Haut-Karabakh: déprédations du patrimoine religieux arménien

Le patriarche Karékine II, catholicos de tous les Arméniens, dans une lettre au patriarche Cyrille de Moscou, remercie les soldats de la paix russes envoyés pour assurer la sécurité des sanctuaires religieux situés dans les zones reconquises par l’Azerbaïdjan dans le cadre du conflit du Haut-Karabakh.

Le chef de l’Eglise apostolique arménienne remercie le patriarche de Moscou d’avoir répondu à sa demande en intercédant auprès des autorités russes pour qu’un contingent de soldats de la paix vienne assurer la sécurité des antiques monastères chrétiens.

Le respect des lieux de culte chrétiens et le besoin de préserver «la vie ecclésiale normale» dans les territoires devant être sous le contrôle direct de l’Azerbaïdjan ont été explicitement demandés par le président russe Vladimir Poutine au président azerbaïdjanais Ilham Aliyev. Ce dernier aurait garanti protection et libre accès à toutes les églises et à tous les monastères du Nagorny-Karabakh, écrit l’agence d’information vaticane Fides.

Soldats de la paix russes

Un poste de soldats de la paix russes a été installé près du monastère arménien de Dadivank, dans le district de Karvachar, Kelbadjar pour les Azéris, qui doit être restitué à l’Azerbaïdjan au plus tard le 25 novembre 2020. Pour les Arméniens, ce joyau médiéval est en danger, les Azéris étant coutumiers de la destruction des témoins de la présence arménienne dans les régions conquises.

Evacuation des objets religieux du couvent de Dadivank | DR

«Vous êtes parfaitement informé de l’histoire de cet antique monastère et de son importance pour l’Artsakh» (nom arménien du Haut-Karabakh, ndlr), écrit Karékine II au patriarche de Moscou.

Plus d’une centaine de lieux saints remis à l’Azerbaïdjan

«Pour son peuple, qui pleure la perte de parents et de proches, qui s’afflige des destructions causées par les opérations militaires dans les villes et les villages, ainsi que de l’obligation de remettre à l’Azerbaïdjan plus d’une centaine de lieux saints, chapelles et églises, poursuit-il, votre démarche constitue une contribution inestimable à l’affermissement de la foi du peuple arménien et de son espérance dans l’avenir».

Grâce à la médiation des forces russes de maintien de la paix, «des visites gratuites au monastère [de Dadivank, ndlr] pour les croyants sont envisagées», a déclaré Igor Konachenkov, porte-parole du ministère russe de la défense.

Les premières profanations

Des églises arméniennes ont déjà été profanées, dénonce de son côté Artak Beglaryan, défenseur des droits de l’homme de l’Artsakh, en affirmant sur twitter que «l’Azerbaïdjan a vandalisé la cathédrale ‘Kanach Zham’, dédiée à Saint-Jean-Baptiste» à Chouchi. La ville a été reprise par les forces azéries le 9 novembre 2020.

La cathédrale Saint-Sauveur – Ghazanchetsots en arménien – une des plus grandes églises du monde arménien, à Chouchi, frappée le 8 octobre 2020 à deux reprises par les tirs des forces azerbaïdjanaises, est elle aussi menacée. Masis Mayilian, ministre des Affaires étrangères de la République d’Artsakh, a adressé une lettre à la Directrice générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO) Audrey Azoulay, attirant son attention sur des profanations et des actes de vandalisme commis par la partie azerbaïdjanaise contre les monuments historiques, religieux et culturels arméniens.  

L’UNESCO interpellée

Masis Mayilian mentionne des vidéos et des photos diffusées sur internet qui montrent des inscriptions en azerbaïdjanais sur les murs de l’église du Saint-Sauveur à Chouchi et la destruction de sculptures à l’intérieur de l’église.  La lettre adressée à l’UNESCO souligne que le déni systématique de l’existence du patrimoine historique et culturel arménien et sa destruction «sont depuis longtemps la norme en Azerbaïdjan et font partie de la politique étatique d’inculquer la haine et la xénophobie envers les Arméniens».

Le ministre a souligné la nécessité de prendre des mesures efficaces au nom de l’UNESCO pour assurer la protection du patrimoine historique, culturel et religieux et garantir que l’Azerbaïdjan s’acquitte de ses obligations de préserver le patrimoine culturel des autres peuples.

Promesses d’Emmanuel Macron

De son côté, le président français Emmanuel Macron a annoncé le 19 novembre sur twitter que la France est prête à apporter, dans le cadre de l’Unesco, avec l’Alliance pour la protection du patrimoine dans les conflits, son expertise et son plein appui pour la protection du patrimoine culturel et religieux du Haut-Karabakh et de ses environs.

L’Elysée a également  fait savoir l’intention de la France d’accorder une assistance humanitaire au Haut-Karabakh ainsi que de protéger le patrimoine culturel et religieux de cette région, lors d’entretiens en visioconférence avec le président azerbaïdjanais et le Premier ministre arménien.

Une pétition, intitulée «Protect Armenian Cultural & Historical Sites in Artsakh», adressée à l’UNESCO, chargé de la protection des sites du Patrimoine mondial, a déjà recueilli près de 120’000 signatures. (cath.ch/be)

Jacques Berset

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