Le Saint-Siège rejette les apparitions de la Vierge à Ida Peerdeman

«Les apparitions d’Amsterdam sont fausses. La ‘Dame de tous les Peuples’ ne doit pas être vénérée et les fidèles doivent cesser toute propagande», a déclaré la Congrégation pour la doctrine de la foi dans une lettre adressée au cardinal Béchara Boutros Raï, patriarche d’Antioche des maronites, le 20 juillet 2020. Après plusieurs décennies de controverses, les cinquante-six prétendues apparitions de la Vierge Marie à Ida Peerdeman ont été formellement rejetées par le Saint-Siège.

Ida Peerdeman, une jeune femme hollandaise, affirme avoir assisté, entre 1945 et 1959, à cinquante-six apparitions de la Vierge sous le nom de «Dame de tous les Peuples». Ces révélations mystiques faisaient encore polémique jusqu’au 20 juillet dernier lorsque, à la demande du patriarche Raï, la Congrégation pour la doctrine de la foi (CDF), anciennement appelée le «Saint-Office», a clarifié la position du Saint-Siège quant aux visions d’Ida Peerdman.

Bien que la Madone apparue à Ida Peerdeman présente, pour certains, de nombreuses similitudes avec la Vierge apparue à Catherine Labouré en 1830 (globe sous les pieds, rayons de lumière émanant des mains tournées vers le bas), l’ancien Saint-Office a confirmé une notification signée en 1974 qui «estime qu’il n’est pas opportun de contribuer à la diffusion de la vénération de Marie en tant que ‘Dame de tous les Peuples’».

Les cinquante-six pseudo-apparitions

Selon le récit rapporté par la jeune hollandaise Ida Peerdeman, née le 13 août 1905 à Alkmaar (Pays-Bas), la Vierge lui serait apparue une première fois le 13 octobre 1917, jour où les apparitions mariales de Fátima s’achevaient par le célèbre épisode du «Miracle du soleil». La soit-disant voyante, alors âgée de douze ans, a rapporté avoir vu, alors qu’elle rentrait chez elle à Amsterdam, après une confession, une «femme lumineuse d’une beauté exceptionnelle qu’elle a immédiatement identifiée à la Vierge Marie».

La première longue apparition n’aurait eu lieu que le 25 mars 1945, solennité de l’Annonciation, et aurait été suivie de cinquante-six autres jusqu’en 1959. Après quelques visions, la Vierge aurait confié son nom à Ida Peerdeman: «Je suis la Dame, Marie Mère de tous les peuples». Elle aurait affirmé être «envoyée par le Père et le Fils pour aider l’humanité», annoncer la fin de la guerre et avertir le monde de «la dégénérescence, des désastres et de la guerre» et du danger d’une troisième «catastrophe mondiale».

La chapelle de Notre-Dame de tous les peuples, érigée à Amsterdam dans les années 1970 | © Wikipedia/Paul Be

S’ensuivent de nombreuses prédictions quant aux événements politiques, économiques et sociaux du 20e siècle: la guerre froide, la dissolution de l’URSS, la guerre de Corée, le conflit israélo-palestinien, le chaos politique en Palestine et au Proche-Orient etc.

Dès 1951, la Vierge aurait montré à Ida une vision du Concile Vatican II – qui aura lieu une décennie plus tard – et aurait confirmé la nécessité de réformes et de changements, des changements disciplinaires qui incluent la formation des prêtres et des religieux. Elle se serait montrée particulièrement inquiète pour Rome et le Vatican, en danger selon elle. Ida décrit une de ses soit-disant visions ainsi: «Maintenant, je  remarque que la Dame tient sa main au-dessus du pape et de Saint-Pierre. Le pape est assis, les doigts levés, et au-dessus de sa tête est écrit «Combattez». Je vois de plus en plus de combats. Puis, soudain, je vois des soldats portant des casquettes hautes se tenir derrière le pape; ils lèvent deux doigts. Serait-ce une référence à la franc-maçonnerie?»

Controverses et reconnaissances

Traditionnellement, dans l’Eglise catholique, la tâche de juger du caractère surnaturel d’une apparition incombe à l’évêque du diocèse dans lequel l’apparition a lieu: dans ce cas, le diocèse de Haarlem-Amsterdam. La difficulté de l’affaire Peerdman réside dans le fait que les prélats qui se sont succédé dans ce diocèse ont porté des jugements contradictoires.

Le premier, Mgr Johannes Huibers, évêque au moment des apparitions, a donné son approbation (nihil obstat) au titre et à la prière associés à l’apparition. Néanmoins, le 7 mai 1956, après avoir examiné attentivement le cas des prétendues apparitions et révélations de «Notre-Dame de tous les Peuples», le même évêque est revenu sur sa décision et a déclaré n’avoir trouvé «aucune preuve du caractère surnaturel des apparitions».

À plusieurs reprises, en 1957, en 1972 et en 1974, la CDF a confirmé la position de l’évêque hollandais. Cependant, le 31 mai 1996, un de ses successeurs, Mgr Hendrik Bomers, avec l’autorisation de la CDF, a par la suite autorisé la vénération publique de la même vierge, maintenant que la question du caractère surnaturel des apparitions elles-mêmes n’était pas résolue. Il a réitéré sa décision dans une lettre datée du 3 décembre 1997.

Le 31 mai 2002, Mgr Jozef Marianus Punt, l’évêque suivant, a déclaré que les apparitions étaient d’origine surnaturelle. Depuis lors, la question demeure de savoir si Mgr Punt avait le pouvoir d’annuler la décision de son prédécesseur, étant donné que la décision de ce dernier avait été confirmée par la CDF. Dans une lettre non publiée de juillet 2005, la CDF a demandé que la prière associée à l’apparition soit modifiée, en remplaçant les mots «qui fut un jour Marie» par «la Sainte Vierge Marie». Les partisans des prétendues apparitions en ont déduit que la CDF avait tacitement accepté l’approbation de Mgr Punt.

Le cas Peerdeman est-il clos?

Interrogé par le cardinal libanais, l’ancien Saint-Office a rappelé dans une lettre signée le 20 juillet dernier que le jugement de l’Église restait celui publié par le diocèse d’Amsterdam le 25 mai 1974, dans lequel il est dit – après une étude appropriée – qu’Ida Peerdeman «n’était pas consciente du caractère surnaturel des apparitions». C’est pourquoi, lit-on dans la lettre de la Nonciature du Vatican, les fidèles sont invités à «cesser toute propagande sur les apparitions et révélations revendiquées de la Dame de tous les Peuples et sont exhortés à exprimer leur dévotion à la Très Sainte Vierge, Reine de l’Univers sous des formes reconnues et recommandées par l’Église.»

La Conférence épiscopale des Philippines avait fait la même demande auprès du dicastère en 2005 et avait reçu la même réponse. Par conséquent, le jugement négatif de l’Eglise n’a pas changé. L’affaire devrait dorénavant connaître moins de rebondissements. (cath.ch/imedia/at/bh)

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