Claire Jonard: «J'attends que les jeunes deviennent acteurs dans l'Eglise»

Claire Jonard, coordinatrice pour le Centre romand des vocations (CRV), croit en l’énorme potentiel que représentent les jeunes pour l’Eglise catholique. Elle estime que le synode qui leur est dédié, qui s’achève le 28 octobre 2018 à Rome, va les inciter à devenir encore plus ‘acteurs’ dans l’Eglise.

Les jeunes, elle connaît. Claire Jonard est engagée depuis plus de 20 ans auprès de la jeunesse dans l’Eglise, tout d’abord en Belgique, puis en Suisse. Le 1er août 2018, la vierge consacrée a été nommée présidente du comité des Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) pour la Suisse romande. cath.ch l’a rencontrée à Rome le 27 octobre, à l’occasion de la conclusion du synode des évêques sur ›les jeunes, la foi et le discernement vocationnel’.

Le document final du synode est voté aujourd’hui. En tant que «passionnée» de la jeunesse, qu’est-ce que cela représente pour vous?
Cet événement unique et extraordinaire est tout d’abord l’occasion de communier avec toute l’Eglise. Mais je suis principalement venue à Rome pour faire le lien entre la mission qu’on m’a confiée et ce que vit l’Eglise universelle. Je ressens intimement que quelque chose de très important est en train de se jouer.

Vous êtes en quelque sorte la «porte-parole» de la jeunesse catholique romande. Qu’est-ce que les jeunes ont finalement envie de dire?
Surtout qu’ils ne veulent plus être regardés comme «suspects», mais considérés comme des protagonistes à part entière de la vie de l’Eglise. Il est important pour eux que cela soit reconnu au plus haut niveau.

Les jeunes Romands ont-ils des attentes précises?
De manière générale, la dimension de service est très importante pour eux. Ils voudraient trouver des chemins pour aider autour d’eux. Et il y a certainement des pistes à développer dans cette direction.

«Les jeunes ne veulent pas moins mais plus»

Mais, en ce qui concerne les jeunes, il est important de distinguer des catégories. Il y a beaucoup de jeunes très motivés qui bouillonnent d’idées et d’activités. A ceux-là, le synode peut donner un élan supplémentaire, en même temps qu’un cadre pour canaliser leur énergie. Au-delà, il y a de nombreux autres qui «regardent de loin». Qui sont là sans vraiment y être, qui n’osent pas s’engager à fond. Le message des évêques doit aussi atteindre ce groupe. Ces derniers ont principalement besoin d’être accueillis, écoutés, qu’on réponde à leur question. Et là le travail des accompagnateurs est primordial.

Justement, comment les accompagnateurs peuvent s’inspirer du synode?
Cela peut nous amener à être encore plus attentifs aux demandes des jeunes et à leur laisser plus de place pour devenir ‘acteurs’. Mais aussi, nous devons être des références de confiance et d’écoute. Les jeunes veulent des accompagnateurs bien dans leurs baskets, authentiques, humains, proches de leurs préoccupations. La dimension d’évangélisation chrétienne va se greffer là-dessus, mais ce n’est peut-être pas ce qu’ils recherchent en premier.

De quelle façon les impulsions du synode pourraient se concrétiser en Suisse romande?
En Suisse romande, il existe déjà beaucoup de structures pour la jeunesse. La voie n’est peut-être donc pas d’en créer de nouvelles. Mais je pense que les initiatives vont maintenant émerger de la base, des jeunes eux-mêmes, que le synode va amener des transformations «naturelles».

On sait que les jeunes ont tendance à moins fréquenter la messe. Le synode peut-il changer les choses dans ce domaine?
Il faut d’abord dire que la messe n’est pas le seul lieu de la vie chrétienne, qu’il y a de nombreuses autres façons, utilisées par les jeunes, de vivre leur foi. Des jeunes n’y vont pas pour beaucoup de raisons différentes. Certains ne savent pas ou plus comment s’y comporter et ils se gênent. A ceux-là, il est important de dire qu’ils sont accueillis comme ils sont, sans jugement.

Pour d’autres, le «langage» qui est utilisé à l’église est difficilement compréhensible. Cela dépend bien sûr des paroisses, mais il serait sans doute possible de créer plus de temps de rencontre et de dialogue, par exemple après les célébrations, pour que les choses puissent être expliquées, mises en perspective avec un langage plus accessible.

N’y a-t-il pas un problème générationnel?
Il est sûr que dans certains endroits, les jeunes se heurtent à une certaine «résistance» de l’ancienne génération, qui craint parfois d’être chamboulée dans ses habitudes. Il est important de prendre en compte ces peurs, autant que les attentes des jeunes. Le pape François ne met pas pour rien en avant l’importance des racines. Sans elles, il n’est pas possible de grandir. Il faut donc trouver un équilibre entre la fougue, la créativité de la jeunesse et l’expérience, la sagesse des anciens.

Finalement, je pense que les jeunes ne veulent rien détruire mais créer, ils ne veulent pas «moins», mais «plus». (cath.ch/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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