Evangile de dimanche: Ecouter? Servir?

L’histoire nous est familière. A nos yeux, elle se résume à une double attitude: une femme, assise, écoute, l’autre mène le service; l’une s’active, l’autre est tranquille. Pour nous, Marthe est la figure du chrétien ordinaire et Marie, celle de la personne consacrée.

Jésus, pensons-nous, laisse entendre que Marie est supérieure à Marthe: elle, elle a fait le bon choix; Marthe s’est trompée. Et nous, de tirer les conséquences: le service vaut moins que l’écoute, la vie active moins que la vie contemplative… Bref, ce texte convoque tous ces clichés.

Pourtant, Jésus n’est pas Platon. En faisant de l’écoute «la meilleure part», il ne suggère pas que la vie pratique est inférieure à l’écoute. N’a-t-il pas dit: «le plus grand parmi vous sera votre serviteur» (Mt 23,11)?

Qu’en est-il? Marthe offre l’hospitalité à Jésus. Marie, sa sœur, se met aux pieds de Jésus pour écouter la parole de celui qu’elle reconnaît comme un maître. Jésus ne reprend ni ne condamne Marthe. C’est elle qui se plaint que Marie ne fait rien et elle le supplie d’intervenir pour qu’elle l’aide. Voilà une attitude que nous sommes à même de comprendre: nous sommes toujours plus ou moins complexés de devoir servir, nous qui assimilons indûment le service à une tâche humiliante. Et que dit Jésus? Il répond non pas sur le service mais sur l’agitation de Marthe qui contraste avec l’écoute de Marie. Or, écouter la parole de Jésus est essentiel, c’est bien «la meilleure part».

«Un service qui se dispense de l’écoute de la Parole de Dieu n’est qu’agitation».

Tout service ne se fait pas sans donner la priorité à la Parole et la Parole ne nous dédouane jamais du service. «Le Christ, espérance de la gloire» (Col 1,27), est «au milieu de nous comme celui qui sert» (Lc 22, 27). Il sert parce qu’il écoute le Père. L’écoute qui se dispense d’être dans l’attitude du serviteur est stérile, de même qu’un service qui se dispense de l’écoute de la Parole de Dieu n’est qu’agitation.

On ne peut opposer l’attitude de Marthe à celle de Marie pour définir la vie chrétienne. Ces deux femmes donnent à Jésus l’occasion de nous faire réfléchir sur l’engagement que nous avons par rapport à lui. Courons-nous à tout vent pour réaliser de bonnes œuvres, sans prendre le temps de chercher à le connaître lui qui veut être notre hôte? Comprenons-nous que Jésus nous invite à l’écouter pour que nous apprenions de lui la dépossession de soi qui, seule nous permet de l’accueillir et de le servir dans les frères?

Rappelons que ce passage se situe dans l’évangile de Luc entre l’aventure du bon Samaritain et l’enseignement du Notre Père: lorsque nous servons l’autre parce que nous reconnaissons en lui un frère, nous mettons en œuvre la volonté du Père, écoutée et aimée. Jésus n’absolutise donc pas l’attitude de Marie. Il nous donne simplement les clefs pour que nous découvrions les exigences du service commandé par l’amour comme lui-même l’a vécu, lui qui «ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu» (Ph 2,6).

Chantal Reynier | Vendredi 19 juillet 2019


Lc 10, 38-42

En ce temps-là,
Jésus entra dans un village.
Une femme nommée Marthe le reçut.
Elle avait une sœur appelée Marie
qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole.
Quant à Marthe, elle était accaparée
par les multiples occupations du service.
Elle intervint et dit :
« Seigneur, cela ne te fait rien
que ma sœur m’ait laissé faire seule le service ?
Dis-lui donc de m’aider. »
Le Seigneur lui répondit :
« Marthe, Marthe, tu te donnes du souci
et tu t’agites pour bien des choses.
Une seule est nécessaire.
Marie a choisi la meilleure part,
elle ne lui sera pas enlevée. »

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