1'282 personnes ont fait appel à Exit pour mourir en Suisse en 2020

Le nombre de personnes ayant eu recours à l’association d’aide au suicide a légèrement augmenté en 2020 par rapport à 2019, avec 68 cas de plus au plan national et 17 au plan romand. Membre de la commission bioéthique de la Conférence des évêques suisses, Steve Bobillier réagit à cette évolution. 

En 2020, 1282 personnes malades ont été accompagnées dans la mort par Exit en Suisse, soit 68 de plus que l’année précédente. En Suisse romande, l’association d’aide au suicide a accompagné 369 personnes dans la mort en 2020, a indiqué Gilles Wehrli, responsable administratif d’Exit, soit 17 cas de plus qu’en 2019. Membre de la commission bioéthique de la Conférence des évêques suisses, Steve Bobillier réagit à cette évolution.

Comprenez-vous le recours au suicide assisté?
Steve Bobillier: Dans certains cas, très peu nombreux, je peux le comprendre à titre personnel, lorsqu’il s’agit par exemple de cancer en phase terminale et que la médecine palliative ne parvient plus à soulager la douleur du patient, ce qui est rare du fait des grands progrès de cette médecine ces dernières années.

Steve Bobilier, membre de la commission bioéthique de la CES | © B. Hallet

Comment réagissez-vous à la hausse du nombre de suicides assistés que l’on observe en Suisse?
Le problème, c’est que l’on observe depuis 10 à 15 ans une tendance du suicide assisté à s’ouvrir à toujours plus de cas de figure. Il y a 10 ans, la personne qui recourrait au suicide devait souffrir d’au moins deux pathologies liée à l’âge, par exemple de l’arthrose et des difficultés cardiaques. Aujourd’hui le suicide assisté est ouvert à toutes les personnes «fatiguées de vivre» peu importe leur état de santé. Or plus on ouvre le suicide assisté, plus on observe une augmentation du nombre de cas. Cela engendre une banalisation du suicide, qui a aussi un impact sur les suicides «ordinaires». On pense à cet égard à l’effet Werther ou suicide mimétique…

De quoi s’agit-il?
C’est un phénomène mis en évidence en 1982 par le sociologue américain David Philipps. Plus on rend accessible le suicide, plus les personnes fragiles vont prendre cette voie, notamment les jeunes. Que l’on songe à l’effet provoqué par l’annonce du suicide du chanteur Kurt Cobain, en avril 1994. Ici la banalisation du suicide assisté a un impact considérable sur le taux de suicide «ordinaires».

En termes de prévention, permettre le suicide assisté fait-il baisser le nombre de suicides «classiques»?
Non, un des arguments consistait en effet à dire qu’en autorisant le suicide assisté, cela fera diminuer le nombre de suicides «ordinaires». Or c’est faux: sur les vingt dernières années, on observe que le nombre de suicides «ordinaires» est resté le même. La dépénalisation du suicide assisté a fait au contraire doubler le taux de suicide général en Suisse en moins de 10 ans.

L’association Exit a pourtant vu le nombre de ses membres augmenter en 2020
Oui, mais il ne faut savoir que la Suisse est le seul pays au monde où le suicide assisté n’est pas effectué par du personnel médical. Les personnes qui assistent à la prise de solution létale n’ont aucune compétence médicale. Or si le décès survient en médiane 25 minutes après la prise du produit, la mort peut aussi tarder à venir. Et face à une agonie qui peut durer parfois plus de 7 heures, elles ne peuvent pas soulager la personne avec des calments, ce qui pourrait se faire si le suicide était réalisé par des médecins. C’est une réalité triste et peu médiatisée. (cath.ch/cp)

Exit: les chiffres 2020
En 2020, l’association Exit a recensé en Suisse 1’282 suicides assistés, dont 360 en Suisse romande (+ 19 par rapport à 2019) et 913 en Suisse alémanique et au Tessin (+51). A la fin 2020, Exit comptait au plan national quelque 135’000 membres, dont 31’070 en Suisse romande (+3’204).
L’âge moyen des personnes faisant la demande d’un suicide assisté est de 78,7 ans (78,2 ans en 2019). La répartition des sexes est restée la même: 59% de femmes et 41% d’hommes. Les suicides assistés représentent environ 1,5% des 67’000 décès enregistrés en moyenne en Suisse chaque année. CP

Carole Pirker

Portail catholique suisse

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