La City-Kirche de Zurich invite les amis des animaux à une célébration funèbre

Pour la première fois en Suisse, une célébration liturgique pour les personnes en deuil d’un animal a eu lieu le dimanche 3 février 2019, à la City-Kirche de Zurich. Les visiteurs sont venus non seulement de Suisse alémanique, mais aussi des pays voisins. Le pasteur Michaël Schaar estime que la question doit être prise au sérieux.

«Dans l’amour profond et la gratitude,» ou «Je t’aimerai toujours.» Ces phrases et d’autres semblables n’ornent pas les rubans de couronnes mortuaires d’un enterrement, mais ont été écrites dans un livre de condoléances par les personnes présentes lors de la première célébration en Suisse pour les personnes qui pleurent la perte d’un animal.

Certes à peine plus de 30 personnes s’étaient rassemblées, le 3 février 2019, à la City-Kirche de Zurich, mais certaines étaient venues de loin de Thurgovie ou de Soleure, par exemple, mais aussi d’Autriche et d’Allemagne.

«Pour les personnes qui n’ont pas de lien étroit avec les animaux, le deuil d’un animal est difficile à comprendre»

«Aujourd’hui, nous voulons parler d’un thème qui ne s’est pas encore imposé dans la société: le deuil de nos compagnons animaux.» C’est par ces mots que Michael Schaar, pasteur réformé de l’église Saint-Jacques, et membre du conseil d’Akut (Action Eglise et animaux), a ouvert la prière.

Aujourd’hui la mort et le deuil sont souvent tenus à l’écart. «Et pour les personnes qui n’ont pas de lien étroit avec les animaux, le deuil d’un animal est difficile à comprendre, admet Michael Schaar, mais cela ne doit pas nous troubler.»

Kahila, une jument morte à 31 ans

Au cours de ce service funèbre, les propriétaires d’animaux de compagnie ont pu allumer des cierges pour les membres à quatre pattes de leur famille décédés. Un livre de condoléances était ouvert pour écrire leurs sentiments.

 

La famille Schenker, par exemple, a perdu sa jument Kahila il y a un an. Après une vie bien remplie, le cheval est mort à l’âge de 31 ans, «après avoir vécu avec nous pendant 20 ans», a rapporté Mme Schenker après la célébration. «C’était un membre de la famille et la raison principale pour laquelle nous nous sommes mariés et nous avons eu un enfant.» Kahila a également redonné confiance à de nombreux enfants qui avaient vécu des situations difficiles.

«La perte d’un animal est souvent banalisée»

Le couple Meier est toujours en deuil de ses chats morts en 2016, dans un intervalle de trois mois. La mort récente d’un chat d’une connaissance, qu’ils gardaient régulièrement, a rouvert de vieilles plaies. Les époux confirment qu’ils n’ont pas toujours trouvé de compréhension dans leur deuil: «Vos chats étaient déjà vieux. Vous saviez bien que cela arriverait», leur dit-on parfois. Mais Mme Meier n’en veut pas à ceux qui s’expriment ainsi, car «celui qui n’a pas d’animaux lui-même ne peut pas comprendre».

«Les animaux remplissent le même rôle que des humains»

«Beaucoup de gens ne comprennent pas que les animaux ne sont pas simplement des choses en mouvement, mais des compagnons, qui nous tiennent à coeur», explique la vétérinaire Marion Schmitt, de Hanovre, en Allemagne. Dans son mémoire, la jeune femme de 25 ans traite du deuil des animaux domestiques. Le pasteur Schaar, qui a connu son étude par hasard, l’a spontanément invitée à venir parler de ses recherches, au lieu du prêche habituel.

Pour Marion Schmitt, le résultat le plus important de son travail est le fait qu’il n’y a pas fondamentalement de différence entre le deuil d’un être humain et celui d’un animal. Néanmoins, la perte d’un animal est souvent banalisée. «Ce n’était qu’un animal de compagnie», entendent souvent les personnes touchées. «Si l’on s’exprimait de la même façon au sujet d’un parent décédé, il en résulterait immédiatement une forte condamnation sociale», relève Marion Schmitt.

«Quand l’animal meurt, c’est dramatique»

Mais les animaux sont des membres de la famille et remplissent souvent le même rôle que les humains dans une relation. «Souvent, nous passons des décennies avec nos animaux de compagnie. Et nous avons alors beaucoup plus en commun avec eux que nous ne le pensions au départ. Quand l’animal meurt, c’est dramatique», poursuit la vétérinaire.

En outre, il faut souvent prendre la décision d’endormir son compagnon. «Avec le vétérinaire, il faut estimer si le fait de continuer à vivre est encore favorable pour l’animal. On ne décide pas au sujet de l’animal, mais pour l’animal», souligne Marion Schmitt, qui connaît bien ces situations par son travail dans un cabinet vétérinaire.

«Animés par le même esprit divin»

Christa et Bernhard Rinke sont venus à l’église avec leurs deux chiens. Ils souhaitent que la question des animaux soit abordée dans les paroisses. «Nous pensons que c’est important parce que les animaux sont aussi membres de notre société «, explique Christa.

Militante pour la protection des animaux, Christine Gadola a distribué des tracts d’organisations végétariennes. Pour elle, on ne peut pas oublier les animaux abattus pour leur viande. «Quand j’interpelle les chrétiens sur leur consommation de viande, la référence à la Bible, qui dit que les animaux sont soumis à l’homme, revient souvent». Ce qu’elle n’accepte pas. Rappelant les paroles du pasteur Schaar: «L’homme et les animaux sont animés par le même esprit divin», elle se dit convaincue que si on arrêtait de manger de la viande, plus personne au monde ne mourrait de faim.

«Il s’agit de développer une réflexion théologique raisonnée. Mais cela prendra du temps»

Le pasteur réagit à la demande

Le thème du deuil des animaux de compagnie est devenu important pour Michael Schaar lorsqu’il a pris ses fonctions de pasteur de la City-Kirche. Chaque semaine, les gens pouvaient le rencontrer librement pour une conversation pastorale. «Or dans ces dialogues, la question du deuil des animaux de compagnie était régulièrement abordée. Et souvent par des personnes qui n’étaient pas membres de l’Eglise.»

Le désir de rituels funéraires pour les animaux s’est également exprimé à plusieurs reprises. Pour le pasteur Schaar, il s’agit de développer une réflexion théologique raisonnée. Mais cela prendra du temps. Quoi qu’il en soit, un service commémoratif pour les personnes en deuil d’animaux de compagnie aura sa place à l’avenir dans le calendrier annuel de la City-Kirche. Un groupe d’accompagnement au deuil pour les propriétaires d’animaux domestiques est également prévu.

La pasteure allemande Natalie Ende était venue spécialement de Francfort pour l’occasion. Elle s’est dite très impressionnée par la célébration. Auteure d’un livre sur la place des animaux dans l’Eglise, elle n’avait encore jamais trouvé, en Allemagne, ce genre service, pour des personnes endeuillées par la perte d’un animal. «C’est une toute nouvelle façon de faire», a-t-elle conclu. (cath.ch/kath.ch/am/mp)

Maurice Page

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