Questions de virus

La montée de l’épidémie du Covid-19 (ou coronavirus) est très révélatrice de la situation globale du monde. L’interdépendance des humains sur la planète entière devient patente, de même que les enjeux éthiques liés à la solidarité.

Nous ne pouvons pas nous cantonner dans une seule région du monde ou dans une seule culture. Toutes les images que nous nous faisons des autres, de l’étranger comme tel (le Chinois ou l’Italien), sont indissociables de notre commune appartenance à un seul monde et à une même humanité. A l’idée stratégique de fermer les frontières, il est répondu, déjà, que le virus ne connaît pas de frontière; mais cette certitude biologique et scientifique est renforcée par la conviction éthique et humaniste selon laquelle la transmission du virus demeure une circulation «interhumaine», où tous les sujets sont considérés comme strictement égaux en dignité.

Devant l’épidémie, les gouvernements nationaux, en lien avec l’Organisation mondiale de la santé, viennent de prendre des décisions de bon sens et de précaution. Des limites ont été posées afin de circonscrire l’étendue, la vitesse et la pénétration de la maladie et de la mortalité. On ne sait encore nullement si ces mesures s’avéreront adéquates et suffisantes, à moins qu’elles se révèlent excessives.

«Devant une alerte mondiale aussi vaste et aussi proche de nous, nous sommes donc mis à l’épreuve.»

Les Eglises ont suivi les Etats, en adoptant des recommandations pratiques homogènes par rapport au principe de précaution. C’est ainsi que la messe prévue (pour la première fois depuis la Réforme) dans la cathédrale Saint-Pierre à Genève a été remise au 30 mai, un peu comme les matches de football et de hockey sur glace, qui ont été différés. Les Eglises doivent-elles organiser ou consacrer des cultes et des prières pour éloigner le virus? Il me semble qu’elles devraient surtout orienter leur énergie vers un renforcement de la solidarité interhumaine.

L’épidémie s’approche de nous par cercles concentriques, de plus en plus menaçants, mais nous ne savons pas vraiment ce qui va nous arriver. Nous vivons dans une grande incertitude. Mais nous voyons bien que nous ne devons pas céder à la panique. Posément, nous devons affronter le danger, lutter contre lui, prendre les décisions les plus judicieuses, soutenir les responsables politiques et sanitaires, avec un maximum de discernement et de lucidité.

Devant une alerte mondiale aussi vaste et aussi proche de nous, nous sommes donc mis à l’épreuve. Que valons-nous comme communauté humaine et politique? Que sommes-nous capables de produire en termes d’énergie spirituelle et de courage? Quel prix attachons-nous à l’existence humaine, à la santé publique et à la solidarité internationale? Comment nous positionnons-nous devant la maladie, la mort et les épidémies? Ne vivons-nous que pour les valeurs matérielles, le succès de nos manifestations, la gloire éphémère de nos activités (matches de football ou de hockey, salon de la montre ou de l’auto, etc.) ? Quel est, en définitive, le sens que nous accordons à la vie humaine, à son accomplissement spirituel, à sa finalité transcendante?

Denis Müller

4 mars 2020

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