Les défis de la fin de vie

Nous sommes confrontés aujourd’hui à des proches ou à des connaissances qui choisissent la voie d’Exit pour quitter leur vie. Ce choix est une source de tristesse. Le magistère a beau répéter à temps et contretemps sa condamnation de l’euthanasie et du suicide assisté, ce dernier ne cesse de se développer dans notre pays. Quelles sont les raisons d’un tel phénomène?

Tout d’abord, il y a le fait que nos contemporains se méfient a priori des principes généraux. Ils estiment que ceux-ci sont de la théorie et sont indifférents aux circonstances particulières des personnes. Mais cette hostilité aux règles générales méconnait le fait fondamental qu’on ne peut vivre en société sans principe. Si la loi contraint, elle protège également, en particulier les plus faibles. Ce n’est pas pour rien que de nombreuses associations demandent par exemple un renforcement des textes sur les violences faites aux femmes ou une application plus juste des textes préservant la dignité des personnes. Au-delà des différences culturelles, il existe un vrai défi aujourd’hui: celui de penser et de mettre en œuvre une morale universelle, tâche à laquelle notre pape ne cesse de s’atteler avec beaucoup d’énergie.

Mais revenons aux défis de la fin de vie. Nous craignons principalement deux choses: les douleurs physiques que peut apporter la maladie et la perte de contrôle liée à une éventuelle diminution des facultés mentales. En ce qui concerne la crainte des douleurs, il existe une profonde méconnaissance des moyens que possède aujourd’hui la médecine pour pallier la souffrance. J’ai pu moi-même les expérimenter récemment. Les soins donnés actuellement dans les hôpitaux n’ont rien à voir en  termes de douleur avec ceux qui existaient il y a une vingtaine d’années. Il est vrai que notre Eglise a trop fait l’éloge de la souffrance avant le Concile Vatican II. Quand j’étais enfant, il fallait souffrir pour être un bon chrétien. Aujourd’hui, notre Eglise a compris que le Christ était venu pour nous libérer de nos maux. Elle annonce un Evangile de salut et de miséricorde. Dans ce cadre, elle soutient ceux et celles qui luttent contre la douleur et encourage fortement les soins palliatifs même si elle n’est pas encore assez «l’hôpital de campagne» que souhaite le pape François.

«La vie n’est pas une chose. Elle est un don que l’on reçoit»

Nos concitoyens ont très peur des incapacités physiques ou mentales liées à la vieillesse. Certains aimeraient contrôler leur vie jusqu’au bout ou dans le cas contraire y mettre fin. Le fond du problème ici est une question de possession. Nous sommes tellement habitués à posséder et à contrôler les objets que nous imaginons la même chose pour la vie. Nous avons tendance à considérer que celle-ci nous appartient. Or la vie relève d’une autre catégorie que les marchandises, et cette conception est partagée bien au-delà des frontières de l’Eglise. C’est au nom du caractère spécifique de la vie, que des militants ont lutté et luttent encore contre la peine de mort. C’est en son nom que le personnel médical se bat tous les jours pour sauver des malades. C’est en son nom et en raison de la dignité de la personne, que l’on accorde une attention particulière aux personnes handicapées qui sont nos frères et nos sœurs en humanité.

Penser que la vie nous appartient revient à nier ces vérités. La vie n’est pas une chose. Elle est un don que l’on reçoit. La supprimer sous quelque forme que ce soit, c’est refuser de la redonner. Elle est comme la nature. Nous en sommes les gérants et non les propriétaires. La crise écologique actuelle devrait nous aider à comprendre que cette vision absolue du contrôle sur notre vie et sur la nature conduit à une impasse. La vie nous dépasse infiniment. Toute personne qui a traversé une grave épreuve l’a compris. Et c’est pour cela que son témoignage est toujours bouleversant.

Jean-Jacques Friboulet

6 novembre 2019

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