Le cardinal Pell, partisan d'un leadership fort

Dans la vie, «la lutte est nécessaire», déclare le cardinal George Pell, ancien préfet du Secrétariat pour l’économie, dans le premier volume de son Journal de prison, édité par la maison d’édition américaine Ignatius Press le 4 décembre 2020. «Lorsque la fadeur gouverne la fadeur, nous produisons un catholicisme contraceptif», avertit-il.

Depuis sa cellule de la prison de Melbourne (Australie), le cardinal Pell raconte avoir pu suivre, grâce aux journaux qu’on lui apportait et à un poste de télévision, les divers événements qui ont marqué l’Église catholique et la vie politique internationale pendant ses 13 mois d’incarcération. Tout au long de son ouvrage, il se livre à de nombreux commentaires qui ont pour fil rouge la nécessité de penser une gouvernance forte et solide.

Pour des évêques «plus forts»

Diriger l’Église est une affaire sérieuse pour le cardinal australien, qui porte un regard dur sur ses contemporains: «Lorsque la fadeur gouverne la fadeur, nous produisons un catholicisme contraceptif, qui semble sain en apparence mais ne peut pas produire de nouvelle vie». «La plupart d’entre nous veulent une vie tranquille, certains n’y parviennent pas, mais chacun doit choisir un camp, pas l’autre. La lutte est nécessaire», prévient-il.

Bien diriger est une question prioritaire pour le haut prélat, à commencer par les évêques, qu’il souhaite «plus forts». «Le premier critère pour un bon évêque est qu’il témoigne de la foi catholique et apostolique». Il donne comme modèle plusieurs Français, notamment le cardinal Jean-Marie Lustiger. Mais aussi Mgr Michel Aupetit: «J’espère qu’il sera bientôt cardinal. Avec quelques années d’expérience supplémentaires et une direction efficace, il devrait être éminemment ‘papabile’, une possibilité digne d’être le prochain pape».

Repenser le statut de pape émérite

C’est notamment cette nécessité d’un leadership fort qui exige selon lui la réforme du statut de pape émérite: ce dernier devrait être requalifié en «cardinal, ancien pape», et ne pas être autorisé à porté l’habit blanc, insiste-t-il. Proche de Benoît XVI, il loue ses grandes qualités de théologien et affirme lors d’une conférence de presse organisée le 16 décembre qu’il souhaite qu’il soit un jour reconnu comme «Docteur de l’Église». Mais il ne le juge cependant «pas doué pour traduire ses souhaits en actes».

Pour le cardinal australien, légiférer sur le statut d’un éventuel pape émérite revient à protéger la place du Souverain pontife, c’est-à-dire avant tout à «défendre l’unité» de l’Église catholique. Il est «probable que les mesures seraient mieux introduites par un pape qui n’a pas de prédécesseur survivant», reconnaît-il.

Pour un conservatisme social

Pour le cardinal Pell, cette conception de l’autorité se retrouve dans la Doctrine sociale de l’Église, laquelle trouve en politique son expression dans un «conservatisme social». «Les démocraties ont besoin d’un noyau accepté d’hypothèses ou de traditions communes, car le principe de diversité est insuffisant en soi et doit être étayé par un engagement en faveur du discours civil, des droits de l’homme et de la liberté d’expression», explique-t-il ainsi dans son Journal.

Cette crise de la démocratie, il la déplore notamment au sujet de l’Union européenne, qu’il juge durement, en pleine crise du Brexit: «Aucun groupe de gouverneurs ne peut diriger un empire tout en prescrivant la forme des bananes et la composition des pâtés de viande et en empêchant les membres d’une famille en Irlande de préparer les tombes de leurs proches, car cette tâche incombe aux fossoyeurs.»

À rebours, il a un regard plus conciliant à l’encontre du président des États-Unis, Donald Trump: «Il est un peu barbare, mais à certains égards importants, il est ‘notre’ barbare (chrétien)». Un jugement qu’il confirme en conférence de presse: «Dans l’ensemble, je pense que Trump a apporté une contribution positive à la cause chrétienne». Le cardinal Pell mentionne notamment la nomination de catholiques à la Cour suprême [Brett Kavanaugh et Amy Coney Barrett, NDLR] et sa participation à la Marche pour la vie en janvier dernier. Cependant, il déplore qu’il n’ait pas été «suffisamment respectueux du processus politique». (cath.ch/imedia/cd/rz)

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