Réalisé avec le journaliste britannique Austen Ivereigh et à paraître le 2 décembre 2020 en France aux éditions Flammarion, Un temps pour changer aborde de nombreux thèmes dont celui des médias.En communiquant et en aidant les gens à voir les questions et les défis auxquels l’Église est confrontée, les médias ont un rôle de premier plan, souligne le pape.
Mais dans certains cas, les journalistes « courent le risque de confondre contrapositions et polarisations, les réduisant à des choix manichéens simplistes ». Ils leur arrivent en effet de couvrir le synode comme s’il était « un bras de fer dramatique entre des forces opposées ».
Il arrive alors que le « récit médiatique finisse par miner la capacité de discernement » des participants, déplore le pape François. Cela a été le cas par deux fois, lors du synode sur la famille en 2015 et celui sur l’Amazonie en 2018.
Lors du synode sur la famille, des « médias liés à des groupes particuliers » ont en effet réduit et simplifié l’ensemble des travaux du synode à une seule question, celle de permettre ou non aux personnes divorcées-remariées de recevoir la communion. Comme si ce synode avait été convoqué uniquement pour cela, regrette-t-il.
Au fil des réunions synodales, le récit médiatique a été établi que l’Église devait soit « assouplir ses règles », soit maintenir sa position « stricte ». En d’autres termes, la couverture médiatique a renforcé la casuistique que le synode cherchait justement à dépasser. Le « mauvais esprit » a conditionné le discernement, encourageant les conflits stériles, déplore le pape.
Sur cette question sensible des divorcés remariés, le pape François salue le « débordement » alors entrepris par le cardinal autrichien Christoph Schönborn s’appuyant sur saint Thomas d’Aquin. Il avait alors rappelé qu’aucune règle générale ne pouvait s’appliquer à toutes les situations. Cela avait permis au synode de « s’accorder sur la nécessité d’un discernement au cas par cas ». « Il n’était pas nécessaire de changer la loi de l’Église, mais seulement la manière dont elle était appliquée », observe aujourd’hui le pontife.
Une polarisation similaire a eu lieu lors du synode sur l’Amazonie d’octobre 2019, « sur une question secondaire ». « Certaines personnes, dans et par les médias, ont à nouveau réduit l’ensemble du processus synodal à la question de savoir si l’Église serait prête ou non à ordonner des hommes mariés, ce qu’on appelle les viri probati, même si cette question n’occupait que trois lignes dans un document préparatoire de trente pages », rappelle-t-il.
Cette fois aucune « résolution par débordement », n’est intervenue regrette-t-il. Le « fantasme » que le synode ait été consacré à cette question a alors perduré jusqu’à la publication de l’exhortation apostolique Querida Amazonia en février 2020. « Beaucoup se sont sentis déçus ou soulagés parce que le pape n’a pas ouvert cette porte ». « C’était comme si personne ne s’intéressait aux drames écologiques, culturels, sociaux et pastoraux de la région ; le synode avait «échoué» parce qu’il n’avait pas autorisé l’ordination des viri probati », retrace François.
Paradoxalement, les pressions idéologiques à l’intérieur comme à l’extérieur du synode sont pour le pape « également un bon signe ». Car partout où l’Esprit de Dieu est présent, « les tentations de le faire taire ou de le distraire sont aussi présentes: « Si l’Esprit n’était pas présent, ces forces ne s’en préoccuperaient pas. »
L’autre don de l’Esprit lors des synodes est de « révéler les agendas et les idéologies cachés » selon lui. « C’est pourquoi nous ne pouvons pas parler de synodalité si nous n’acceptons pas et ne vivons pas la présence de l’Esprit Saint ». (cath.ch/imedia/ah/mp)
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