En Suisse romande, les premiers pas timides sur le chemin synodal

Le nouvel évêque de Coire, Mgr Joseph Bonnemain, a récemment annoncé son intention de poursuivre le chemin synodal lancé l’an dernier par l’administrateur apostolique, Mgr Peter Bürcher. Qu’en est-il dans les diocèses romands du processus de renouvellement de l’Eglise promu par la Conférence des évêques suisses à l’échelon diocésain?

«Dans le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF), Mgr Charles Morerod a exprimé son désir de lancer un processus synodal au niveau des unités pastorales», explique l’abbé Christophe Godel, vicaire épiscopal pour l’Eglise catholique dans le Canton de Vaud. Mais la pandémie de Covid-19 s’est invitée dans le processus et a passablement ralenti l’avancement des projets.

Christophe Godel, vicaire épiscopal pour le canton de Vaud | © Barbara Ludwig

Le processus, coordonné par l’évêché, n’a pas encore pu débuter comme prévu, notamment à Genève et dans le canton de Fribourg, à cause de l’impossibilité à se réunir. «Rien n’a encore été annoncé ni lancé», explique-t-on à Genève. Mais des premiers pas ont été faits par le vicariat de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud. 

Depuis presque deux ans, quatre unités pastorales vaudoises (La Venoge-L’Aubonne, Notre-Dame Lausanne, Riviera-Pays d’En-Haut, Prilly-Prélaz) accomplissent ce cheminement synodal. Elles ont été invitées à mettre directement en œuvre dans leur vie communautaire ce qu’elles ont découvert tout au long de ce processus.

Méthodologie pour renouveler l’Eglise

«Dans un discours de 2015, le pape François a affirmé que le chemin de la synodalité est le chemin que Dieu attend de l’Église au troisième millénaire», rappelle l’abbé Godel. «Nous souhaitons par conséquent prendre ce chemin sans tarder, sachant qu’il permet de rafraîchir et d’approfondir notre conception de l’Eglise, en offrant une méthodologie capable de renouveler notre vie ecclésiale».

«En apprenant à s’écouter les uns les autres, on arrive à découvrir les convictions partagées qui indiquent une direction.»

Christophe Godel, Vicaire épiscopal pour le Canton de Vaud

Une approche qui ne va pas de soi et qui s’annonce exigeante. «Se regarder les uns sur les autres, dans la diversité et la complémentarité des vocations et des ministères; voici ce qui est ici mis en valeur», souligne le vicaire épiscopal. Selon lui, la synodalité offre une méthode  pour discerner ce que l’Esprit-Saint veut dire à l’Eglise.

«En apprenant à s’écouter les uns les autres et à partager l’écho profond suscité par la Parole de Dieu, on arrive à découvrir les convictions partagées qui indiquent une direction. C’est beau de pouvoir découvrir ces inspirations qui se concrétisent au sein d’une communauté en chemin».

Cap sur le terrain, à 360 degrés

L’approfondissement de ce que signifie concrètement «synodalité» a aussi été entrepris au niveau des départements et des secteurs ecclésiaux.

Philippe Becquart, théologien laïc en poste à responsabilité dans l’Eglise catholique du canton de Vaud | © Grégory Roth

Sous la coordination de Philippe Becquart et Grégory Solari, plusieurs collaborations ont été mises en place, notamment avec le Centre Catholique Romand de Formation en Eglise (CCRFE) qui, du 31 janvier au 2 février 2022, organisera à Fribourg un symposium sur le thème. Le colloque interdisciplinaire vise à réfléchir sur les présupposés ecclésiaux de ce cheminement et les réponses pastorales nouvelles à donner dans le contexte de vie contemporain.

«Beaucoup de jeunes ont senti qu’ils devaient se rendre disponibles pour témoigner à d’autres jeunes de leur parcours de foi.»

Christophe Godel, vicaire épiscopal pour le canton de Vaud

Une telle approche synodale a également été appliquée lors d’un laboratoire de jeunes. «Cela nous a permis de découvrir ensemble les directions qu’il fallait approfondir, raconte Christophe Godel. Beaucoup de jeunes ont senti qu’ils devaient se rendre disponibles pour témoigner à d’autres jeunes de leur parcours de foi, par exemple dans les groupes de confirmands. Nous avons ainsi relayé ce désir aux responsables de la catéchèse, pour qu’ils fassent appel à des jeunes dans leurs groupes respectifs».

En lien avec l’Eglise universelle

Le cheminement entamé à plusieurs niveaux a rencontré un écho positif. «C’est positivement étonnant que tous ceux qui ont pu approfondir cette synodalité la perçoivent comme nécessaire et disent: ‘c’est ça, c’est une approche qui nous parle’», se réjouit Christophe Godel, qui envisage continuer sur cet élan et le mettre en route au sein d’autres équipes pastorales de son vicariat.

Le processus porte des fruits bien au-delà des frontières nationales. «La Providence a voulu qu’un de nos acteurs de la synodalité connaisse très bien un membre du Synode des évêques au Vatican», indique le vicaire épiscopal. Cela nous permet en particuler de travailler avec le Saint Siège en vue du Synode des évêques 2022, qui se sera justement consacré à ce thème, et d’avancer ainsi ensemble avec toute l’Eglise en partageant notre expérience locale».

À Sion, cheminement synodal diffus

Le diocèse de Sion a consciemment choisi une approche différente. L’intention? Assurer une continuité aux nombreux projets en cours, tant au niveau diocésain que local; ceci, pour ne pas charger davantage les paroisses. Le tout, en inscrivant ce travail pastoral de fond dans l’esprit synodal.

«L’esprit synodal est bien présent dans notre diocèse.»

Pierre-Yves Maillard, vicaire général du diocèse de Sion

«Cet esprit est bien présent dans notre diocèse», lance Pierre-Yves Maillard, vicaire général du diocèse de Sion. Nous voulions éviter d’entraver tout ce qui se fait depuis plusieurs années, avec une démarche supplémentaire ou des enquêtes spécifiques. Car la consultation et la participation de tous, l’écoute réciproque et le fait de cheminer ensemble sont des postures qui correspondent pleinement à la manière de faire de Mgr Jean-Marie Lovey. Elles fondent en effet ses intuitions pastorales et enrichissent les rencontres avec les différents acteurs pastoraux».

Choix inspirés par la synodalité

À la suite des trois sessions diocésaines «Talenthéo», consacrées aux nouvelles priorités pastorales, qui ont eu lieu entre 2015 et 2017, les paroisses valaisannes ont été invitées à ajuster cette vision pastorale à leur contexte communautaire spécifique. Ceci, autour de la notion-clé de «disciples missionnaires».

«Aujourd’hui, il y a bien des paroisses qui poursuivent sur ce chemin, en se faisant accompagner, comme par exemple celles de Savièse, Saint-Maurice ou Conthey, précise Pierre-Yves Maillard pour qui les choix stratégiques pris ces dernières années par le diocèse, s’inspirent clairement d’une telle approche synodale.  

«Je pense notamment aux rôles qu’assument les laïcs ou à la récente nomination de deux déléguées épiscopales au Conseil épiscopal. Plus largement, notre présence vis-à-vis des institutions étatiques, le développement de la diaconie et notre dialogue avec le monde contemporain s’enracinent aussi pleinement dans cet esprit synodal», conclut le vicaire général.

En chemin vers le Jura pastoral

Toute autre est la situation dans les paroisses jurassiennes et francophones de Berne. «Le chemin synodal n’est pas encore arrivé dans le Jura pastoral, confirme l’abbé Jean-Jacques Theurillat, vicaire épiscopal pour le Jura pastoral. Une situation qui reflète celle du diocèse de Bâle qui n’a pas encore défini précisément la façon dont la démarche synodale allait se mettre en place.

«Pour l’instant, le chemin synodal reste inconnu dans le Jura pastoral.»

Jean-Jacques Theurillat, vicaire épiscopal pour le Jura pastoral

«La gestion des conséquences de la pandémie et la réorganisation en profondeur de la pastorale au niveau territorial et des services pastoraux mobilisent l’essentiel de nos énergies, explique l’abbé jurassien. De plus, personne ne m’a jamais interpellé à ce propos. Pour l’instant, le chemin synodal reste chez nous inconnu». (cath.ch/dp)

Davide Pesenti

Portail catholique suisse

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