Les Sources: une UP jurassienne aux confluents

L’unité pastorale (UP) des Sources, dans le district jurassien de Porrentruy, est en pleine évolution. Le défi de cette communauté géographiquement excentrée mais ouverte est de fertiliser de nouvelles terres pastorales tout en gardant ses eaux vives.

Le 8 février 2020, le Centre paroissial Les Sources, à Porrentruy, s’est paré de rouge, la couleur de l’amour. Des bénévoles de l’UP et du Mouvement Vivre & Aimer avaient convié des couples pour une «Saint-Valentin autrement». Un bon repas préparé par les bénévoles et des thèmes de discussion proposés, pour permettre à ces couples «de donner un nouvel élan à leur histoire», explique Christophe Wermeille, responsable de la communication pour l’UP, qui regroupe les paroisses de Porrentruy, Fontenais-Villars et Bressaucourt. Une démarche qui s’inscrit dans le contexte actuel de fragilité du partenariat amoureux et de l’engagement.

Rejoindre les personnes dans leur vie quotidienne

Une des façons aussi, pour la pastorale des Sources, de rejoindre les personnes dans leur vie et leurs problèmes quotidiens. Le mouvement est, depuis quelques années, une lame de fond dans l’unité pastorale. «Les changements sociaux, dans cette partie du Jura, sont les mêmes qu’ailleurs, assure Christophe Wermeille. Des besoins nouveaux, des attentes nouvelles émergent. Nous nous efforçons de proposer une pastorale en adéquation avec ce paysage en constante évolution».

L’événement «La St-Valentin autrement» a rassemblé des couples de la région | © UP Les Sources

Dans cette optique, des «pôles pastoraux» ont été mis en place. Ils permettent de proposer des activités «transversales», ouvertes à toute la région. Une attention particulière est aussi portée à la proximité. L’enjeu est de continuer à assurer au mieux les services pastoraux de base, les sacrements, la catéchèse ordinaire, la présence…

Les activités «transversales» donnent l’occasion de vivre de manière différente les principales étapes de la vie chrétienne. Une vision mise en œuvre notamment avec le sacrement du pardon. «Nous avons ouvert le parcours aux 7 à 107 ans, indique Christophe Wermeille. Il s’agit de ne plus dire: maintenant tu as onze ans, tu dois vivre ton premier pardon! Non, si une fille ou un garçon de 7 ans a une vie intense de foi en famille, pourquoi elle (il) ne pourrait pas déjà franchir cette étape? Et quand on est adulte, suivant son vécu, l’on peut également avoir envie de refaire la démarche dans un esprit différent.» Ces prochaines années, les autres sacrements seront proposés avec cette même approche.

L’église de Bressaucourt est l’un des lieux de culte de l’UP Les Sources | © UP Les Sources

En 2020, Les Sources proposent pour la troisième fois ce type de parcours transgénérationnel, en collaboration avec les unités voisines. Il invite notamment à vivre le pardon sous des formes différentes, communautaire – dans une cérémonie pénitentielle -, ou individuelle, sans modèle unique.

Entre évolution et tradition

Pour la pastorale des Sources, il s’agit tout d’abord de conjuguer les demandes d’une population rurale, en attente des services ordinaires de l’Eglise, avec une population plus sécularisée, à la recherche de formes nouvelles de spiritualité ou de rites. Une gageure qui a demandé aux agents pastoraux d’imaginer d’autres manières d’accompagner les personnes.

Christophe Wermeille, responsable de la communication pour l’UP Les Sources | © UP Les Sources

En parallèle des mariages traditionnels, des bénédictions de couples ou des temps de prière sont proposés pour des personnes qui ne sont parfois pas prêtes à des engagements définitifs. Une «célébration d’accueil de l’enfant» est aussi offerte aux familles qui ne sont pas (encore) prêtes à demander le baptême pour leur enfant.

«Entre le ‘tout’ et le ‘rien’, nous cherchons à proposer une démarche de foi en cohérence avec le cheminement des gens. Bien sûr parfois, on est un peu sur la corde raide concernant ces demandes, admet Christophe Wermeille. Mais le principe est d’essayer d’être présent dans la vie de ces personnes. L’Eglise ne peut pas se contenter de regarder le train qui passe».

Malgré la sécularisation en cours, la région, et particulièrement la ville de Porrentruy, peut compter sur une forte implantation historique du catholicisme. La cité ajoulote a en particulier abrité les princes-évêques de Bâle pendant des siècles. L’Eglise a donc encore une place particulière, note l’agent pastoral. Cela se traduit notamment par une participation toujours d’actualité de l’institution religieuse à certains rites civils, ainsi que par la facilité de nouer des partenariats au-delà du cercle catholique. Les médias régionaux considèrent aussi l’Eglise comme un élément important de la vie locale. Le journal L’Ajoie propose notamment une rubrique ‘Eglises’ sur son site internet avec des contributions régulières d’agents pastoraux. Le Quotidien Jurassien relaie aussi régulièrement les activités ecclésiales.

Les Festival des familles, le 15 août 2019, à la chapelle de Lorette, à Porrentruy | © UP Les Sources

La joie, ressource de l’Ajoie

L’UP des Sources est géographiquement orientée vers la France. «Porrentruy est la ville suisse la plus proche de Paris», fait remarquer Christophe Wermeille. La région accueille ainsi de nombreux frontaliers. «Ce qui lui donne une ouverture particulière».

Comme le reste du Jura pastoral, elle appartient à la fois au diocèse de Bâle, où domine la mentalité germanique, et à la Suisse romande. Une double influence culturelle, donc, dont résulte une vision des choses quelque peu «hybride», notamment dans la conception du rôle des laïcs ou du diaconat dans l’Eglise.

L’église de Fontenais est l’un des lieux de culte de l’UP Les Sources | © UP Les Sources

Une UP des Sources qui doit ainsi naviguer dans ces différents courants. Pour le bateau pastoral, un vent favorable vient peut-être de l’inclination naturelle des Jurassiens au rassemblement festif et à la convivialité. «Le fait d’être au pays de la Saint-Martin, cela marque aussi la pastorale, assure Christophe Wermeille. Les Ajoulots ont une identité forte. Ils savent qui ils sont et d’où ils viennent, mais en même temps, ils savent accueillir et partager». Des valeurs «sources» de la vie chrétienne, qui peuvent certainement encore jaillir longtemps dans le paysage jurassien. (cath.ch/rz)

La conquête de l'»Espace pastoral»
Les petits ruisseaux pastoraux des Sources sont destinés à devenir de grandes rivières. Un mouvement en fait déjà pleinement en marche. Les activités se déploient en effet depuis longtemps en synergie avec les unités pastorales voisines. L’an prochain, l'»Espace pastoral Ajoie-Clos du Doubs» devrait être érigé par l’évêque, Mgr Felix Gmür. Un nouveau pas vers une collaboration pastorale encore plus soutenue.

Une évolution complètement «logique», confirme Christophe Wermeille, qui va s’appliquer à l’ensemble du Jura pastoral. «Notre évêque a souhaité que nous ayons une cohérence. Les paroisses actuelles sont aujourd’hui presque ‘anecdotiques’. A part les instances officielles, qui peinent à recruter, tout se passe à l’échelle de l’unité pastorale et, pour plusieurs domaines déjà, à l’échelle régionale».

Dans ce processus, les 31 paroisses d’Ajoie et du Clos du Doubs devraient former, à l’été 2021, six paroisses nouvelles: deux pour St-Gilles – Clos du Doubs (qui étaient jusqu’il y a peu deux unités pastorales distinctes) et une pour chacune des quatre autres UP: Les Sources, Eau Vive, Haute Ajoie, et Vendeline – Alle – Baroche (VAB). Si l’UP des Sources comptabilise 5’400 catholiques, l’Espace pastoral Ajoie-Clos du Doubs en regroupe 17’000.

Des assemblées ont lieu en ce moment pour choisir le nom de la paroisse nouvelle qui remplacera chaque unité pastorale, ainsi que son église paroissiale et son saint patron.

Mot clé: mise en commun
L’Eglise dans la région est arrivée au terme d’un processus de cinq ans visant à préparer cette évolution. Le principal défi est d’organiser une pastorale avec des forces en diminution et en vieillissement.
Un mouvement d’élargissement global qui ne signifie toutefois pas «centralisation», souligne Christophe Wermeille. Au contraire, l’objectif est de redonner vie aux lieux de foi plus petits, parfois délaissés. Les diverses activités et événements sont ainsi répartis selon une logique égalitaire en Ajoie-Clos du Doubs. Le leitmotiv est ainsi la «mise en commun». Qui a déjà pris corps notamment au niveau de la communication, de la jeunesse ou encore des familles. L’Ajoie-Clos du Doubs a ainsi ouvert un site internet hébergé par la plateforme du Jura pastoral.

Pour le format papier, le Bulletin du Jura pastoral est désormais publié en trois éditions, suivant les trois régions: Ajoie-Clos du Doubs, Vallée de Delémont, Jura Bernois-Franches-Montagnes. Avec une partie commune pour le Jura pastoral. RZ

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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