En cette nuit de Noël, nous fêtons plusieurs anniversaires.
Il y a 70 ans, la première messe télévisée ; c’était à Noël 1948 à Notre-Dame de Paris.
20 ans avant, le 24 décembre 1928, la toute première messe radiodiffusée en Suisse, et pratiquement de toute l’Europe[1]. C’était à Genève, à l’église Saint-Joseph de Genève, voisine de la basilique Notre-Dame. Il y a donc tout juste 90 ans.
Cet anniversaire est l’occasion de vous redire, chères auditrices et chers auditeurs, que nous sommes heureux de vous rejoindre grâce à la radio. Vous faites partie ce soir de notre communauté qui célèbre Noël. Avec toutes les personnes présentes ici à la basilique, nous vous souhaitons un très joyeux Noël !
En cette nuit de Noël, nous célébrons encore un autre anniversaire, encore plus ancien. Il y a tout juste 200 ans, jour pour jour, heure pour heure, était interprété pour la première fois dans une petite église près de Salzburg en Autriche, un chant qui allait devenir très connu. Je suis sûr que vous le connaissez. Écoutez…
Jean-Christophe Orange joue le chant à l’orgue
Vous l’avez reconnu ?
Douce nuit, sainte nuit;
Tout au loin dort sans bruit,
Seuls les anges dans les airs
chantent leurs plus doux concerts.
À l’Emmanuel, à l’Emmanuel.
Quand il compose ce chant, Josef Franz Mohr n’a évidemment pas conscience que Douce nuit deviendrait le chant le plus connu de Noël. La vie même de ce prêtre et les circonstances de la composition sont une belle histoire de Noël : fils illégitime d’un père déserteur qui a quitté sa mère avant sa naissance, Joseph Mohr a grandi dans une grande pauvreté, jusqu’à ce qu’un prêtre l’aide à avoir une meilleure éducation. Il va pouvoir entrer au séminaire et être ordonné prêtre en 1815.
En des temps troublés, le jeune abbé entend les peines de ses paroissiens ; cela lui inspire un poème destiné à redonner de l’espoir. Il l’intitule « Stille Nacht ! Heilige Nacht ! ».
L’année suivante, il est envoyé à Oberndorf où il fait connaissance de l’instituteur Franz Gruber, qui officie comme organiste.
Dans l’après-midi du 24 décembre 1818, il demande à son ami de mettre son poème en musique, avec une partition pour deux voix, chœur et guitare, l’orgue ayant rendu l’âme. « Douce nuit, sainte nuit » est probablement chanté par ses auteurs, le jour même lors de la messe de minuit, dans la petite église Saint-Nicolas. Il est chanté en allemand, et non pas en latin, ce qui n’était pas si habituel à l’époque, et surtout accompagné de la guitare.
Quelques temps plus tard, un facteur d’orgue tyrolien emmène la partition avec lui, et elle va rapidement partir à la conquête du monde entier, jusqu’au Etats-Unis, traduite en 300 langues et dialectes, connue et chantée aujourd’hui dans le monde entier.
Il y a plusieurs traductions en français. L’une des plus belles dit ceci :
Douce nuit, sainte nuit,
Dans les cieux, l’astre luit.
Le mystère annoncé s’accomplit
Cet enfant sur la paille endormi
C’est l’amour infini
C’est l’amour infini.
La lumière du Christ
En cette douce et sainte nuit, comme l’avait annoncé le prophète Isaïe, la lumière vient briller dans le pays des ténèbres. Saint Jean, dans le prologue de son Evangile, dira que « Le Verbe est la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde » (Jean 1, 9). Qu’en cette nuit de Noël, nous puissions accueillir en profondeur la lumière du Christ qui vient illuminer tout ce qui est encore ténèbres en nous !
Le mystère annoncé s’accomplit. Le Messie tant attendu, annoncé par les prophètes, se fait l’un de nous pour nous sauver. Le signe donné aux bergers pour le reconnaître, c’est un « enfant sur la paille endormi ». Cet enfant, c’est l’amour infini ! Dieu nous donne son fils. Accueillons, aujourd’hui, cet amour infini !
Une autre strophe dit :
Ô nuit d’espoir, sainte nuit,
L’espérance a relui
Le Sauveur de la terre est né,
C’est à nous que Dieu l’a donné.
Célébrons ses louanges,
Gloire au Verbe incarné.
Nuit d’espoir
C’est un magnifique chant d’espérance. Spécialement pour tous ceux d’entre nous pour qui cette année a été difficile, endeuillée par la perte d’un proche, alourdie par la maladie, surchargée par des soucis financiers ou le stress.
Que Noël soit pour nous une nuit d’espoir, où l’espérance reluit.
Car un Sauveur nous est donné, c’est Jésus, l’Emmanuel !
Justement, dans la version plus courante, chaque strophe se termine par l’Emmanuel :
– Les anges dans les airs chantent leurs plus doux concerts à l’Emmanuel
– Les bergers sont accourus adorer l’Enfant Jésus, doux Emmanuel
Emmanuel signifie Dieu avec nous.
J’aime beaucoup ce nom, qui est tout un programme.
Dans Emmanuel , il y a Dieu (el), il y a nous (en hébreu : anou), et entre les deux, ce petit mot tout simple, presque insignifiant, mais tellement important (ime) : « avec ».
Dieu est « avec » !
Il est avec nous, nous ne sommes donc jamais seuls.
Nous aussi, nous sommes « avec ». Nous sommes avec Dieu, avec nos proches, avec toutes celles et tous ceux que nous croisons sur notre route.
Noël, c’est Dieu « avec » nous ! Que nous puissions tous ressentir en cette nuit de Noël combien Dieu est avec nous.
[1] A cette date, il y a eu une seule autre messe de minuit radiodiffusée en Europe, c’est celle de Poznan en Pologne. C’était donc une première, avant que les messes radio se multiplient en Europe dans les années 30, et deviennent régulières sur Radio-Lausanne et Radio-Genève dès 1940.
La Nativité du Sauveur
Lectures bibliques : Isaïe 9, 1-6; Psaume 95; Tite 2, 11-14; Luc 2, 1-14
https://www.cath.ch/homelie-de-la-messe-de-minuit-25-decembre-2018-lc-2-1-14/