Que sait-on véritablement des rois mages?

Qui sont les rois mages? La Bible nous dit simplement qu’il s’agit de sages venus d’Orient. Plus tard, la tradition patristique en fera des rois. Et l’Occident médiéval des saints. Décryptage.

L’évangéliste Mathieu présente les mages comme des voyageurs mystérieux, venus d’Orient «pour se prosterner» devant l’enfant Jésus. Ce sont des «magoï» en grec, c’est-à-dire des «sages» (Mt 2,1-12).

Ces versets devenus célèbres rapportent qu’ils avaient vu surgir dans le ciel «l’étoile du roi des Juifs» et qu’ils s’étaient ainsi mis en route vers la Judée. La Bible n’affirme nul part qu’ils étaient rois. D’où vient donc cette coutume de les nommer rois mages.

Trois, chiffre symbolique

L’identité royale des mages, qui s’est perpétuée jusqu’à nos jours, est très ancienne. Elle remonte à l’Ancien Testament, notamment au livre du prophète Isaïe qui mentionne l’hommage rendu par des rois à Jérusalem.

C’est sur cette base que s’appuieront de grands auteurs antiques comme Tertullien. Au IIIe siècle, il présentera les mages comme des «presque rois». Quelques décennies plus tard, son homologue Origène affirmera pour des raisons symboliques que les mages étaient trois. D’une part, ce chiffre correspond à l’or, l’encens et la myrrhe offerts, selon le récit biblique, à l’enfant Jésus. D’autre part, il représente les trois disciplines qui mènent à la connaissance, selon Origène: la logique, la physique et l’éthique.

Un vieillard à cheveux blancs

Au VIIIe siècle, en se basant sur des textes non reconnus officiellement par l’Eglise, la tradition leur donnera trois noms: Melchior, Gaspard et Balthazar. Dès le XIe siècle, en Occident, on vénérera même les mages comme des saints. Leurs reliques sont toujours conservées à la cathédrale de Cologne. En Orient, en revanche, ce sont leurs dons qui sont vénérés comme reliques au monastère Saint-Paul du mont Athos.

C’est à la fin du XIIIe siècle que la Légende dorée, une histoire hagiographique écrite par le dominicain Jacques de Voragine, propose une première synthèse des différentes interprétations liées aux mages, en dressant leur portrait.

Sur un plan théologique, la visite des mages souligne l’universalité de la naissance de Jésus.

«Le premier des Mages s’appelait Melchior, c’était un vieillard à cheveux blancs, à la longue barbe, écrit ainsi Jacques de Voragine. Il offrit l’or au Seigneur comme à son roi, l’or signifiant la Royauté du Christ. Le second, nommé Gaspard, jeune, sans barbe, rouge de couleur, offrit à Jésus, dans l’encens, l’hommage à sa Divinité. Le troisième, au visage noir, portant toute sa barbe, s’appelait Balthazar ; la myrrhe qui était entre ses mains rappelait que le Fils devait mourir».

Des non-juifs adorant Jésus

Le fondement historique et l’identité précise de ces voyageurs venus d’Orient demeurent incertains. En revanche, il est certain que l’intervention de devins et de sages lors de la naissance d’un enfant important est un motif littéraire bien présent dans la littérature juive et romaine de l’époque. De même que l’apparition d’une étoile lors de la venue au monde d’un empereur ou d’un roi.

Sur un plan théologique, la visite des mages souligne l’universalité de la naissance de Jésus car ils n’étaient pas juifs. La solennité de l’épiphanie célèbre ainsi la manifestation à tous les peuples du fils de Dieu. Des peuples qui, dans le langage biblique, sont précisément représentés par ces personnages illustres qui arrivèrent en Judée depuis les extrémités de la terre.

Après les bergers guidés par les anges, c’est, dans le calendrier liturgique, au tour des élites païennes, conduits par l’étoile, d’adorer le Christ. C’est l’autre pôle d’un même mystère qui se célèbre à Noël: l’incarnation de Dieu en Jésus, le Dieu-avec-nous.


Une étoile dans le ciel?

Selon le récit biblique, arrivés à Jérusalem, les mages questionnent les habitants de la ville et leur roi: «Nous avons vu son étoile à l’Orient et nous sommes venus nous prosterner devant lui.» (Mt 2,2).

Mais de quelle étoile parlent-ils précisément? La présence d’une étoile guidant les mages chez Matthieu s’articule sur une prophétie messianique du Livre des Nombres qui, à l’époque, considérait le surgissement d’une étoile plus lumineuse que les autres comme l’annonce de la venue du Rédempteur.

Cette prophétie s’est ensuite développée dans la littérature chrétienne, qui évoque l’»étoile du Rédempteur», un astre plus lumineux encore.

En réalité, plus qu’une étoile particulière, les mages auraient probablement pu observer un alignement extraordinaire de planètes. Parmi certaines théories répandues, des scientifiques évoquent une conjonction astrale qui se serait produite par trois fois en l’an 7 avant notre ère: celle de Jupiter et de Saturne dans la constellation du poisson. (cath.ch/dp)

Bernard Hallet

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