Chine-Vatican: 2020, l'année de la confirmation? 1/5

À l’occasion du discours au corps diplomatique prononcé le 8 février 2021 par le pape François au Vatican, I.Média revient sur cinq dossiers qui ont marqué l’année 2020 et devraient continuer à faire l’actualité en 2021. Premier dossier: la Chine, pays avec lequel le Vatican a renouvelé l’accord portant sur la nomination des évêques.

À l’occasion de son précédent discours au corps diplomatique, prononcé en janvier 2020, le pape François avait égrené un à un, comme c’est la coutume, tous les pays du monde touchés par la misère, les injustices ou les conflits. Un pays n’avait pas été cité: la Chine.

Un an plus tard, lors du discours au corps diplomatique de février 2021, le pape François a cette fois-ci salué le renouvellement de l’accord pastoral de 2018 sur la nomination des évêques avec Pékin. La conclusion d’un long travail silencieux – mais très commenté – de l’administration du Saint-Siège qui a marqué l’actualité tout au long de l’année 2020.

L’année passée, la ›question chinoise’ au Vatican semblait avoir été dictée par le mot célèbre de Léon Gambetta: «Ne jamais en parler, y penser toujours». La discrétion du pape et de son administration sur la question chinoise s’expliquait par l’arrivée à son terme en septembre 2020 de l’accord provisoire de 2018. Cet arrangement sur les nominations des évêques, désigné par les deux parties comme essentiellement «pastoral», avait permis de rétablir un canal de discussion entre Rome et Pékin. Une première depuis l’arrivée au pouvoir de Mao Tsé-toung et l’expulsion du dernier nonce apostolique en 1950. 

Une victoire diplomatique contestée

Attaché à cette stratégie d’apaisement, l’administration du cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège, semble s’être particulièrement investie dans le renouvellement de l’accord tout au long de l’année. Avec succès, puisque les deux États l’ont prolongé pour deux années supplémentaires le 22 septembre. Pour y parvenir, le Saint-Siège s’est cependant abstenu de tout commentaire sur la situation dans l’Empire du Milieu, le cardinal Parolin allant jusqu’à affirmer, le 21 octobre, qu’il n’y a pas de «persécutions» en Chine. 

Le silence du pape François sur la Chine, à commencer par les événements d’Hong Kong, a lui aussi été remarqué. Comme les années précédentes, son administration a été plusieurs fois décriée par le cardinal Joseph Zen, archevêque émérite d’Hong Kong, qui accuse inlassablement le Saint-Siège d’abandonner l’Église «clandestine» – celle qui ne se soumet pas au contrôle du parti communiste chinois. 

L’ingérence étasunienne

Mais c’est surtout l’intervention de Mike Pompeo, secrétaire d’État des États-Unis, qui a le plus irrité le Vatican. Sur un site américain, il a accusé l’accord sino-vatican d’avoir «semé la confusion parmi les catholiques chinois». Au nom de la défense de la liberté de conscience, il a exhorté le pape François à attirer «l’attention du monde sur les violations des droits de l’homme» commises en Chine.

Une intervention jugée comme une «ingérence» par le Saint-Siège, qui n’a pas souhaité y répondre. La confrontation pourrait perdurer cependant: l’administration Biden – nouveau président investi le 20 janvier 2020 – a annoncé qu’elle souhaitait poursuivre la ligne d’opposition ferme de Donald Trump contre le gouvernement de Xi Jinping.

Les premiers fruits de l’accord ont été finalement récoltés dès l’automne : le pontife a pu participer à la nomination de deux évêques, avec la validation du régime communiste chinois. Cependant, le nombre des nominations reste faible: seulement quatre en deux ans. Néanmoins, d’autres nominations devraient avoir lieu en 2021, assure-t-on au Vatican.

Un seul «couac»

Quelques semaines après la signature de l’accord, le pape François a pour la première fois évoqué le cas des Ouïghours dans un livre, Un temps pour changer. Il a comparé le sort de cette ethnie musulmane résidant dans l’ouest de la Chine à celui des Rohingyas, des Yézidis et des chrétiens d’Égypte. Le gouvernement chinois a dénoncé le commentaire du pape, considérant qu’il n’avait «pas du tout de fondement factuel». 

Cette «sortie» du pontife apparaît comme le seul faux-pas dans la stratégie de diplomatie silencieuse et patiente imposée par la Secrétairerie d’État sur ce dossier qu’on dit géré personnellement par le cardinal Pietro Parolin. Depuis lors, on constate que personne au Vatican ne s’est exprimé sur le sujet.

L’intervention du pape François lors du discours au corps diplomatique le 8 février 2021 constitue d’ailleurs un retour à la posture de négociation mise en avant jusqu’alors: «le Saint-Siège espère que le chemin parcouru se poursuivra, dans un esprit de respect et de confiance mutuelle, contribuant davantage à la solution des différends entre les parties». (cath.ch/imedia/cd/bh)

Retrouvez le deuxième volet de notre série le 12 février: Le Sud Soudan

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