Monténégro: des amendements pour corriger la loi anti-orthodoxe

La loi sur la «liberté religieuse» au Monténégro, adoptée le 27 décembre 2019 par l’ancienne majorité du Parlement monténégrin à Podgorica selon les vœux de l’ex-président monténégrin Milo Djukanovic, va être révisée. Cette législation controversée a provoqué une forte mobilisation populaire qui a contribué au changement de régime politique.

Le nouveau gouvernement, récemment formé, met fin à trente ans de règne absolu de Milo Djukanovic et du Parti démocratique des socialistes (DPS), le pouvoir ayant changé de mains suite aux élections législatives du 30 août 2020.

Grave erreur de Milo Djukanovic

La coalition de l’opposition a profité d’une grave erreur du gouvernement du président Milo Djukanovic et du Premier ministre Dusko Markovic : leur loi sur la liberté de religion adoptée en décembre 2019 prévoyait le transfert des propriétés de l’Eglise orthodoxe serbe, installée au Monténégro depuis 700 ans, à l’Etat. La perspective du transfert des reliques des églises et des monastères a provoqué des manifestations sans précédent, faisant descendre dans la rue des centaines de milliers de fidèles, l’Eglise orthodoxe serbe du Monténégro craignant à juste titre la confiscation de ses propriétés.

Cette législation, selon l’Eglise orthodoxe du Monténégro relevant du Patriarcat de Serbie, aurait eu pour but de «spolier les églises et les biens ecclésiastiques» de la plus grande confession religieuse du pays. Elle prévoyait de nationaliser les biens dont les Eglises ne pouvaient pas prouver qu’ils leur appartenaient avant 1918. A cette date, le Monténégro perdait son indépendance et était intégré au Royaume de Yougoslavie créé à la suite de la Première Guerre mondiale.  

Portée par les milieux nationalistes monténégrins

Portée par les milieux nationalistes monténégrins, cette loi a été perçue comme une grave atteinte aux droits de l’Eglise serbe dans cette petite république multiethnique de 660’000 habitants au cœur des Balkans. Le président Djukanovic voulait promouvoir l’autocéphalie (auto-administration dans les affaires ecclésiastiques et pastorales) de l’Eglise orthodoxe monténégrine, une petite Eglise nationale non canonique reconnue par aucune autre Eglise orthodoxe. Cette Eglise minoritaire, qui rejette l’Eglise orthodoxe serbe canonique et qui est qualifiée de schismatique, a été officiellement «restaurée» le 31 octobre 1993.

Désormais, les choses ont changé avec la défaite électorale de Djukanovic. Le texte de la loi modifiée sur la liberté religieuse est prêt à être examiné par le gouvernement monténégrin dans les jours prochains, a déclaré le Vladimir Leposavic, tout nouveau ministre de la Justice et des Droits de l’Homme et des Minorités.

Orthodoxie divisée sur des critères nationalistes

« Le texte des amendements à la loi sur la liberté religieuse est prêt et les articles contestés de cette loi ont été supprimés et modifiés. Les modifications proposées à la loi seront décidées d’urgence par le gouvernement au début de la semaine prochaine, puis transmises à l’Assemblée pour approbation, ce qui permettra de tenir la promesse préélectorale du nouveau gouvernement », a déclaré le ministre Vladimir Leposavic.    

Aux côtés des catholiques et des musulmans, la majorité de la population monténégrine est orthodoxe, mais l’orthodoxie est divisée principalement sur des critères nationalistes. Le Premier ministre du Monténégro, Dravko Krivokapic, a assuré que toutes les lois discriminatoires adoptées à des fins partisanes, au détriment des citoyens et des associations religieuses, seront révisées et complétées, et que les décisions préjudiciables seront modifiées dans la législation. Le nouveau gouvernement a déjà mené des consultations intensives avec les associations religieuses, qui ont donc l’occasion de faire des commentaires et des propositions, a déclaré Vladimir Leposavic. (cath.ch/be)

Jacques Berset

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