Frère Roger, un protestant aimé des papes

Anne-Quitterie Jozeau/I.Media

Fils d’un pasteur de l’Eglise protestante du canton de Vaud, Frère Roger est né le 12 mai 1915 à Provence, dans la campagne vaudoise, il y a tout juste 105 ans. Le fondateur de la Communauté œcuménique de Taizé a su, par son humilité et sa douceur, créer une atmosphère de paix autour de la communauté qu’il a établie dans ce petit village de Bourgogne en pleine Seconde Guerre mondiale.

Pour frère Roger, rechercher une réconciliation entre chrétiens n’était pas un thème de réflexion, c’était une évidence. Pour lui, ce qui importait avant tout, c’était vivre l’Evangile et le communiquer aux autres. Et l’Evangile, on ne peut le vivre qu’ensemble. Etre séparés n’a aucun sens, écrit Frère Aloïs, prieur de la Communauté de Taizé depuis 2005.

Un lien solide entre Frère Aloïs et le pape François

Rapidement, une relation particulière est née entre le fondateur de Taizé et les différents papes qui se sont succédé. Un lien solide qui perdure encore entre Frère Aloïs et le pape François. «C’est dans la compréhension et l’écoute qu’est l’amour», estimait Frère Roger. Ce leitmotiv du religieux a porté de nombreux fruits.

Accueillant des milliers de jeunes de toutes les confessions chrétiennes chaque année dans le village de Taizé, la communauté de frères organise chaque soir d’impressionnantes veillées de prière ponctuées de chants particulièrement reconnus pour leur beauté.

Protestants, catholiques, orthodoxes

Les jeunes participant à ces sessions sont aujourd’hui accueillis par une vingtaine de frères dont certains ont suivi Frère Roger depuis sa fondation de la communauté œcuménique composée de protestants, catholiques, mais aussi d’orthodoxes.

Les premières pierres de cet audacieux projet ont été posées en 1940, en pleine Seconde Guerre mondiale. Frère Roger Schutz quitte alors sa Suisse natale pour se rendre en France, à la recherche d’un lieu pour créer sa communauté, afin de prier et accueillir. Le petit village situé à la frontière entre la France libre et occupée possède un emplacement stratégique.

Jeunes appelés au célibat, à la prière et à l’apostolat

De là, avec sa sœur Geneviève, Frère Roger accueille des réfugiés, des fugitifs juifs, des prisonniers de guerre et des enfants. Rejoint par trois frères dès 1944, puis 7 autres en 1949, Frère Roger attire de nombreux jeunes hommes qui se sentent appelés au célibat, à la prière et à l’apostolat.

Interrogé par KTO le 4 septembre 2015 à l’occasion d’un triple anniversaire, celui des 100 ans de la naissance du fondateur, des 10 ans de sa mort et des 75 ans de la communauté, Frère Richard, membre de Taizé, livre ce qui était alors comme une évidence pour Frère Roger: «Nous ne pouvons pas nous réaliser nous-mêmes sans les autres». C’est la raison pour laquelle tant de personnes sont conviées chaque année pour se ressourcer spirituellement.

«On passe à Taizé comme on passe près d’une source»

Dès 1962, Karol Wojtyla, le futur pape Jean Paul II, alors évêque auxiliaire de Cracovie, rencontre Frère Roger lors du Concile Vatican II (1962-1965). Appréciant la fondation de cette communauté, le prélat polonais s’y est rendu par deux fois en 1964 et 1968. Devenu pape, Jean Paul II visite une fois de plus la communauté en 1986. Puis, chaque année, le pontife polonais reçoit Frère Roger en audience privée.

Un lien solide entre Frère Aloïs et le pape François | © Vatican Media


Durant ces rendez-vous, le père prieur de la communauté œcuménique évoque souvent les douloureux évènements vécus par le 264e pape. L’objectif est alors de chercher «une parole pour réjouir, et même consoler son cœur en lui parlant de l’espérance que nous découvrions chez les jeunes, en l’assurant de la confiance que notre communauté lui portait», confiera Frère Roger.

Lors de la visite du pape polonais à Taizé, il affirme aux jeunes présents: «On passe à Taizé comme on passe près d’une source». Cette «eau vive promise par le Christ» qui est donnée par les frères dans la prière et le silence, permet ensuite de continuer sa route pour «témoigner de son amour et servir vos frères».

Un lien avec le Saint-Siège qui perdure

Après l’assassinat de Frère Roger en 2005 par une femme dérangée psychiquement et la disparition de Jean Paul II en 2005, c’est au tour de Benoît XVI et de Frère Aloïs de reprendre le flambeau du dialogue œcuménique. Plusieurs fois reçu par l’évêque de Rome, Frère Aloïs a participé le 29 décembre 2012 à un évènement œcuménique sur la place Saint-Pierre auquel plus de 45’000 jeunes de toutes confessions chrétiennes se joignent. Le pape Benoît XVI aux côtés de la foule salue ce «moment de grâce» où il a été possible «d’expérimenter la beauté d’être un en Christ».

Particulièrement proche du pape François, Frère Aloïs se rend à Rome chaque année pour son audience privée durant laquelle la recherche de communion des chrétiens et l’accueil des jeunes à Taizé sont abordés.

«L’unité se fait en cheminant ensemble»

Durant la dernière audience le 4 avril 2020, l’évêque de Rome a tenu à remercier la communauté pour le bien qu’elle fait autour d’elle et à l’encourager: «L’unité se fait en cheminant ensemble, et vous le faites à Taizé, continuez!»  

Invité au synode sur les jeunes en octobre 2018, Frère Aloïs a profité de l’audience du 4 avril pour remercier le chef de l’Eglise catholique de cette invitation. Après la publication de l’exhortation apostolique intitulée Christus vivit, l’actuel prieur de Taizé interrogé par Vatican News se montre réjoui du discours du pape. En effet, la pastorale populaire en train d’émerger, s’ancre dans l’amour de Dieu mais aussi dans «l’amour fraternel dans la vie communautaire», déclare alors Frère Aloïs avec conviction.  (cath.ch/imedia/be)

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