Le patriarche Cyrille s'en prend violemment au patriarche Bartholomée

La décision de Constantinople d’annuler le décret vieux de 300 ans sur le transfert du siège métropolitain de Kiev à Moscou n’a pas pu être prise par «un esprit sain», estime le patriarche de Moscou Cyrille, visant directement le patriarche Bartholomée.

Ainsi, la hache de guerre est loin d’être enterrée entre chef de l’Eglise orthodoxe russe, dont dépend l’Eglise orthodoxe canonique d’Ukraine, et le patriarche œcuménique. Ce dernier a soutenu la volonté du président ukrainien Petro Porochenko de mettre sur pied une Eglise nationale ukrainienne indépendante de Moscou. Le patriarcat de Moscou qualifie cette nouvelle «organisation ecclésiastique» de schismatique.

Des dirigeants pas «sains d’esprit»

«Les actions de Constantinople nous laissent perplexe du point de vue du bon sens. Je me demande comment ils ont pu dire qu’ils abolissent la charte du patriarche Dionysius de 1686 ! Je me demande comment quelqu’un de l’Eglise ou des dirigeants séculiers sains d’esprit peuvent dire qu’un acte historique de 300 ans est aboli», a déclaré le patriarche Cyrille à Moscou en résumant les résultats de la dernière séance du Haut Conseil ecclésiastique de l’Eglise orthodoxe russe du 26 décembre 2018.

Le patriarche Cyrille a déploré des événements «extrêmement dangereux pour l’intégrité du peuple orthodoxe, et pas seulement pour notre Eglise», en citant la décision du Parlement ukrainien exigeant de modifier la dénomination de l’Eglise orthodoxe ukrainienne.

Risques de dérapages sanglants

«Ces modifications devraient être suivies de répressions, et il est évident qu’il s’agit d’une sorte d’ultimatum: si l’Eglise ne change pas de dénomination, son enregistrement lui sera retiré. Si l’Eglise change de dénomination, naturellement, on opérera les pressions les plus fortes sur les Ukrainiens, sur la société. Il y aura sans aucun doute des saisies d’églises par la force. Or, le peuple des croyants, les orthodoxes d’Ukraine, sont fermes dans la foi, émotifs. Tout ce qui concerne leurs églises risque de tourner au conflit sanglant. C’est pourquoi je vous demanderais d’intensifier notre prière commune pour la conservation de la paix en terre d’Ukraine, ainsi, bien sûr, que nos prières pour la préservation de l’Eglise orthodoxe ukrainienne».

Le patriarche Cyrille a encore dénoncé l’ingérence «sans précédent» dans les affaires internes de l’Eglise, «et ceci dans un pays qui déclare son attachement aux valeurs européennes, dont l’une est la séparation de l’Eglise, de la religion et de l’Etat ! En violation de cette valeur européenne fondamentale, l’Etat, en la personne du président, interfère directement dans la direction de l’Eglise et, on peut le dire, préside ce qu’on a appelé ‘le concile de réunification ecclésiale’, participe aux négociations avec Constantinople sur le fameux tomos [décret], tout cela devant les caméras, aux yeux du monde entier».

«Les ordres de l’administration américaine»

De son côté, le métropolite Hilarion, chef du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou a estimé que le Patriarche Bartholomée, par ses actions, accomplissait «les ordres de l’administration américaine» concernant l’Ukraine. Le numéro deux du Patriarcat de Moscou, poursuivant sur sa lancée, a déclaré que le patriarche Bartholomée faisait partie «d’un grand projet géopolitique, un projet visant à affaiblir davantage la Russie, à créer un fossé entre les peuples de Russie et d’Ukraine».

«L’Eglise orthodoxe russe, qui unit ces peuples, est probablement aujourd’hui le principal obstacle à la mise en œuvre des plans des Etats-Unis», a-t-il déclaré dans une interview publiée sur le site de l’Eglise orthodoxe russe. (cath.ch/mospat/be)

Jacques Berset

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