Le Conseil de la presse rejette une plainte de la Commission de bioéthique

En publiant le portrait d’une femme favorable au suicide assisté, le quotidien Le Temps n’a pas violé la déontologie journalistique. C’est ce qu’a estimé le Conseil suisse de la presse (CSP), le 16 avril 2019,  suite à une plainte de la Commission de bioéthique de la Conférence des évêques suisses (CES).

La Commission de bioéthique de la CES avait déposé une plainte en novembre 2018 auprès du CSP estimant qu’avec la publication du portrait de Mme Jenquel, Le Temps faisait l’apologie du suicide assisté et violait en cela les directives 7.9 (sur le suicide) et 8.1 (sur la dignité humaine) de la «Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste».

En août 2018 Le Temps a publié un article consacré à Mme Jacqueline Jencquel. Il relate le parcours de cette femme de 75 ans. Sa décision de «quitter ce monde en janvier 2020» alors qu’elle est en bonne santé est mise en avant dans le titre et le chapeau.

Le Temps revient sur cette parution quelques jours plus tard, évoquant le choc créé auprès des lecteurs par sa publication et par la diffusion de deux vidéos tournées dans la foulée pour les médias en ligne Brut et Konbini. Ce nouveau papier rapporte les réactions de ceux qui soutiennent la démarche de Mme Jencquel comme de ceux qui s’y opposent.

En novembre 2018, la Commission de bioéthique de la Conférence des évêques suisses saisit le Conseil suisse de la presse. Elle lui demande d’intervenir quant à la banalisation et l’incitation au suicide assisté dans la presse suisse et aux pages de publicité achetées par Exit dans la presse alémanique. Elle demande aussi au CSP de donner son avis sur le blog concerné et d’en ordonner la suppression.

Parler du suicide en tant que phénomène social

Dans ses considérants, le Conseil suisse de la presse relève que la directive 7.9 concernant le suicide invite pour l’essentiel les journalistes à la plus grande retenue, notamment en se tenant «aux indications nécessaires à la bonne compréhension du cas» et en renonçant «à des indications précises et détaillées sur les méthodes et les produits utilisés», cela «afin d’éviter les risques de suicide par imitation».

En revanche, la légitimité de parler du suicide en tant que phénomène social est reconnue. Il s’agit de débats de société en Suisse, où des questions de ce type se posent, y compris dans les urnes. On ne saurait donc considérer cet article comme une incitation au suicide. Le Conseil de la presse ne décèle pas non plus de risque d’imitation. Il considère dès lors que sa directive sur le suicide n’est pas violée.

Dignité humaine

A propos de la directive 8.1 relative au respect de la dignité humaine, le CSP reconnaît que ce terme est équivoque. L’association d’assistance au suicide Exit en appelle à ce principe pour justifier son action, alors que pour la doctrine catholique, c’est cette même dignité humaine qui interdit l’euthanasie active. Pour le CSP, dans l’exercice du métier de journaliste, cette directive vise à respecter le public, et la personne dont on parle en s’abstenant notamment de la dégrader, de s’en moquer ou de l’utiliser. Or rien dans les articles du Temps ne constitue une violation de cette directive.

Le CSP rappelle en outre qu’il s’est toujours interdit de donner des instructions aux médias quant à leur façon de traiter d’une problématique. La demande d’intervention concernant des pages de publicité, ce n’est pas davantage du ressort du CSP.  (cath.ch/com/mp)

Maurice Page

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