Redécouvrir les fiançailles, temps de noviciat avant le mariage

La théologienne Adeline Wermelinger plaide, dans son mémoire de master, sur l’importance des fiançailles. Ce trésor de l’Eglise méconnu constitue pourtant un temps riche dans l’exploration et les échanges au sein du couple en route vers le mariage.

«J’ai été frappée, parmi mes amies et mes colocataires, de la peur de s’engager. On se met en couple pour ne pas être seul…» Le constat est lucide. C’est celui d’Adeline Wermelinger, 27 ans. Mariée depuis un an, la théologienne s’est penchée sur un sujet rare: les fiançailles. Et, cerise sur le gâteau de la jeune épouse, elle a pu approfondir ce sujet théologique et pastoral tout en vivant elle-même sa période de fiançailles. Joindre son cheminement personnel et son travail de recherche théologique, en somme.

Résultat: un mémoire de master à l’Uni de Fribourg, faculté de théologie, titré Les fiançailles. Un rite désuet ou une étape à redécouvrir sur le chemin du mariage? Ce temps particulier, autrefois courant, des fiançailles, Adeline l’a décrypté et analysé, sous la direction du professeur François-Xavier Amherdt.

›Vieille France’

«Les fiançailles, ça sonne démodé, un peu ›vieille France’. Ou alors, ça correspond à une demande en mariage, avec son côté romantique, le cadeau de la bague, etc., note l’auteure, enseignante de religion dans le canton de Fribourg. Pourtant les fiançailles existent, mais elles ont été mises de côté, même dans l’Eglise catholique où elles sont peu proposées. Et elles sont si riches de sens…»

Adeline Wermelinger – son nom d’épouse – a vécu ce temps d’avant le mariage comme un moment béni. Avec son futur époux, elle a pu poser des fondations: «C’est un temps de formation humaine et spirituelle, un temps de construction du couple.»

Donner une place à Dieu

Le mémoire de master présente, avec rigueur, les différentes dimensions de la période de promesse. Il analyse les textes bibliques sur la théologie de l’amour de Dieu pour son peuple, archétype de la relation amoureuse homme-femme. Puis il se penche sur le Catéchisme de l’Eglise catholique, le droit canon ainsi que sur les rituels des fiançailles et du mariage.

Avec bonheur, l’exhortation apostolique du pape François Amoris Laetitia, parue en 2016, a cautionné la démarche et nourri la réflexion d’Adeline. Notamment pour les pistes pastorales (»J’y tiens beaucoup») qui font le lien entre les textes et la pratique. Car la peur de l’engagement, fréquente dans les jeunes générations, est aussi une préoccupation en haut lieu catholique, révèle l’exhortation pontificale.

Les fiançailles, estime Adeline, c’est une façon «de donner une place à Dieu». Car la relation n’a pas qu’une dimension psychologique. «Dans le sacrement du mariage, c’est Dieu qui se donne. On peut donc lui demander son aide». Car l’union conjugale, dans la Bible, est à l’image de la relation de Dieu avec son peuple, même lorsque ce dernier tombe dans l’infidélité comme dans le livre d’Osée.

Les époux stressés

Rien n’exaspère davantage notre universitaire que la focalisation trop grande sur le jour du mariage. Ce jour où les époux arrivent stressés: «Ils n’en profitent même pas, tellement ils sont épuisés d’avoir préparé!». La disproportion entre l’aspect matériel, surinvesti, et la préparation spirituelle, souvent superficielle, connote les propos d’Amoris Laetitia. Le pape, lui aussi, souhaite une revalorisation d’un sacrement, souvent mal préparé et dont l’objectif de la finalité chrétienne est oublié.

«Les fiançailles sont précisément un temps de noviciat, de probation, insiste Adeline Wermelinger. Ce n’est pas juste une demande en mariage façon romantique. Aujourd’hui encore, déplore-t-elle, des jeunes arrivent à se marier sans avoir jamais évoqué ensemble leurs attentes mutuelles, la question des enfants, leur nombre, etc. Et ça crée des drames…»

La discussion dans le couple

La jeune animatrice pastorale adhère aux orientations de l’Eglise sur le mariage. Elle recommande le livret Promesses d’amour. Carnet de route des fiancés (Droguet et Ardent, Edifa). «Il ouvre à la discussion dans le couple, car il s’adresse aussi bien aux couples en chemin de foi qu’à ceux qui la redécouvrent. Il y a bien un attrait du spirituel aujourd’hui, estime-t-elle, mais il y a peu de connaissances proposées.»

Retour sur son propre cheminement: «Nous avons vécu un chemin de véritable rencontre avec mon futur mari, résume Adeline. Nous avons rencontré un prêtre avant de nous fiancer. Nous avons été exigeants, c’est vrai. C’est plutôt rare. Mais ça a été une période riche». Toutefois, souligne-t-elle, ce temps est limité et s’achève par l’engagement dans le mariage. Reste que «les fiançailles sont un temps de détachements, de questionnements, de découvertes». (cath.ch/bl)


Morceaux choisis

«Les fiançailles: un rituel désuet ou une étape à redécouvrir sur le chemin du mariage?»
extraits [PDF]

Jacques Berset

Portail catholique suisse

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