Homélie du 22 septembre 2019 (Lc 16, 1-13)

Abbé Joseph Demierre Eglise de Montagny-les-Monts, FR

Chers paroissiens d’ici, Chers auditeurs de la radio,

Nous disions, dans l’introduction de cette messe, qu’ici, dans le canton de Fribourg, nous sommes au temps de la Bénichon et du Recrotzon. Dans d’autres régions de Suisse Romande, c’est le temps des vendanges.

Nous célébrons donc la fête des récoltes, et en même temps, nous nous mettons à l’écoute de la Parole de Dieu.
D’abord la fête des récoltes : nous voulons rendre grâce à Dieu pour tout ce que nous recevons de la terre et du travail des hommes, pour nourrir l’humanité, pour le pain de chaque jour et pour les réserves qu’on a pu se constituer pour l’hiver, qui est souvent rude sous nos latitudes.

La vie : don de Dieu

Bénichon veut dire bénédiction, action de grâce. Nos ancêtres ont voulu marquer cela par une fête et des réjouissances spéciales. De nos jours, les paysans sont beaucoup moins nombreux et l’agriculture s’est mécanisée à outrance. Et on risque d’oublier cette dimension.

La Bénichon, la fête des récoltes veut nous rappeler que la vie est un don de Dieu, et que nous recevons de Dieu, à travers la nature et ce qu’elle produit, les biens dont nous avons besoin pour vivre.

« Oui, je bénirai, je bénirai ses récoltes, pour rassasier de pain ses pauvres. Je vêtirai de gloire ses prêtres, et ses fidèles crieront, crieront de joie », dit un psaume.

Ou comme dit saint Paul : « Par des chants, des psaumes, des hymnes, des danses et de libres louanges, chantez à Dieu dans vos cœurs votre reconnaissance. Et tout ce que vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus, en offrant par lui votre action de grâce à Dieu le Père. » (Colossiens 3, 16-17)

C’est aussi ce que nous avons lu dans la deuxième lecture de ce jour : « Je vous encourage, avant tout, à faire des demandes, des prières, des intercessions et des actions de grâce pour tous les hommes, afin que nous puissions mener notre vie dans la tranquillité et le calme, en toute piété et dignité. »

C’est aussi ce que les Églises chrétiennes ont voulu mettre en évidence, en instaurant entre le 1er septembre et le 4 octobre, « un temps pour la création ».

Et c’est dans l’Eucharistie que nous célébrons cela : Jésus lui-même a choisi du pain et du vin, fruit de la terre et du travail des hommes, comme symbole de sa vie donnée. Voilà pour la Bénichon.

Quant à la Parole de Dieu, que nous dit-elle ?
Avec la parabole de l’intendant habile, Jésus veut nous dire quelque chose de très important : Il nous dit d’une part tout ce que nous recevons. Et il veut nous faire comprendre d’autre part que nous n’en sommes pas les propriétaires. Nous sommes des intendants, des gérants, des administrateurs des biens qui nous sont confiés. Dès la Genèse, Dieu confie aux êtres humains le soin de travailler et de cultiver la terre. Même à la sueur de son front.

Le monde appartient à Dieu

Ça veut dire que la terre appartient à tous, et pas seulement à quelques-uns. L’Évangile n’est pas contre la propriété privée, mais il dénonce l’accaparement des terres, au détriment souvent des personnes qui y habitent ou y travaillent, comme cela se passe par exemple en Amazonie.

Autrement dit, l’Évangile nous invite à travailler à une bonne répartition des biens de la terre et que tous puissent manger à leur faim. L’Évangile dénonce les lois du marché et les inégalités qui font que les riches sont toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres. « Faites-vous des amis avec l’argent malhonnête », dit Jésus. Et encore : « vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’argent ! »

Ça veut dire que la vie, le monde, la terre, les biens matériels ne nous appartiennent pas en propre. Nous n’avons pas le droit de les exploiter et de les accaparer pour notre seul profit, comme nous le constatons hélas trop souvent dans le monde d’aujourd’hui. Ils nous sont confiés, pour en faire bon usage, de manière responsable, et au service des personnes. Et comme le gérant astucieux qui s’arrange pour se sortir d’une situation délicate, Jésus invite ses disciples à faire preuve d’habilité et d’astuces, de créativité et d’imagination, de compétences et d’ingéniosité pour une bonne gestion des biens de la terre.

Comme on apprécie les diverses spécialités de Bénichon, nous recevons la vie, la terre et les biens de ce monde comme des cadeaux précieux, qui nous sont confiés, pour que nous en prenions soin et en fassions bon usage, de manière responsable et créative.

Comme disait le Commandant Cousteau à la fin de sa vie : « La terre, des mondes inconnus à conquérir… Aujourd’hui, je découvre qu’ils sont à protéger. »

Dans cette Eucharistie, nous rendons grâce à Dieu pour la vie et tout ce que nous recevons de la terre et du travail des hommes, et nous lui demandons qu’il nous aide à être de bons collaborateurs, de bons administrateurs des biens qu’il nous confie.

Comme l’écrit encore saint Paul : « Ce que chacun de vous a reçu comme don de la grâce, mettez-le au service des autres, comme de bons gérants de la grâce de Dieu sous toutes ses formes. Ainsi, en toute chose, Dieu recevra sa gloire par Jésus-Christ. »    Amen.

25e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
Lectures bibliques : Amos 8, 4-7; Psaume112, 1-2, 5-6, 7-8 ; 1 Timothée 2, 1-8 ; Luc 16, 1-13

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