Liban: lutte pour préserver la langue syriaque dans la messe

Au Liban, l’association Tur Levnon (Mont-Liban) milite pour la préservation du syriaque, un parler sémitique du Proche-Orient appartenant au groupe des langues araméennes. Elle veut  réintégrer cette langue, menacée de disparition, notamment dans la messe maronite.

La messe maronite a été «arabisée» parce que plus personne n’enseignait le syriaque et donc plus personne ne le comprenait, explique Amine Jules Iskandar, président de l’association Tur Levnon.

La langue syriaque a été enseignée au Liban depuis les débuts du christianisme jusqu’en 1943, date de l’indépendance du Liban. «Si l’enseignement de cette langue a pu se poursuivre, ici et là, jusqu’aux années soixante, c’est uniquement parce que les professeurs qui la maîtrisaient exerçaient toujours. Lorsqu’ils sont partis à la retraite, l’enseignement du syriaque s’est arrêté», déplore M. Iskandar dans les colonnes du quotidien libanais francophone «L’Orient-Le Jour».

Réintégrer le syriaque dans la messe maronite

L’association, fondée en 2017 avec le Père Jean-Maroun Hélou et d’autres membres, dont certains en Suède et aux Etats-Unis, milite pour réintégrer la langue syriaque dans la messe maronite et dans l’enseignement des établissements scolaires catholiques.

Revenant sur l'»arabisation» de la messe, Amine Jules Iskandar précise que la transition du syriaque à l’arabe fut compliquée puisque toutes les prières récitées lors de la messe, depuis 1’300 ans et même plus, se faisaient en syriaque. «L’arabe ne disposait pas de la terminologie nécessaire ni de l’esprit des prières. Il a fallu préserver des mots syriaques en les arabisant, surtout pour les termes en syriaque qui n’avaient pas d’équivalent en arabe».

Le syriaque encore présent dans le dialecte libanais

Pour lui, revenir au syriaque serait beaucoup plus facile que le passage du syriaque à l’arabe. «La langue syriaque, née d’une rencontre entre le grec et l’araméen dans une région cananéenne très hellénisée, est très facile à apprendre et à pratiquer… Ce passage serait d’autant plus simple que nous utilisons le syriaque aujourd’hui dans notre dialecte libanais». Et d’affirmer que le libanais est plus un dialecte du syriaque qu’un dialecte de l’arabe.

Si son association ne prétend à aucun moment vouloir remplacer l’arabe par le syriaque, elle milite uniquement pour que le syriaque soit réintégré et enseigné, tels que le sont le français et l’anglais, ou encore utilisé lors des cours de catéchisme.

En Irak, le syriaque oriental est toujours utilisé

Alors qu’au Liban les derniers villages ont probablement continué à utiliser le syriaque  jusqu’au XIXe siècle avant d’utiliser le dialecte libanais, en Irak, le syriaque oriental (parlé à l’Est de l’Euphrate) est encore pratiqué au quotidien. Cette variante de l’araméen utilisée par les chrétiens syriens vivant dans le nord de l’Irak est enseigné dans certaines écoles de la région. (cath.ch/orj/be)

Jacques Berset

Portail catholique suisse

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