Evangile de dimanche: la Gloire mise à nu

Il y a un mois à peine, j’entendais, au cours d’une conversation, le plus beau commentaire de l’Evangile de ce dimanche. Une dame avait pris rendez-vous et d’emblée me dit: «Je viens vous voir parce que j’ai peur de la mort.» Et, ajoute-t-elle «hier soir, en jouant aux cartes, j’ai lancé sur la table du jeu cette angoisse qui chahute toutes mes nuits: J’ai peur de mourir. Ma belle-sœur, me dit-elle, m’a répondu du tac au tac: ›Pourquoi est-ce t’as peur? Pour moi, il faut bien mourir pour vivre.’»

Étrange paradoxe! La mort, peut-elle être féconde? Ces Grecs qui cherchent à voir Jésus expriment sans doute la quête insatiable de tout être humain. La réponse de Jésus est ici déconcertante. Elle semble totalement décalée même si elle est d’une importance extrême. «L’Heure est venue où le Fils de l’homme doit être glorifié.» Pour ces Grecs, curieux, ces paroles de Jésus les affrontent en quelque sorte au mystère insaisissable de sa vie. Ils voulaient voir Jésus, les voilà devenus témoins de l’Heure de la glorification du Fils de Dieu.

Mais alors, comment entendre cette révélation? Que signifie la glorification du Fils de Dieu? Jésus utilise comme à son habitude une petite parabole. Un grain de blé tombé en terre ne peut porter du fruit que s’il passe par la mort. L’image est forte. La vie surgit dans la vie donnée. Autrement dit, perdre sa vie, se détacher de sa vie manifeste la vie de l’éternité.

C’est bien cela la glorification du Fils de l’homme, c’est la démonstration aux yeux de l’humanité que Dieu est Amour. Voilà l’ultime vérité sur Dieu.

«La Croix nous dit le dépouillement du Christ. Mais avant de se livrer dans cette redoutable passion, il aura à s’ouvrir encore au don infini du Père.»

L’Heure du Christ manifeste jusqu’où va le choix de Dieu pour nous rejoindre dans notre détresse. Comment dire que Dieu est Amour s’il ne vient pas nous chercher là où la vie, parfois, nous a conduits. L’Heure de la Gloire, c’est ce Dieu qui se compromet avec nous, avec chacune et chacun, en donnant sa vie pour que nous ayons la vie.

La Croix nous dit le dépouillement du Christ. Mais avant de se livrer dans cette redoutable passion, il aura à s’ouvrir encore au don infini du Père. Sa totale confiance dans le Père lui donnera la liberté de se donner. Ainsi, sur la Croix, Jésus glorifie Son Père même si tout porte à croire qu’il est abandonné.

Nous arrivons tantôt au terme de ce temps de Carême. L’Heure du Christ est aussi la nôtre. La Gloire de Dieu est en nous. Comme le disait Saint Irénée: «La Gloire de Dieu, c’est l’homme vivant!» La vraie vie, celle qui n’a pas de fin, est du côté de l’Amour. Non pas cet Amour effiloché, mais cet Amour-là, révélé dans le don unique du Christ.

François Cheng, poète et membre de l’Académie française, a donné, à l’un de ses ouvrages de poésie, un titre magnifique et suggestif: La vraie gloire est ici. Tout au long de la lecture, l’auteur scrute de son regard éveillé, quasi mystique les traces de la gloire dans l’humilité des jours et des rencontres.

Vivants, porteurs de la Gloire de Dieu, nous voici, à la suite de Jésus, sur le chemin qui conduit à Jérusalem. Certes, nous serons soumis à l’épreuve de la croix, mais cette croix plantée en terre est désormais le vrai lieu de la Gloire.

Bernard Miserez | Vendredi 19 mars 2021


Jn 12, 20-33

En ce temps-là,
il y avait quelques Grecs parmi ceux qui étaient montés à Jérusalem
pour adorer Dieu pendant la fête de la Pâque.
Ils abordèrent Philippe,
qui était de Bethsaïde en Galilée,
et lui firent cette demande :
« Nous voudrions voir Jésus. »
Philippe va le dire à André,
et tous deux vont le dire à Jésus.
Alors Jésus leur déclare :
« L’heure est venue où le Fils de l’homme
doit être glorifié.
Amen, amen, je vous le dis :
si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas,
il reste seul ;
mais s’il meurt,
il porte beaucoup de fruit.
Qui aime sa vie
la perd ;
qui s’en détache en ce monde
la gardera pour la vie éternelle.
Si quelqu’un veut me servir,
qu’il me suive ;
et là où moi je suis,
là aussi sera mon serviteur.
Si quelqu’un me sert,
mon Père l’honorera.

Maintenant mon âme est bouleversée.
Que vais-je dire ?
«Père, sauve-moi
de cette heure» ?
– Mais non ! C’est pour cela
que je suis parvenu à cette heure-ci !
Père, glorifie ton nom ! »
Alors, du ciel vint une voix qui disait :
« Je l’ai glorifié et je le glorifierai encore. »
En l’entendant, la foule qui se tenait là
disait que c’était un coup de tonnerre.
D’autres disaient :
« C’est un ange qui lui a parlé. »
Mais Jésus leur répondit :
« Ce n’est pas pour moi qu’il y a eu cette voix,
mais pour vous.
Maintenant a lieu le jugement de ce monde ;
maintenant le prince de ce monde
va être jeté dehors ;
et moi, quand j’aurai été élevé de terre,
j’attirerai à moi tous les hommes. »
Il signifiait par là de quel genre de mort il allait mourir.

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