Aretha Franklin: les racines chrétiennes de la reine de la soul

Aretha Franklin est décédée le 16 août 2018 à l’âge de 76 ans. Si la reine de la soul s’est émancipée du contexte religieux qui l’a vue naître, elle n’a jamais cessé de s’en inspirer.

Aretha Franklin naît le 25 mars 1942 à Memphis, dans le Tennessee. Côté paternel, elle peut se targuer d’être la fille d’un célèbre pasteur baptiste, militant des droits civiques: Clarence LaVaughn Franklin, surnommé «The Million Dollar Voice» (l’homme à la voix à 1 million de dollars). C’est dans l’église de son père que sa voix résonne en public pour la première fois. Aretha a tout juste cinq ans.

Ce père pasteur, blessé par balle en 1979 et décédé après cinq ans de coma, laissera une empreinte profonde dans la vie de la chanteuse. Lorsqu’elle rencontrera le pape François en septembre 2015, après avoir chanté Amazing Grace lors de la rencontre mondiale des familles à Philadelphie, elle confie: «J’ai rencontré le pape dans les coulisses. Nous nous sommes salués, puis je lui ai remis une compilation des sermons de mon père».

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«Cette authentique saveur de gospel noir»

Candi Staton est une chanteuse américaine de gospel et soul. Pendant plusieurs années, elle a partagé la scène d’Aretha Franklin, son amie d’enfance. «Elle n’a jamais perdu son lien avec l’Eglise, explique-t-elle à l’agence de presse américaine Religion News Service (RNS). Elle aimait répéter dans des églises, peu importe ce qu’elle chantait. Ces lieux gardaient une influence sur elle».

«C’est une des artistes qui est unanimement acceptée dans toute la Black Church», explique pour sa part Bil Carpenter, auteur d’une encyclopédie sur le Gospel. «Aretha Franklin est restée baptiste toute sa vie. Elle n’a jamais renié sa foi. Au contraire, elle a imprégné certains de ses albums profanes», assure-t-il à l’agence RNS.

«C’est la puissance de sa voix et le phrasé unique qui la distinguent de ses pairs, poursuit l’écrivain américain. Qu’elle chante un morceau de Broadway, un standard de jazz ou une chanson de R&B, elle y a toujours apporté cette authentique saveur de gospel noir.»

Il arrivait parfois qu’Aretha Franklin elle-même évoque discrètement, mais explicitement, le rôle de sa foi. «Elle est très importante et m’a toujours soutenue», glissait-elle au Chicago Sun-Times en 2017.

Fervente défenseure des droits civiques

Une foi qui n’est pas restée enfermée dans les sacristies. Comme son père, Aretha Franklin fut une fervente défenseure des droits civiques. Elle réclame le «respect» pour les Noirs et pour les femmes. En février 1968, elle marche aux côtés de Martin Luther King – ami de la famille Franklin. Et quelques mois plus tard, elle chante à ses obsèques.

Aretha Franklin, Dr. Martin Luther King Jr and her father C.L. Franklin at Cobo Hall pic.twitter.com/l3R6EC2969

&— UM Bentley Library (@umichBentley) August 14, 2015

 

La même année, elle devient l’une des premières femmes noires à faire la couverture du magazine américain Time. Et elle est aussi classée en seconde position des personnalités afro-américaines les plus connues au monde… juste derrière Martin Luther King.

Un modèle au-delà du monde de la soul

Jamais officiellement engagée politiquement, Aretha a chanté lors de la cérémonie d’investiture de trois présidents des Etats-Unis: Jimmy Carter, Bill Clinton et Barack Obama, tous trois démocrates.

Mère à douze ans, puis à quatorze, elle se mariera deux fois et aura en tout quatre enfants de trois pères différents. Elle laisse en héritage son histoire, celle d’une femme noire qui a su trouver sa place dans un monde qui n’a pas toujours été prêt à l’accepter. Devenant ainsi un modèle, bien au-delà du monde de la soul. Une prophétesse des temps modernes? (cath.ch/rns/gr/pp)

Grégory Roth

Portail catholique suisse

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