Semaine de l’Unité: le vibrant plaidoyer de Claude Ducarroz

«L’œcuménisme en panne…»: sur ce thème délicat, le chanoine Claude Ducarroz, prévôt émérite de la cathédrale de Fribourg, a plaidé pour des échanges renouvelés entre les Eglises chrétiennes. Son intervention, le 20 janvier 2021 en l’église de Bière (VD), a été précédée d’une célébration de prière pour l’Unité des chrétiens.

En panne, l’œcuménisme? La question posée au chanoine Claude Ducarroz par la paroisse de Bière avait un aspect provocateur, en cette Semaine de prière pour l’Unité. L’orateur d’un soir ne s’y est pas dérobé. Devant la cinquantaine de personnes réunies en l’église du lieu, il a dressé le portrait des démobilisés du dialogue entre les Eglises.

Pour le théologien fribourgeois, il y a d’abord ceux qui «sont contre l’œcuménisme», estimant que leur Eglise est la seule valable. Deuxième catégorie, ceux qui se disent volontiers favorables à l’œcuménisme, mais sont accaparés par d’autres priorités, actuellement. Ensuite, il y a «ceux qui ont essayé», mais se sont découragés devant les difficultés multiples. Quatrième groupe, les «post-œcuméniques» ou les «auto-satisfaits de l’œcuménisme» qui trouvent magnifiques les rapprochements réalisés, mais qui veulent en rester là.

«Dieu est œcuménique»

Heureusement, il existe une cinquième catégorie, plus active. Claude Ducarroz fonde cette volonté œcuménique en Dieu: «Si nous sommes plantés en ce monde, nos vraies racines sont en Dieu», dit-il. Car «il est œcuménique».

«Dans la perfection de cet amour, Dieu allie l’unité et la diversité, Père, Fils et Esprit», plaide l’ancien prévôt de la cathédrale St-Nicolas. «Nous pouvons donc compter sur l’œcuménisme qui existe en Dieu dans ses profondeurs créatrices». Et, en ce sens, «rien ne pourra nous enlever à la fidélité de Dieu dans ce qu’il est pour nous et au milieu de nous».

Des pionniers pas toujours appréciés

Pourtant l’histoire des Eglises est marquée par les drames: la séparation Orient-Occident en 1054, puis la Réforme du 16e siècle. Mais «l’Evangile a tenu bon», insiste Claude Ducarroz. Heureusement, grâce au monde réformé, le mouvement œcuménique est apparu. Il date du 19e siècle. Dans toutes les Eglises ont alors émergé des pionniers du dialogue, «pas toujours appréciés» d’ailleurs.

«Nous sommes les enfants de ces pères dans la foi œcuménique, comme une famille qui se réconcilie avec elle-même». Car leurs souffrances, leurs prières et leur courage ont généré un grand élan qui «reste à prolonger dans notre contexte, pour soulever la chrétienté vers davantage d’unité».

«Du boulot pour tous»

Alors l’œcuménisme est-il en panne? Le scepticisme semble régner. Mais Claude Ducarroz – c’est la cinquième catégorie – reste optimiste, en étant porté par «la formidable espérance» insufflée par les pionniers du dialogue «Et il y a du boulot pour tous», que ce soit dans le domaine de la profession de foi, de la reconnaissance des ministères ou de la célébration.

Le concile Vatican II (1962-1965) a certes marqué l’entrée du monde catholique dans le mouvement œcuménique, mais le catholicisme n’est pas au bout de ses réformes. «Que les protestants nous y aident», demande même l’ancien membre du Groupe œcuménique des Dombes, des théologiens qui se confrontent régulièrement aux thèmes qui font difficultés entre les Eglises. Il suggère également que les protestants soient plus soucieux d’unité interne et que les orthodoxes ne perdent pas «la saveur des profondeurs de leurs racines liturgiques, spirituelles et bibliques».

L’échange de cadeaux

Dans l’attitude d’ouverture à l’œcuménisme, il y a en fait un état d’esprit qui fait que «l’autre me manque»: «Je ne suis pas tout à fait moi-même sans l’autre». Le chanoine fribourgeois prône donc un «échange de cadeaux» entre les Eglises. Mais un échange sans orgueil, sans prétention, dans le sens de ce qui peut contribuer à stimuler les Eglises à progresser ensemble.

Dans les domaines de construction commune, Claude Ducarroz pointe la recherche théologique, telle que l’a pratiquée le Groupe des Dombes, le prophétisme renouvelé des responsables des Eglises «qui doivent être moteurs et non des freins», la catéchèse commune, les chantiers bibliques, l’accueil des réfugiés, ainsi que les services d’aumônerie et les foyers mixtes.

Car, conclut le théologien, «il nous reste à savourer la joie évangélique avec l’envie de mieux se connaître, entre frères et sœurs, pour servir ensemble nos frères et sœurs humains».

 Juste avant la conférence, la paroisse de Bière a ponctué la Semaine de l’Unité 2021 par une célébration fervente. La pasteure Eloïse Deuker et le diacre catholique Stéphane Rempe ont animé le temps de prière, en compagnie d’autres responsables ecclésiaux du Jura vaudois. (cath.ch/bl)

Bernard Litzler

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