L’antidote à la peur: la confiance

Chacun se souvient de cette phrase prophétique de saint Jean Paul II: «N’ayez pas peur». Elle est vraiment d’actualité, au moment où nous vivons une pandémie d’un niveau inégalé pour nos contemporains. Le meilleur moyen de surmonter la peur est de faire confiance, confiance dans les autres, dans nos compétences et dans la vie.

Confiance dans les autres tout d’abord. Cette phrase peut paraître paradoxale quand nous sommes contraints, pour les plus fragiles d’entre nous, à rester à la maison. Mais cette confiance signifie d’abord aujourd’hui confiance dans nos autorités et nos institutions. Nous redécouvrons que nous ne sommes pas seulement des paquets d’atomes mais des individus sociaux dont la vie dépend de solidarités concrètes. J’ai envie de dire ‘Alleluia’ pour cette redécouverte. A l’occasion de ce confinement, j’ai reçu des appels familiaux, de voisins et d’amis me demandant si j’avais besoin de quelque chose et je rends grâce à Dieu pour ces échanges.

Confiance dans nos compétences, ensuite. Certes, certaines compétences usuelles sont mises en sommeil: celle de se déplacer, de concevoir de grands projets, de consommer ou d’user de beaucoup de ressources. Par contre, d’autres doivent être mises en avant. Celle de vivre dans la sobriété par exemple, ou celle de penser à nous et à nos proches. Notre capacité de discernement aussi, face au flot d’informations qui peut nous submerger. Celle de se ressourcer et de prier enfin, non pas physiquement au milieu de nos frères, puisque cela est prohibé, mais seul dans sa chambre ou en famille. Après Pâques, nous aurons l’immense joie de retrouver nos amis et de fêter la Résurrection.

«Il est essentiel de s’abandonner à ce qui nous échappe, à ce qui est plus grand que nous»

Confiance dans la vie, enfin. Celle-ci suppose que l’on croie en la puissance créatrice de l’action humaine, en particulier de nos chercheurs et du personnel soignant. Elle suppose aussi que nous acceptions l’incertitude liée à l’avenir. John Maynard Keynes l’avait compris dans les années 1930, et c’est ce qui avait engendré sa méfiance vis-à-vis de la finance, que je n’ai jamais oubliée.

Mais faire confiance en la vie c’est surtout penser qu’elle est plutôt une bonne chose, qu’il existe au fond des êtres et de la nature une petite lueur qui ne s’éteint pas et qui est un mystère. Nous chrétiens, appelons cette lumière le bon Dieu, mais d’autres l’appellent autrement. L’essentiel est de comprendre que nous ne pouvons baser notre confiance en la vie sur la seule maîtrise des choses; il est essentiel de s’abandonner à ce qui nous échappe, à ce qui est plus grand que nous.

Pour moi qui suis scientifique et économiste, conjuguer mystère et raison est un défi. Toute ma formation et ma carrière professionnelle m’ont appris à faire confiance à la seule raison. Pourtant, cet abandon est plus nécessaire que jamais.

Je termine par une citation d’Etty Hillesum, jeune juive hollandaise enfermée dans un camp par les nazis et qui est une des grandes mystiques du 20e siècle. Elle écrit dans une vie bouleversée «J’ai en moi une immense confiance. Non pas la certitude de voir la vie extérieure tourner bien pour moi, mais celle de continuer à accepter la vie et à la trouver bonne, même dans les pires moments».

Chers lectrices et lecteurs, je vous souhaite une belle fin de Carême et de bonnes Fêtes de Pâques.

Jean-Jacques Friboulet

25 mars 2020

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