Indonésie: le combat d'un franciscain pour le développement durable

Le Père franciscain indonésien Yohanes Kristoforus Tara s’engage depuis des années pour le développement durable dans la province du Timor occidental. Il s’efforce notamment de favoriser de revitaliser l’agriculture locale afin d’éviter l’émigration.

Arrivé dans la province du Timor occidental en 2013, le Père Yohanes Kristoforus Tara a trouvé des terres stériles et arides. Beaucoup d’habitants avaient quitté la province pour travailler à l’étranger ou dans les plantations d’huile de palme des provinces fertiles de Sumatra ou du Kalimantan.

Pays chrétien

Le Père Kristo, ainsi qu’il est connu dans la région, est aujourd’hui curé de la paroisse Saint-François d’Assise de Laktutus, près de la frontière avec le Timor Leste. Aussi appelée Timor oriental, cette république, indépendante de l’Indonésie depuis 2002, compte une large majorité de catholiques. Le Timor occidental constitue la partie indonésienne de l’île de Timor. Les chrétiens y sont également très majoritaires, mais la proportion de protestants est plus forte qu’à l’est (35%). Les catholiques constituent 56% de la population et les musulmans 8%.

Le défi du déboisement

La paroisse de Laktutus compte près de 3’000 fidèles, dont 300 sont partis travailler à l’étranger. La plupart des terres du Timor étant sèches, l’industrie agricole y est peu développée.

Le Père Kristo s’est donc rapidement attelé à la sauvegarde des terres et à l’émancipation économique de la région. Il a entamé des échanges avec les chefs de communautés et avec le gouvernement local. Le franciscain a lancé sa première action d’envergure en 2014. Face à la diminution inquiétante des forêts, qui favorise la désertification, il a demandé aux familles locales de planter des arbres devant chez eux et de réserver des portions de terrain pour y planter des sources d’approvisionnement en bois. Le Père Kristoforus a également encouragé les habitants à planter des caféiers afin de soutenir l’économie de la communauté. En tout, sous la supervision du prêtre, plus de 10’000 arbres et 15’000 caféiers ont été plantés.

Changer les mentalités

Le Père Kristo a commencé par réaliser ses propres plantations sur un terrain de six hectares appartenant à la paroisse. Certains ont suivi son exemple. Mais d’autres n’ont montré aucun intérêt pour son programme de reboisement. Le défi consistait donc à changer l’état d’esprit de la population. Elle pense généralement que le travail devrait entraîner des revenus immédiats. Ce qui pousse les personnes à travailler comme ouvriers agricoles ou à partir à l’étranger. La population est en outre peu sensibilisée à la protection de l’environnement. «Je leur dis que s’ils ne plantent pas aujourd’hui, leurs enfants n’auront pas de bois pour construire leurs foyers. Et s’ils ne prennent pas soin des sources, leurs petits-enfants n’auront pas accès à l’eau potable.»

Forces contraires

Bien que ces efforts de reboisement restent pour le moment surtout symboliques, ils ont valu au prêtre le prix Kalpataru, une récompense accordée par le gouvernement du district de Belu.

Mais le franciscain doit également faire face à des puissantes forces contraires. A son arrivée au Timor occidental, il s’est opposé à la société «PT Soe Makmur Resources», dont les activités menacent les terres agricoles et assèchent les sources d’eau. L’entreprise exploite le manganèse dans le district du Timor central sud. Avec des habitants, le prêtre catholique a occupé le site d’exploitation de la société. Le gouverneur des Petites îles de la Sonde orientales, Viktor Bungtilu Laiskodat, qui soutient le combat du Père Kristo, a ainsi signé, en novembre 2018, une directive imposant un moratoire sur tous les permis d’exploitation minière dans la province.

Des efforts qui portent du fruit

Le Père Kristo recherche ainsi toujours des solutions de développement économique qui ne nuisent pas à l’environnement. Des efforts qui commencent à porter leurs fruits, notamment au niveau des mentalités. «Il nous a ouvert l’esprit», assure ainsi Isto Sury, l’un des chefs du village de Laktutus, en citant l’exemple des caféiers plantés à la demande du prêtre. «Cela nous donne de l’espoir de chercher des opportunités de travail et de développement sur nos propres terres plutôt qu’ailleurs.» (cath.ch/eda/ucan/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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