Giuseppe Foletti, la prêtrise après les études de médecine

Patrice Favre pour catt.ch / traduction et adaptation: Bernard Litzler, cath.ch

Il a quitté le Tessin en 2007 pour étudier la médecine. Ce dimanche 28 juin 2020, Giuseppe Foletti, 32 ans, sera ordonné prêtre à la cathédrale de Fribourg. Entretien avec un jeune médecin qui a troqué le bistouri pour le col romain.

Mgr Charles Morerod, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF), va ordonner, en la veille de la fête des saints Pierre et Paul, Giuseppe Foletti, actuellement intégré dans l’Unité pastorale Notre-Dame à Lausanne. En raison des contraintes sanitaires, l’ordination sacerdotale, qui devait avoir lieu dans sa paroisse d’accueil, se déroulera à la cathédrale de Fribourg. Toutefois, la célébration pourra être suivie sur le canal Youtube du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg.

Né en 1988, Giuseppe est le fils d’un médecin de Massagno. Entré au séminaire diocésain après avoir achevé son cursus de futur médecin, il a vécu un enracinement spirituel au sein du mouvement Communion et Libération.

Entrer au séminaire après des études de médecine et le diplôme qui s’ensuit, ce n’est pas un choix anodin. Pourquoi cette étape? Y a-t-il eu un appel intérieur ou cela vient-il de l’exemple d’autres prêtres.
Il n’y a pas eu de moment clé. C’est plutôt une idée qui s’est précisée au cours d’un parcours qui a duré des années. Bien sûr, j’ai rencontré des prêtres qui vivaient leur vocation de façon magnifique, mais je n’avais jamais pensé à ce choix avant d’aller à Lausanne.

Et que s’est-il passé?
La vocation sacerdotale a commencé à faire son chemin lorsque ma foi a pris un tournant, lorsque j’ai découvert que la vie chrétienne pouvait être une aventure passionnante, pour laquelle il vaut la peine de tout donner. Même si j’ai alors eu la tentation de la tenir à distance, l’idée était présente, comme une évidence à prendre au sérieux.

Ce tournant dans votre cheminement de la foi est-il lié à un moment particulier?
Oui, il y a un épisode que je n’oublie pas, même s’il peut sembler anodin. J’étais à la fin de ma première année de médecine. Comme tout le monde, j’ai dû passer beaucoup de temps à étudier pour les examens, ce qui était également juste. On ne devient pas médecin sans avoir étudié.
Mais à un certain moment, cet engagement est devenu insupportable. Un jour de l’été 2008, je suis descendu avec d’autres étudiants à la cantine de l’université pour le dîner. Après le repas, en montant les escaliers pour retourner à la bibliothèque, je me suis figé : j’étais physiquement incapable de continuer. L’idée même d’étudier me faisait suffoquer!

«Mon oui ne veut être qu’une manière de m’orienter vers le Seigneur»

Et alors?
Je suis retourné voir mes amis et je leur ai dit : «Je n’en peux plus». Heureusement, ils ne se sont pas moqués de moi et ne m’ont pas fait la morale, mais ils ont compris à la fois ma fatigue et mon désir. En parlant avec eux, j’ai pu entrevoir une beauté sur la façon d’étudier et de vivre ma vie quotidienne.

Donc ce moment n’a pas fait naître subitement l’idée de devenir prêtre, mais a suscité votre désir?
Oui, c’est vrai. J’ai découvert une façon beaucoup plus intéressante de vivre les choses que j’avais à faire. Et c’est cela la vie chrétienne: la foi a fait naître une lumière dans les jours passés à la bibliothèque. J’ai compris que même les études pouvaient répondre à mon désir d’être heureux, de trouver une plénitude. L’étude n’était plus une prison acceptée pour un but ultérieur, mais comme le lieu où se jouait l’aventure de ma vie. Ce fut un tournant. Et c’est là qu’a commencé le chemin qui m’a conduit au séminaire.

En 2013, après avoir passé vos examens de médecine, vous avez annoncé à vos compagnons que vous alliez devenir prêtre. Comment ont-ils réagi?
Un camarade m’a traité d’imbécile! Je m’en souviens avec beaucoup de gratitude, car il était sincère, comme doit l’être un vrai ami. Selon lui, je gâchais ma vie! Objectivement, c’était difficile à comprendre, surtout si l’on ne vit pas une expérience de foi. Cela peut sembler fou.
Mais je lui en suis reconnaissant parce que sa réaction m’a permis de retrouver les raisons pour lesquelles j’ai dit oui à l’appel du Seigneur. Pour comprendre pourquoi je peux dire que je ne perds rien avec ce choix, même si je continue à penser que le métier de médecin est fascinant.

Pourquoi être ordonné dans le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg? Pourquoi ne pas retourner au Tessin ou éventuellement à la Fraternité San Carlo, la branche sacerdotale de Communion et Libération?
Je ne sais pas vraiment comment répondre à cette question. C’est surprenant, oui, mais il faut admettre qu’il y a toujours une part de mystère dans nos choix… Moi aussi, je me suis posé beaucoup de questions, mais le fait est que j’ai passé de très bons moments à Lausanne pendant mes années d’études et que je me suis attaché à cette ville. Je me suis senti chez moi.
Avant d’entrer au séminaire, j’ai posé la même question à un prêtre italien qui me suivait. Il m’a dit que je devais avoir foi dans le Seigneur : si ce n’était pas le bon endroit, Il me le ferait comprendre de bien des façons. En fait, je n’ai trouvé aucun obstacle, au contraire, j’ai été très bien accueilli.

En raison de la pandémie, la fête d’ordination sera limitée à quelques membres de votre famille. Vous êtes déçu?
C’est vrai, c’est un sacrifice. Comme pour un mariage, on aimerait être accompagné par ses amis et ses proches, car ils font partie du chemin qui vous y a conduit. Mais c’est un sacrifice que je fais avec joie, car après tant d’années de préparation, j’attends la dernière étape avec impatience. Je sais aussi que la communion avec les amis existe malgré ce fait qui, en revanche, empêche la distraction. Ainsi, il est plus évident encore qu’au centre, ce n’est pas moi, mais un autre. Et mon oui ne veut être qu’une manière de m’orienter vers le Seigneur. (cath.ch/catt.ch/bl)

Rédaction

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/newsf/giuseppe-foletti-la-pretrise-apres-les-etudes-de-medecine/