Face à Constantinople, l’Eglise orthodoxe d’Ukraine se maintient

L’Eglise orthodoxe d’Ukraine, dont le primat est le métropolite de Kiev Onuphre, a fondé 246 nouvelles paroisses en 2019. Cette Eglise canonique dépendante du Patriarcat de Moscou, malgré la fondation d’une Eglise concurrente dépendant du Patriarcat œcuménique de Constantinople, ne s’est pas effondrée.

Les orthodoxes ukrainiens n’ont donc pas adhéré en masse à la nouvelle Eglise ukrainienne autocéphale non canonique fondé il y a tout juste un an et qui n’a rallié que quelques centaines de paroisses. L’Eglise orthodoxe d’Ukraine (EOU-PM) n’a pas reculé et a même augmenté le nombre de ses paroisses.

Elle dispose de 53 diocèses et de 12’338 paroisses. Par contre, le nombre de monastères a diminué de quatre unités durant cette période, passant de 258 à 254.

Les orthodoxes ukrainiens n’ont donc pas adhéré en masse à la nouvelle Eglise ukrainienne ralliée au patriarcat de Constantinople, qui n’a rallié que quelques centaines de paroisses. 

Malgré les pressions

Ces données ont été publiées dans le rapport du chancelier de l’Eglise orthodoxe d’Ukraine (EOU-PM), le métropolite Alexandre de Borispol et de Brovary.  Il les a présentées lors de la session du Saint-Synode de l’EOU-PM le 6 décembre 2019. Cette Eglise compte encore 99 hiérarques (53 diocésains, 39 vicaires et 7 en retraite), 12’411 prêtres et diacres, 4’609 moines et moniales. Les établissements d’enseignement théologique sont au nombre 17, avec 1’372 étudiants dans les instituts supérieurs.

Malgré les pressions exercées par l’Etat ukrainien – qui, du temps de l’ex-président Petro Porochenko a voulu établir une «Eglise nationale ukrainienne» – et les supporters de la nouvelle Eglise, cette dernière peine à s’établir. Un an après le «Concile d’unification» de l’Eglise orthodoxe ukrainienne du 15 décembre 2018 – une opération visant à séparer l’orthodoxie ukrainienne de ses liens avec le Patriarcat de Moscou – la nouvelle Eglise autocéphale d’Ukraine (EOAU-PC) dépendant du Patriarcat de Constantinople n’a réussi à rallier qu’une infime minorité de paroisses.

Une centaine de lieux de culte de l’Eglise canonique saisis

La progression de l’Eglise canonique est d’autant plus remarquable que depuis sa création en décembre 2018, l’EOAU-PC a saisi une centaine de lieux de culte de l’Eglise canonique, réenregistré illégalement 220 paroisses, tandis que 78 ont volontairement changé de camp, selon des chiffres communiqués par l’EOU-PM.

Présidant une réunion du Haut Conseil de l’Eglise orthodoxe russe le 11 décembre 2019, le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie a reconnu que «cette année a été difficile. Elle a été remplie d’épreuves pour notre Eglise, mais aussi de grâces divines. D’un côté, nous avons été témoins des conséquences de la violation des normes canoniques, de l’autre nous avons pu constater l’unité des hiérarques, du clergé, des laïcs qui, dans notre Eglise et dans le monde gardent la foi et la pureté canonique de l’orthodoxie».

Remous à l’intérieur des Eglises d’Alexandrie et de Grèce

«Nous voyons que dans le monde ecclésiastique grec, à l’intérieur des Eglises d’Alexandrie et de Grèce, des hiérarques, des clercs et des laïcs n’approuvant pas la profanation des canons, entrent en opposition. Pour eux, comme pour nous, l’unité de l’Eglise est une valeur absolue. Ils trouvent inadmissible de trahir cette unité au profit des grands de ce monde. Ils compatissent au sort de l’Eglise orthodoxe ukrainienne, victime des démarches du Patriarcat de Constantinople».

Du mieux avec l’arrivée au pouvoir du président Zelinski

Le patriarche de Moscou affirme cependant que la pression sur les fidèles de l’Eglise canonique s’est affaiblie. «La déclaration de non-ingérence dans les affaires de l’Eglise, prononcée par le président Volodymyr Zelinski [président d’Ukraine depuis le 20 mai 2019, ndlr], témoigne de ce que l’Etat occupe aujourd’hui une juste position: ne pas interférer dans les contradictions ecclésiastiques, et ne pas exercer de pressions, notamment sur notre Eglise canonique».

Schisme à l’intérieur du schisme

Il relève également que «de profondes contradictions sont apparues entre les membres du schisme», en faisant allusion notamment à la dernière volte-face du «patriarche Philarète», qui a fait cette fois dissidence de l’Eglise orthodoxe autocéphale (EOAU-PC) instituée en janvier 2019 en Ukraine par le Patriarcat de Constantinople.

Rencontrant le représentant du patriarche de Moscou à Damas, le patriarche Jean X, primat de l’Eglise orthodoxe d’Antioche, a réitéré la position du Patriarcat d’Antioche à l’égard de l’autocéphalie ukrainienne, déplorant «les agissements non-canoniques du Patriarcat de Constantinople».

La reconnaissance «des schismatiques ukrainiens de la soi-disant Eglise orthodoxe d’Ukraine» par les Eglises de Grèce et d’Alexandrie, est «inacceptable» et «regrettable» pour le patriarche Jean X, dont les propos sont rapportés par le site orthodoxie.com. (cath.ch/orthodoxie.com/interfax/mospat/be)

Jacques Berset

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