Homélie du 18 octobre 2020 (Mt 22, 15-21)

Père Patrice Gasser – Chapelle St-Joseph, École des Missions, Bouveret/St-Gingolph

Chères sœurs, chers frères, chers amis,

Un Dieu qui est le seul Dieu ! c’est ce dont doutaient les hébreux exilés à Babylone. Nabuchodonosor leur avait enlevé leurs maisons, leur culture et leur force de vie. Quand ils ont vu Cyrus, ce roi étranger qui avait tant d’humanité, ils ont dû être bien surpris : pas de vol, pas de massacre, pas de travail d’esclave. Au contraire, il les aide à retourner à Jérusalem, il rend les biens volés et leur donne un peu d’argent pour reconstruire leurs maisons. Ils ont été touchés par sa clémence et son humanité, et Isaïe derrière lui, voit Dieu qui prend soin de son peuple. Ils respiraient : à travers ce roi perse, Dieu restait maître de l’histoire.

Dieu maître de l’histoire

Le psaume 95, lui, nous transporte à la fin du monde, il parle du frémissement de toutes les nations quand Dieu sera reconnu comme Dieu ; la création tressaillira : le psaume continue ainsi : les masses de la mer mugissent et les arbres des forêts dansent de joie. Même si les humains restent muets et aveugles et ne reconnaissent pas la bonté de Dieu, la création elle chantera sa gloire. Là encore Dieu reste maître de l’histoire humaine…

Dans ces derniers chapitres de Matthieu que nous avons lu, l’horizon de la passion se profile. Jésus n’a plus rien à perdre, il n’emploie pas de langue de bois : ces pharisiens qui le flattent alors qu’ils lui tendent un piège sont des hypocrites.  S’il répond qu’on doit payer l’impôt à César, il collabore avec l’occupant et ne peut être le Messie attendu ; et s’il refuse de payer l’impôt, il peut être dénoncé aux autorités et emprisonné, ce que ces juifs désiraient de tout leur cœur. Jésus leur fait cette réponse cinglante : Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ! Mais il y a beaucoup de sagesse dans ce dicton.

Rendre à César que ce qui est à César. L’autorité aide à la vie ensemble ; c’est elle qui rappelle un ordre pour trier les déchets, un horaire pour travailler et pour dormir, elle contrôle la vitesse pour traverser les localités et l’état de nos véhicules ; elle répartit les zones à bâtir et les zones agricoles, les chemins forestiers et les autoroutes. Et en Suisse nous avons le plaisir de les élire chaque quatre ans, les urnes disant … s’ils ont fait du bon travail ! (je ne parle pas  de certains pays où les présidents restent à vie !). Cette autorité reste cependant limitée, elle doit être mise face à la législation en vigueur et les traditions d’un pays ; elle doit aussi rendre compte au pouvoir judiciaire.

Dieu nous aide à découvrir nos capacités

Rendre à Dieu ce qui est à Dieu : si l’on veut être honnête, tout le reste de notre vie intéresse Dieu. C’est lui qui nous donne cette capacité de créer semblable à la sienne, et il nous accompagne dans les différentes étapes de nos vies : naître ici ou ailleurs sans l’avoir demandé, grandir comme enfant et apprendre à être humain, se séparer de ses parents comme jeune adulte, fonder une famille en s’appuyant sur les valeurs reçues, comme grand-mère visiter son père en EMS, prendre soin des retraités que nous sommes tout en gardant les liens avec la descendance. La vie est complexe et Dieu est là pour nous aider à découvrir nos capacités et à développer nos possibilités de cœur. Car il a mis en nous des possibilités fantastiques que les saints nous révèlent : un François d’Assise qui, malgré sa peur de la contagion, embrasse le lépreux, et qui va même jusqu’à vouloir faire la paix avec un sultan dont il comprend à peine la langue.

Sortir de notre zone de confort

Nous vivons dans un temps incertain et nous pouvons rendre à Dieu ce qui est à Dieu et à nos sœurs et frères un peu de ce que nous sommes et de ce que nous avons : malgré la Covid-19 nous pouvons garder des liens avec nos aînés, prendre du temps pour accueillir un inconnu, rencontrer des personnes « à risque », amener nos petits-enfants dans une église, allumer une bougie devant une icône, passer dans un cimetière et prier pour nos défunts. Comme le bon samaritain, nous devons sortir de notre zone de confort et nous approcher de celui ou celle qui est blessée au bord du chemin ; et alors nous serons vraiment les fils du Très-Haut, dignes de s’asseoir à sa table lorsque les anges nous rassembleront pour le banquet du Royaume. Oui, Dieu a démarré l’histoire de la création et de l’alliance, il a besoin de nous pour l’achever. Avec le prophète nous pouvons dire : Me voici, Envoie-moi !

29e DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE
Lectures bibliques : Isaïe 45, 1.4-6; Psaume 95, 1.3, 4-5, 7-8, 9-10ac; 1 Thessaloniciens 1, 1-5b; Matthieu 22, 15-21

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