Le Liban, bastion assiégé de la fraternité 5/5

À l’occasion du discours au corps diplomatique prononcé le 8 février 2021 par le pape François au Vatican, I.Média revient sur les cinq dossiers qui ont marqué l’année 2020 et devraient continuer à faire l’actualité en 2021. Après la Chine, le Soudan du Sud, la nouvelle diplomatie de l’eau, et la politique européenne du Saint-Siège, la série s’achève avec le Liban, laboratoire menacé de la fraternité.

Il serait fastidieux de rappeler toutes les fois où le pape François a exprimé sa grande inquiétude concernant le Liban en 2020: on décompte plus d’une dizaine d’interventions – dont une journée de prière et de jeûne spéciale le 4 septembre – une attention que n’a reçue aucun autre pays dans le monde. Pour le Saint-Siège, le petit pays est de fait plus qu’une nation en crise, mais l’incarnation du «rêve de fraternité» du pape François, aujourd’hui en grave péril. 

La question migratoire

À l’occasion de son adresse au corps diplomatique le 9 janvier 2020, le chef de l’Église catholique avait fait part de sa grande préoccupation face à la situation humanitaire du Liban. La petite enclave du Levant de 5,8 millions d’habitants accueille en effet depuis plusieurs années plus de deux millions de réfugiés, principalement originaires d’Irak et de Syrie. 

Cette question migratoire – centrale dans le pontificat de François – avait été largement abordée quelques semaines plus tard lors de la rencontre de Bari (Italie) en février 2020, qui rassemblait des évêques de l’ensemble du pourtour méditerranéen. Devant ces derniers, le pape François avait défini la Mare Nostrum comme «une région cruciale du monde parce que mer du métissage», mais aussi en tant qu’ «épicentre des lignes de rupture et de conflits». 

Dans la perspective du pontife, qui a récemment exhorté l’Église à «rentrer dans la crise», le marasme du Liban – pris dans une grave crise économique et politique, à laquelle se mêle des tensions entre les différents composants de cette société mutliculturelle – est donc devenu une catastrophe paradigmatique. Du sort du Liban, pays où de nombreux visages de l’islam et du christianisme cohabitent, dépend en partie la crédibilité de l’entreprise de pacification des conflits par le dialogue interreligieux défendue par le pape François depuis la signature du Document pour la fraternité à Abou Dabi en février 2019.

Ce message est en effet le point nodal du magistère pontifical en 2020, consacré par la publication de l’encyclique Fratelli tutti en octobre. Cet appel à la fraternité entre les peuples et à l’amitié sociale trouve ses racines dans l’espérance d’une dialogue avec les musulmans. La «chute» du Liban, censé incarner parfaitement ces valeurs, serait dès lors un revers considérable.

Le monde a besoin du Liban

C’est dans cette perspective que, quelques jours après la spectaculaire explosion du port de Beyrouth, le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège et bras droit du pape, avait affirmé: «Le Liban a besoin du monde, mais le monde a besoin de l’expérience unique du Liban».

Dans son message du 24 décembre 2020, spécialement consacré à la situation au Liban, le pape avait insisté sur cette dimension universelle du pays, et prié pour que ce pays puisse continuer à diffuser «le parfum du respect, de la cohabitation et du pluralisme, celui d’un peuple qui n’abandonne pas ses maisons ni son héritage». 

La vision «prophétique» du pape François en jeu

Plus récemment, dans son discours au corps diplomatique du 8 février 2021, le pape argentin a une nouvelle fois appelé à un engagement national et international en faveur du Liban. Selon lui, il faut défendre cette image d’un «Moyen Orient pluriel, tolérant et divers, où la présence chrétienne [peut] offrir sa contribution et ne [doit pas être] réduite à une minorité qu’il faut protéger».

Comme l’a rappelé à plusieurs reprises le pape pendant cette année marquée par la pandémie: de toute crise, on ressort «meilleur ou pire», c’est la seule alternative. C’est donc bien plus que le simple Moyen-Orient, mais la vision «prophétique» que porte toute la diplomatie «fraternelle» prônée par le pape François qui semble en quelque sorte se jouer dans le pays du Cèdre. (cath.ch/imedia/cd/bh)

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