Le Vatican rend un non-lieu contre un prêtre accusé de harcèlement sexuel

Le tribunal du Vatican a levé, le 15 mai 2019, l’accusation de harcèlement sexuel contre un prêtre autrichien, membre de la communauté «Das Werk» (l’Oeuvre). Il avait été dénoncé par la théologienne allemande Doris Wagner, à l’époque membre de la communauté. Le Vatican avait cependant confirmé, en 2014, le viol commis sur la religieuse par un autre prêtre de «Das Werk».

Le prêtre accusé de harcèlement était à l’époque chef de bureau au sein de la Congrégation pour la doctrine de la foi. Il était accusé par une membre féminine de «Das Werk», en l’occurrence Doris Wagner, de lui avoir fait des avances sexuelles dans le cadre du sacrement de confession, explique la revue allemande Herder Korrespondenz.

Dans leur jugement publié en latin, les cinq membres du Tribunal de la signature apostolique ont indiqué n’avoir pas constaté que le religieux avait eu un comportement pénalement répréhensible au regard du droit de l’Eglise. Il n’est dès lors pas punissable. Le jugement porte la signature du préfet du Tribunal, le cardinal Dominique Mamberti, et de son secrétaire, Mgr Giuseppe Sciacca.

Avances sexuelles ou gestes amicaux?

Dans divers interviews et dans un livre, Doris Wagner avait raconté que le prêtre, alors qu’il était son confesseur en 2009, avait commis sur elle des attouchements et lui avait fait des avances sexuelles. Elle avait aussi expliqué plus tard qu’il avait tenté de l’embrasser sur la bouche. Prise de panique, elle s’était alors enfuie. Doris Wagner était aussi une des protagonistes du récent documentaire télévisé sur les religieuses abusées dans l’Eglise. 

La théologienne allemande a quitté la vie religieuse en 2010. En 2012, elle a dénoncé simultanément deux faits d’agressions sexuelles commis par deux prêtres différents. Dans un premier cas, elle a accusé le supérieur de sa communauté romaine de l’avoir violée, juste après qu’elle ait prononcé ses voeux. Le viol a été reconnu en 2014 par le Vatican qui a «admonesté» le prêtre et l’a démis de ses fonctions au sein de la Secrétairerie d’Etat. L’homme en question œuvrerait cependant toujours au sein d’une des communautés de «Das Werk». Dans le deuxième cas, elle a dénoncé son confesseur pour harcèlement sexuel. Une procédure qui a cette fois débouché sur un non-lieu.

Ce second prêtre  a livré sa version des faits au Herder Korrespondenz. Selon lui, après la confession sacramentelle, le dialogue s’est poursuivi avec Doris Wagner. Il lui aurait alors exprimé son estime de manière empathique et compatissante, ‘toujours en la vouvoyant’. «En même temps, je lui ai confirmé que le lien mutuel devait être surnaturel. En sortant, non pas dans le confessionnal, mais dans la pièce voisine, je lui ai tendu la main et donné une accolade joue contre joue, dans un geste de sympathie et de lien fraternel.»

Suite à la parution de ces accusations et afin de «limiter le dommage déjà causé à la Congrégation et à sa communauté», le prêtre avait remis sa démission au préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi le 28 janvier 2019. Réfutant l’accusation, il avait toutefois demandé à ce que «le procès canonique en cours se poursuive».

Doris Wagner doute de l’impartialité du jugement

Dois Wagner a indiqué ne pas avoir été informée de la sentence, ni par le tribunal, ni par son conseiller juridique. Elle a précisé qu’il ne s’agissait pas d’un acquittement mais d’un non-lieu, le tribunal ayant renoncé à ouvrir un procès. Elle-même n’a pas été consultée dans cette procédure. Dans un tweet, elle a en outre mis en cause l’impartialité de Mgr Giuseppe Sciacca. Selon elle, «cet homme est un ami de «Das Werk».

Vers un chapitre général en 2019

Comme le rappelle Herder Korrespondenz, suite notamment aux dénonciations de Doris Wagner sur les structures de l’œuvre, le Vatican a ordonné en 2013-2014 une visite apostolique au sein de la communauté. En octobre 2016, un décret avait signifié un certain nombres de questions à régler, en particulier sur «la protection de la liberté de conscience dans la phase de formation». De même, en tant que communauté mixte rassemblant des hommes et des femmes, «Das Werk» devait régler de manière plus appropriée les conditions de vie. En conséquence, le Vatican avait exigé la tenue d’un chapitre général qui devrait avoir dans le courant de cette année, sous la présidence du Père franciscain Johannes Freyer qui avait conduit la visite apostolique. (cath.ch/kna/hk/mp)

Maurice Page

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