Une société qui avance?

Nous sortons d’un dimanche de votations avec des résultats contrastés. Le peuple suisse a la chance de pouvoir se prononcer librement sur les sujets les plus variés. Quand on voit sa capacité à résister à l’idéologie (par exemple celle de l’UDC), on a de bonnes raisons de penser que la Suisse n’est pas condamnée à reculer toujours davantage.

Mais cela pose des questions plus générales et plus profondes, au-delà de la seule situation helvétique. L’humanité elle-même est-elle capable de progrès? Aux Etats-Unis, mais aussi en Hongrie ou en Autriche, par exemple, ont surgi des gouvernants réactionnaires, prompts à stigmatiser la démocratie et les droits de l’homme. Les dictatures, quant à elles, ne sont de loin pas disparues. Le monde est en état de déséquilibre instable, avec des risques de conflits permanents et l’éclatement régulier de guerres impitoyables. Un autre exemple de déclin semble être fourni par la situation écologique mondiale et la résistance de certaines nations, les Etats-Unis en tête, devant les tentatives de réforme urgentes comme celle proposée à Paris par la COP 21.

«La concertation sociale et politique est un moyen indispensable de progresser ensemble»

La question est également spirituelle: devant les grands drames qui nous atteignent et qui nous menacent, faut-il adopter une froide attitude de pure rationalité ou de simple cynisme, ou nous engager dans une réelle conversion, à la fois théorique et pratique? Certes, tout le monde ne se trouve pas dans la même condition et ne peut pas contribuer de la même manière aux solutions souhaitables. A notre modeste niveau de citoyen ou de croyant, nous pouvons apporter notre pièce concrète à l’édifice. Mais nous avons aussi notre mot à dire comme nation ou comme société. L’avenir de notre société et de notre monde ne saurait en effet dépendre uniquement de l’addition d’un nombre aussi grand que possible d’actions, d’initiatives ou d’engagements strictement universels. La concertation sociale et politique constitue un moyen indispensable de progresser ensemble, au sein d’une nation et entre les nations.

«Le dialogue pacifique entre les nations reste à l’ordre du jour»

De ce point de vue, les tendances réactionnaires qui noyautent nos sociétés actuelles sont proprement catastrophiques. Chez un Donald Trump, par exemple, la parole, l’attitude et l’action contribuent avec force à décourager l’engagement des individus et à miner la cohésion des sociétés et des nations. «America first», le slogan du président, signifie à la fois la domination du capital et l’arrogance du pouvoir. Trump comprend son rôle, de manière étroitement nationaliste, comme la promotion de la richesse et de la supériorité américaine (les Etats-Unis ayant en quelque sorte le monopole de l’américanité). En fait, le regard de Trump sur l’Amérique et sur les autres nations est un regard de mépris. Ce regard divise profondément les Etats-Unis, stigmatise l’opposition et en définitive la démocratie elle-même. Du même coup, ce regard suscite la méfiance entre les peuples et le conflit entre les nations. A un tout autre niveau, la politique de l’UDC, en Suisse, est porteuse des mêmes travers. La votation de dimanche sur l’initiative de l’UDC nous donne de l’espoir: le nationalisme n’a pas toujours le dernier mot, en Suisse ou aux Etats-Unis: le dialogue pacifique entre les nations reste à l’ordre du jour, comme un impératif moral universel.

Denis Müller

28 novembre 2018

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