L'incroyable destin de Mick Fleming, de dealer à pasteur de rue

Le pasteur de rue britannique Mick Fleming connaît depuis peu de temps une notoriété inattendue dans son pays. Suite à un reportage de la BBC, début décembre 2020, les spectateurs ont découvert un homme profondément engagé pour les plus démunis suite à une conversion radicale.

Mick Fleming, usuellement appelé ‘Pastor Mick’, est au cœur d’un véritable dispositif de «survie» à Burnley, à 30 km au nord de Manchester. Il distribue régulièrement des rations à des familles dont les sources de revenus se sont taries depuis l’émergence de la pandémie de Covid-19 et qui connaissent réellement la faim. Une pauvreté extrême jusque-là largement ignorée du grand public au Royaume-Uni. Le reportage de la BBC, diffusé le 1er décembre 2020, a apporté un nouvel éclairage sur cette réalité qui a généré des millions de visionnements et choqué le pays.

Un homme «très dangereux»

La vidéo de cinq minutes met en scène deux membres du collectif d’Eglises local ‘Church on the streets’: le pasteur Mick Fleming, de l’Eglise du Nazaréen (Church of the Nazarene), un regroupement d’Eglises protestantes issu du Mouvement de sanctification, et le Père Alex Frost, de l’Eglise d’Angleterre (anglicans). L’aide que ce groupe offre aux démunis est devenue cruciale ces derniers mois. «Si ces distributions de nourriture n’avaient pas lieu, je serais certainement déjà morte», témoigne ainsi une femme dans le reportage.

Mais si aujourd’hui ‘Pastor Mick’ s’efforce de sauver des vies, il se rappelle d’un temps où il était un colporteur de mort. Un homme qui se décrit comme «très dangereux». C’était dans une autre vie, si insolite qu’elle ressemble à un scénario de film. Un parcours narré par la BBC, après que le reportage vidéo ait connu un si grand retentissement.

Descente aux enfers

Mick Fleming n’avait pas si mal commencé son existence. Né en 1966 à Burnley dans une famille modeste, il a eu une enfance normale. Une éducation stricte, mais correcte, où le garçon est forcé à aller à l’église. A cette époque, il assure croire en Dieu.

Cette vie tranquille bascule cependant en l’espace de 48 heures. Alors qu’il est âgé de 11 ans, en 1977, il se fait agresser sexuellement par un inconnu dans un parc. Le jour de l’attaque, il est tellement tétanisé par le choc qu’il ne dit rien à ses parents. Le lendemain, alors qu’il s’apprête à leur dire ce qui lui est arrivé, son père annonce brutalement que sa sœur est morte. La jeune femme de 20 ans, de laquelle Mick est très proche, est décédée d’une crise cardiaque.

Le garçon n’osera plus parler de son agression. Il se réfugie dans l’alcool et la drogue. Il se rapproche de ce milieu et commence, petit à petit, à dealer à son tour. Il s’en suit une plongée infernale dans la dépendance et la délinquance qui dure 30 ans. Durant cette période, sa principale activité consiste à régler des comptes dans le milieu de la drogue. Menacer, battre ou même tuer les personnes qui ne peuvent pas payer leur dû. «Cela a détruit ma santé mentale», assure-t-il. Mick ne ressent plus ni sentiment ni émotion face aux actes atroces qu’il commet régulièrement.

Sauvé par un éclair aveuglant

Mais cette vie connaît un nouveau tournant en 2009, alors qu’il a 41 ans. Mick attend dans sa voiture à l’extérieur d’un club de sport, qu’un autre dealer sorte de la salle pour l’exécuter d’un coup de pistolet. Mais quand sa cible sort, elle est accompagnée de deux petites filles d’environ cinq ans. Mick sort de son véhicule et s’approche de l’homme.

Aujourd’hui encore il ne s’explique pas ce qui s’est passé à ce moment-là. Il raconte avoir vu un éclair aveuglant sortir de la main d’une des enfants. Il s’effondre, et rampe jusqu’à sa voiture. Se sentant alors au comble du désespoir et du mal-être, il tente de se suicider avec son arme. Mais le coup ne part pas. Retrouvé dans un état second dans sa voiture, il est interné dans un hôpital psychiatrique.

Lors de ce séjour avec des malades schizophrènes, alcooliques ou paranoïaques, il redécouvre une forme de solidarité humaine. Alors qu’il est arrivé dans l’institut avec uniquement ses vêtements, les autres patients lui offrent des cigarettes, des habits, des baskets. Il rencontre aussi dans cet endroit le pasteur Tony, qui y effectue des visites régulières. Ils commencent à prier et à parler ensemble et Mick recommence à ressentir des émotions. Il se met à aider les autres. «C’était la fin d’une vie troublée et le début d’une vie nouvelle, faite d’espoir».

La paix avec son passé

Soutenu par le pasteur Tony, Mick commence des études de théologie à l’Université de Manchester. Ayant été une bonne partie de sa vie en échec scolaire, ce n’est pas facile pour lui, mais il s’accroche et finit par obtenir un diplôme.

Après être devenu pasteur, il entre dans le collectif ‘Church on the Streets’, où il s’engage pour les plus démunis et pour la justice sociale, dans une des régions les plus pauvres de Grande-Bretagne, où une grande partie de la population se sent abandonnée.

Depuis qu’il a commencé sa nouvelle vie, Mick assure n’avoir plus jamais touché à la drogue et avoir fait la paix avec son passé.

Au début de sa vocation de pasteur de rue, il a été amené à s’occuper d’un vieil homme alcoolique. Il a fait en sorte qu’il devienne sobre et se réconcilie avec sa famille. Il est mort deux ans après leur rencontre, entouré de ses proches. Mick n’a jamais révélé à cet homme, ni à sa famille ou à la police qu’il était celui qui l’avait violé quand il avait 11 ans. A quoi bon? C’était pour Mick dans une vie qui n’existe plus. «Je savais que Dieu m’avait pardonné pour mon passé (…) C’est pourquoi je me sens libre, que je ne passe pas mon temps à me tourmenter. Je vis dans la rédemption». (cath.ch/bbc/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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