«A l'Enfant Jésus de Sarnen, on peut confier tous ses soucis»

Le couvent bénédictin de Sarnen, dans le canton d’Obwald, est un lieu de pèlerinage très fréquenté. Son trésor le plus précieux est sa statue de l’Enfant Jésus qui, à Noël, prend pour beaucoup de fidèles une signification particulière.

En ce début de matinée d’hiver, un vent glacial souffle sur Sarnen. Malgré cela, on constate déjà une grande activité à l’entrée de l’église du monastère de Saint-André. Un complexe qui a résisté, en ses plus de 400 ans d’existence, à de multiples catastrophes, dont une série de forts tremblements de terre en 1964 et une inondation destructrice en 2005.

L’effervescence matinale n’est pas seulement due à l’office de prière des bénédictines, qui se réunissent dans l’église principale du monastère. De nombreux visiteurs veulent également entrer dans la nef pour voir l’Enfant Jésus, une figurine gothique en bois datant du XIVe siècle. La statue est placée bien en évidence, dans une cage de verre, un globe terrestre trônant sur sa jambe droite surélevée. L’enfant, avec son doux visage et son regard plein de sagesse, est vénéré par de nombreux croyants. «Chaque visiteur semble avoir une relation particulière avec l’Enfant Jésus de Sarnen», assure Sœur Rut-Maria Buschor, une moniale de 47 ans, qui s’est fait une réputation comme blogueuse et fan de musique rock.

Un monastère proche de son temps

En cette période de Noël, une grande activité a également lieu aux portes du monastère. La mission des religieuses, selon le chapitre 66 de la règle de saint Benoît, inclut un accueil des personnes en demande à l’entrée des couvents. Les moniales sont confrontées à toute la gamme des problèmes qui touchent les personnes dans le monde actuel.»Il y a beaucoup de gens qui nous demandent de prier parce qu’ils sont malades, au chômage ou seuls», explique Sœur Rut-Maria. Il n’est pas rare qu’on demande la paix au sein de familles divisées. Certains pleurent à la porte. En cette période de Noël, l’écoute est parfois épuisante, confie la bénédictine, mais elle garde le monastère «proche de son temps».

La sonnette retentit à nouveau. Cette fois-ci, Sœur Pia Habermacher, la Mère-Abbesse, ouvre la porte en bois qui sépare le couvent du monde extérieur. En plus d’un gâteau au citron et de mandarines, une femme lui remet une lettre avec des demandes de prière, qui doivent aussi être portées à l’Enfant Jésus. Pia Habermacher, qui est entrée au monastère de Sarnen en 1962, a fait la connaissance de l’Enfant Jésus étant petite. «Mes parents m’ont dit que l’on pouvait lui confier tous ses soucis», raconte-t-elle. Pour la Mère-Abbesse, il symbolise «la naissance, la vie et le renouvellement qui vient au monde par un enfant» à Noël.

Travaux en cours

Les offices de prière sont encore plus importants pour les six moniales du lieu, alors que de bruyants travaux de rénovation sont en cours dans le couvent. Ces temps de recueillement constituent des points de repère dans le chaos. Au cours des derniers mois, plusieurs bâtiments ont été rénovés et agrandis sur le terrain du monastère, car les bénédictines de Melchtal (OW) et de Wikon (LU) viendront également y vivre à partir de fin février 2019.

Sœur Rut-Maria rejoint ses consoeurs pour l’office du matin, qui a lieu dans l’église du monastère. La figurine de bois irradiante de sagesse constitue un point de repère dans la cérémonie. Les sœurs rassemblées dans le chœur demandent de la force à travers le chant et la prière, de même que les fidèles sur les bancs. «Nous incluons toutes ces préoccupations dans nos prières et les déposons devant l’Enfant Jésus», assure Sœur Rut-Maria en sortant de l’église.

Changement de tenue pour l’Enfant Jésus

Quand la statue doit changer d’habit, comme c’est le cas à Noël, Rut-Maria se rend dans la salle du patrimoine culturel. Là se trouve le véritable trésor du monastère. La religieuse ouvre la porte du nouveau secteur abritant d’innombrables et précieux manuscrits, ouvrages, peintures ou encore offrandes votives pour l’Enfant Jésus. La pièce est conçue pour protéger les objets du feu, des inondations ou des tremblements de terre. «L’Enfant Jésus et le monastère ont failli disparaître, il y a 13 ans, dans les inondations du siècle». La statue avait pu être sauvée en étant transportée à l’étage supérieur.

Sœur Rut-Maria sort d’une vitrine, avec précaution, l’habit que l’Enfant Jésus porte à Noël. Il s’agit de la robe de fête de la reine Agnès. La reine Agnès de Hongrie, qui faisait partie des bienfaiteurs du couvent- dont la réputation allait bien au-delà de la Suisse centrale-, avait fait un séjour à Engelberg (OW) en 1325. La souveraine avait fait donation au couvent de pièces d’étoffe, dont le fameux «manteau d’Agnès». Le vêtement est encore en bon état, même si les boutons, les appliqués et la doublure montrent d’évidents signes d’usure.

Un Noël «peu spectaculaire»

Quand les familles se réunissent autour du sapin, la veille de Noël, tout est calme dans le monastère situé à la Brünigstrasse 157. La journée est délibérément «peu spectaculaire». «En ce jour, nous nous concentrons encore plus sur notre intériorité «, explique Sœur Rut-Maria. La Mère-Abbesse a l’habitude, ce soir-là, de se promener dans le grand jardin du couvent pour «envoyer de la lumière et des intercessions à tous les peuples du monde».

Après la célébration de 22 heures dans l’église du monastère, les sœurs se retireront dans le silence ou déballeront leurs cadeaux de Noël. Le 28 décembre, seulement, se déroulera une petite fête de Noël, où seront servis vin chaud, thé et pâtisseries. (cath.ch/vr/kath/rz)


Le couvent de Saint-André a pour origine une communauté de bénédictines établie dès le XIIe siècle à Engelberg (OW), parallèlement à une communauté masculine. La communauté féminine fut transférée à Sarnen (OW) en 1615. La vénération de l’Enfant Jésus, dont le culte était déjà attesté à Engelberg, se développa dans le chef-lieu obwaldien et devint une destination de pèlerinage très prisée.

Le couvent fut touché, de mi-février à mi-mars 1964, par une série de tremblements de terre ayant ébranlé la zone de Sarnen, dont le plus violent a atteint 5,3 sur l’échelle de Richter. Les séismes ont occasionné de gros dégâts au monastère, fissurant notamment des murs.

Fin août 2005, la Suisse centrale, et notamment la région de Sarnen, a été confrontée à l’une des pires crues de son histoire. Six personnes sont mortes dans la catastrophe et les dégâts se sont élevés à dix milliards de francs. Lors de cet épisode, le monastère de Saint-André avait été en grande partie inondé. RZ

 

 

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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