Décès de l'abbé Henri Nicod, l'un des «pères» des émissions catholiques à la TV romande

L’abbé vaudois Henri Nicod est décédé le 25 juillet 2019 à l’EMS de la Terrassière à Genève, dans sa centième année. Réalisateur des émissions catholiques à la télévision romande de 1970 à 1984, il laisse le souvenir d’un charisme exceptionnel et d’une foi enracinée dans le monde.

«Henri Nicod a donné un visage à l’Eglise en Suisse romande», souligne André Kolly. L’ancien directeur du Centre catholique de radio-télévision (CCRT) a bien connu le prêtre réalisateur et l’a accompagné jusque dans ces derniers jours. Il met en avant l’influence qu’a eu le personnage sur l’image du catholicisme en Suisse francophone.

Henri Nicod n’était pourtant pas prédestiné au monde des médias. Il est né le 27 mai 1920 à Bottens, dans le canton de Vaud, dernier de douze enfants d’une famille d’agriculteurs catholiques. Après une scolarité secondaire dans un pensionnat d’Estavayer-le-Lac (FR), il entre au Collège Saint-Michel à Fribourg. Il doit interrompre ses études gymnasiales en 1940 pour intégrer les troupes d’infanterie mobilisées à la frontière. En 1942, il passe avec succès son baccalauréat et est admis au séminaire. Il est ordonné diacre en 1946, à la cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg. Son ordination sacerdotale se déroule le 29 juin 1947 dans l’église du Collège Saint-Michel.

Un catholique en terre protestante

En 1956, il est nommé curé d’Oron-la-Ville, un «fief» protestant dans le canton de Vaud. Il y fonde la première paroisse catholique et fait construire une église. En 1967, il est appelé à la Télévision Suisse Romande (TSR) pour un poste à plein temps. Les médias publics faisaient pour la première fois appel aux Eglises traditionnelles (protestante et catholique romaine) pour la réalisation des émissions religieuses, note André Kolly. Suite à une formation de deux ans, le prêtre obtient, conjointement avec un pasteur protestant, le titre de «réalisateur». Dans cette fonction, l’abbé Nicod fera preuve d’une grande créativité et d’un infatigable dynamisme. «La période n’était en outre pas des plus faciles, note André Kolly. Après Mai 68, il fallait composer avec de parfois farouches attitudes anti-cléricales dans certains milieux et également au sein de la télévision».


«Que les gens soient contents!»


Hautes Fréquences (extrait), 15.07.12, avec Evelyne Oberson


 

Un touche-à-tout

Il se consacre ensuite pleinement à sa vocation pastorale en tant que vicaire auxiliaire à la paroisse Notre-Dame de Genève. Fort des compétences acquises à la TSR, il y met notamment en place un studio chargé de diffuser sur les ondes de Radio Cité les éléments de la pastorale. Durant cette période, il exerce avec enthousiasme ce qu’il considère comme sa véritable mission: l’accompagnement spirituel. Il conseille en particulier des jeunes et des couples, dont certains sur une période de plus de 50 ans.


«L’amour fait grandir»


Hautes Fréquences (extrait), 15.07.12, avec Evelyne Oberson


Mettant en pratique la devise de Saint-Vincent de Paul, «il faut soigner le corps pour que l’âme s’y plaise», il s’engage également dans de nombreuses activités sportives telles que la randonnée en peaux de phoque, la moto ou encore le vélo. Il visite en outre beaucoup de pays dont il ramène de nombreux clichés photographiques.

«Il a tout fait», confirme Louis Barby, à Satigny (GE). L’ancien journaliste vaudois est entré en même temps qu’Henri Nicod à la télévision et a collaboré avec lui pendant de nombreuses années. Les deux hommes se sont liés d’une amitié profonde. Louis Barby décrit son compagnon de route comme un véritable touche-à-tout. Une caractéristique que confirme André Kolly. Au-delà de son sacerdoce et de son métier de réalisateur TV, de voyageur et de sportif, Henri Nicod avait de grandes capacités artistiques, notamment en tant que sculpteur et musicien. Plus que cela, «il avait le talent de découvrir des talents», note André Kolly. Il relève comment le prêtre du Gros-de-Vaud a su s’entourer de personnes très compétentes alors qu’il était à la télévision.

Une foi incarnée

La foi de «Riquet», comme on l’appelait affectueusement, n’était pas celle du «théologien désincarné» dans sa tour d’ivoire. Il était dans la vie, dans le monde, au milieu des gens, assure l’ancien directeur du CCRT. De cette même façon, il pratiquait un «œcuménisme de terrain», avec le monde protestant qu’il côtoyait régulièrement, renchérit Louis Barby.

L’engagement télévisuel de l’abbé Nicod reflétait pleinement ce souci de «vivre dans le monde», note André Kolly. En témoigne le reportage réalisé dans les années 1980 montrant comment des ouvriers voulant vivre l’Evangile sont mis à l’épreuve par la crise et le chômage. «Il faut se rappeler que l’Evangile pousse à rechercher la justice dans une démarche collective et sans haine», expliquait alors le prêtre-réalisateur.

André Kolly rappelle à quel point, de par son travail à la TSR, mais également par son charisme, son ouverture et son intégration dans des milieux très divers, Henri Nicod a donné à l’Eglise une véritable visibilité dans la société romande.

Il «évangélisait» de façon toute naturelle, en allant simplement vers les gens et en exerçant sa bonté, confirme Louis Barby. «Tout le monde l’aimait et il aimait tout le monde, assure son ancien collaborateur. Pour une fois, c’est un mort sur lequel il est impossible de dire du mal.» (cath.ch/rz)

 


«Tout d’un coup, vous êtes tranquille avec Dieu»


Hautes Fréquences (extrait), 15.07.12, avec Evelyne Oberson


Raphaël Zbinden

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