Abus sexuels: les religieuses romandes sortent du silence

Face à la crise des abus sexuels qui secoue l’Eglise, l’Union des supérieures majeures de Suisse romande (USMSR), qui regroupe un peu moins de 500 religieuses, tient à joindre sa voix à celles des autres unions de religieuses, du pape et des évêques. Outre la dénonciation des crimes et du silence coupable qui les a couverts, les religieuses veulent reconnaître leur responsabilité et demander pardon aux victimes.

«Il ne se passe pas de jour sans que de nouvelles révélations nous parviennent nous laissant sans voix, abasourdies, honteuses… Et tout semble dire que ce que nous découvrons ne représente que la pointe visible d’un iceberg», déplorent les religieuses, dans une déclaration publiée le 16 avril 2019 et signée de leur présidente, Sœur Marie-Emmanuel Minot.

L’USMSR tient à joindre sa voix à celles d’autres Unions comme la Conférence des Religieux et Religieuses de France (CORREF), l’Union Internationale des Supérieures Générales (UISG), l’Union des Supérieurs Généraux (USG), ainsi qu’à celles de Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg et de Mgr Jean-Marie Lovey, évêque de Sion et bien sûr celle du pape François.

L’abus des enfants est un mal partout et en tout temps

D’abord et avant tout les religieuses romandes tiennent à dénoncer les crimes perpétrés sur des enfants. «Avec l’UISG, nous affirmons vigoureusement que l’abus des enfants est un mal partout et en tout temps: ce point n’est pas négociable. Nous dénonçons avec la même force les abus sexuels perpétrés sur des religieuses par des prêtres, des religieux, des évêques, avec parfois la complicité criminelle des supérieures, chez nous en Europe et sur d’autres continents.»

Les religieuses dénoncent ensuite le silence coupable de certains responsables, y compris des supérieures de communautés religieuses, alors qu’il aurait fallu écouter, accompagner, soutenir les victimes et dénoncer les auteurs de crimes. «Nous savons maintenant combien ce silence a contribué à enkyster la souffrance et détruire la vie des victimes.»

Le courage et la persévérance des victimes

«Nous voulons aussi reconnaître notre responsabilité de religieuses et demander pardon aux victimes qui n’auraient pas trouvé auprès de nous l’écoute et le soutien dont elles avaient urgemment besoin.»

A l’instar du pape François, les religieuses tiennent aussi à remercier les victimes et les médias pour leur courage et leur persévérance. «Si victimes et médias n’avaient pas parlé, pourrions-nous aujourd’hui affronter enfin nos zones d’ombre? Oserions-nous préférer la lumière aux ténèbres, la parole libératrice au silence qui tue, critiquer nos pratiques de gouvernance et de pouvoir dans l’Eglise, entrer dans le vaste chantier de réforme auquel nous invite le pape François ?»

Donner la priorité à l’écoute

Concrètement, les religieuses affirment leur ferme volonté de s’engager dans la lutte contre la pédocriminalité et les abus commis à l’égard de religieuses. Il s’agit en particulier de donner la priorité à «l’écoute de toute personne victime qui viendrait se confier à nous, en l’orientant, si besoin est, vers des lieux d’écoute (ASCE, CECAR ou SAPEC)». IL s’agit en outre de dénoncer à la justice civile et aux responsables hiérarchiques les cas d’abus qui parviendraient à leur connaissance.

Le mal et le mensonge ne triompheront pas

Au-delà de la dénonciation, les religieuses romandes veulent aussi exprimer leur espérance. Elles affirment d’abord leur soutien et leur reconnaissance à tous les prêtres diocésains et religieux, qui vivent leur engagement sacerdotal avec droiture et générosité.

«Nous disons notre foi et notre espérance: fortes de notre adhésion à Jésus-Christ, Cette terrible crise qui ébranle les fondements mêmes de l’Institution ecclésiale est sans doute l’occasion pour elle et donc pour chacun, chacune de nous qui sommes l’Eglise: celle d’une conversion radicale à l’esprit de l’Evangile, à l’esprit de Jésus qui est un esprit de douceur, de respect inconditionnel de la personne ; un esprit de service du pauvre, de l’enfant, du faible, du sans-voix.

L’espérance des religieuses est aussi qu’il y ait un chemin de libération pour que les victimes puissent être délivrées de ce poids. «Que les auteurs d’abus sexuels prennent un chemin de vérité et de renaissance, là est encore notre espérance.»

Le chantier est immense

«Le chantier qui attend l’Eglise, qui nous attend, est immense!», conclut la déclaration. L’USMSR désire s’y engager, dans la mesure de ses possibilités et à la place qui est la sienne. «Elle désire participer à cette œuvre de renouveau pour que l’Eglise soit cette maison où chacun puisse vivre en sécurité et y trouver sa place, ce lieu où nous pouvons nous découvrir frères et sœurs les uns des autres et enfants bien-aimés de Dieu.»  (cath.ch/com/mp)

 

Maurice Page

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