore les pires bêtises et souffrent du syndrome de toute puissance, comme le dit le pape François dans Laudato si.

En économie, le Brexit est un bon exemple de notre dépendance réciproque. La Grande-Bretagne s’est crue autonome et a pensé fixer librement de nouvelles règles avec l’Union européenne. Aujourd’hui elle déchante. Dans les faits, elle est dans une interdépendance avec l’Union. Elle va devoir le reconnaître car  sa prospérité en dépend.

La phobie de la dépendance nous fait parfois mépriser ou ignorer les personnes qui sont dans cette situation. Un livre magnifique lu pendant mes vacances [1] a changé mon regard sur ce sujet. Il retrace le parcours d’amour d’une épouse avec son mari atteint de la maladie d’Alzheimer. Malgré une dépendance extrême, le bonheur est présent à chaque page ce qui rend le livre bouleversant. Ne faisons pas de l’autonomie le nouveau veau d’or des temps modernes. L’amour et notre profonde interdépendance avec les autres et la nature sont deux forces qui sont essentielles à la vie.

[1] Le bonheur plus fort que l’oubli, Colette Roumanoff, Michel Lafon éditeur

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