Evangile de dimanche: rude et scandaleux

Loin de me choquer, les murmures des disciples me rassurent plutôt dans l’évangile de ce dimanche. Pourquoi? parce qu’ils sont en train d’entrevoir le sens et la portée de l’Incarnation: le Verbe se fait chair. Ils sont bouleversés, au sens littéral: jetés à terre par la promesse que fait Jésus de l’eucharistie: le pain de vie, pour aujourd’hui et pour toujours. Ce bouleversement est sain et signale qu’ils sont face au mystère.

Bien des chrétiens sont beaucoup moins inquiets! Ils pensent connaître l’Evangile et le message de Jésus: une douce mélodie sur l’amour et la paix. De quoi intéresser tout un chacun, mais de loin et s’il vous plaît, surtout sans trop de conséquences concrètes… Cette connaissance vague et superficielle est le meilleur antidote à la foi. On en connaît juste assez pour ne pas s’y intéresser, pour ne pas se laisser saisir. Les propos de Jésus à la synagogue de Capharnaüm s’inscrivent sur un tout autre registre.

«Oui Jésus a choqué ses disciples»

Ils sont très concrets et choquent les disciples: Jésus de Nazareth dont on connaît la famille et qui proclame: «Je suis le pain de vie»…  Lui encore qui prétend donner sa chair à manger et son sang à boire… Quand on sait l’interdit qui, dans le monde juif, pesait sur le sang non seulement à ne pas verser mais à ne pas consommer par respect pour l’auteur de la vie, puisque la vie est dans le sang, on mesure le scandale de ses auditeurs.

Oui Jésus a choqué ses disciples, et il est bon que nous ressentions avec eux de l’étonnement, voire même de l’incrédulité. «Cette parole est rude, qui peut l’entendre?» Jésus savait qu’ils murmuraient entre eux (réplique des murmures du peuple au désert au temps de Moïse), il leur précise même que parmi eux, ses tout proches, ses disciples, il y en avait qui ne croyaient pas. Beaucoup vont d’ailleurs s’en aller. Cette page d’évangile a de quoi éclairer notre paysage ecclésial!

Oui Jésus livre son corps, il verse son sang pour nous et les donne en nourriture de vie éternelle. Si c’est vrai, concrètement vrai, comment se fait-il que nous ne soyons pas au coude à coude dans nos églises le dimanche pour accueillir cette vie qui ne passera pas? C’est que, hier parmi les disciples et aujourd’hui parmi nous, beaucoup n’y croient guère. Juste assez pour se donner l’illusion d’être chrétien, mais pas plus.

Jésus provoque alors Pierre et les Douze: «voulez-vous partir vous aussi?» La réponse de l’Apôtre est magnifique parce qu’elle se situe au niveau d’une confiance absolue en Jésus: «Seigneur, à qui irions-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle». Ce dimanche, l’évangile nous fait donc vaciller, dans un premier temps, devant le don inouï de l’eucharistie, et dans un second temps, il nous provoque à la foi et à la confiance dans le Seigneur Jésus.

Jean-Michel Poffet OP | Vendredi 24 août 2018


Jean 6,60-69

En ce temps-là,
Jésus avait donné un enseignement
dans la synagogue de Capharnaüm.
Beaucoup de ses disciples, qui avaient entendu, déclarèrent :
« Cette parole est rude !
Qui peut l’entendre ? »
Jésus savait en lui-même
que ses disciples récriminaient à son sujet.
Il leur dit :
« Cela vous scandalise ?
Et quand vous verrez le Fils de l’homme
monter là où il était auparavant !…
C’est l’esprit qui fait vivre,
la chair n’est capable de rien.
Les paroles que je vous ai dites sont esprit
et elles sont vie.
Mais il y en a parmi vous qui ne croient pas. »
Jésus savait en effet depuis le commencement
quels étaient ceux qui ne croyaient pas,
et qui était celui qui le livrerait.
Il ajouta :
« Voilà pourquoi je vous ai dit
que personne ne peut venir à moi
si cela ne lui est pas donné par le Père. »

À partir de ce moment, beaucoup de ses disciples s’en retournèrent
et cessèrent de l’accompagner.
Alors Jésus dit aux Douze :
« Voulez-vous partir, vous aussi ? »
Simon-Pierre lui répondit :
« Seigneur, à qui irions-nous ?
Tu as les paroles de la vie éternelle.
Quant à nous, nous croyons,
et nous savons que tu es le Saint de Dieu. »

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