Le rouge de Marx

Il fallait le faire. Démissionner à 67 ans lorsque vous êtes une figure influente de l’Eglise catholique romaine, archevêque d’un des plus grands diocèses allemands et conseiller du pape. Reinhard Marx a prié, pris conseil, réfléchi. Et il a envoyé au pape une lettre de démission.

Le geste frappe autant pour ses raisons – sa coresponsabilité dans la gestion des affaires d’abus sexuels – que pour l’exemple. Ainsi, un évêque en vue choisit de rentrer dans le rang. Et ce au nom de l’Evangile.

Les commentateurs n’ont pas manqué d’y percevoir une forme de défiance à l’égard de son collègue de Cologne, Rainer Maria Woelki. Ce dernier, empêtré dans les affaires d’abus secouant son diocèse, a choisi de tergiverser et de se cramponner au pouvoir. Ses fidèles lui ont même montré le carton rouge, l’invitant à quitter son poste.

«Le geste de Mgr Marx honore son ministère de prêtre et d’évêque»

Par son renoncement, le cardinal Marx devient de fait l’antithèse de Théodore McCarrick, l’ancien prélat américain auteur d’abus, personnalité en vue qui a passé longtemps entre les mailles du filet avant d’être sanctionné par le Vatican. L’archevêque de Munich n’est pas l’auteur de méfaits, mais il pointe la responsabilité de l’Eglise dans un système où «la négligence et le mépris des victimes» ont dominé pour préserver «le prestige de l’institution», écrit-il.

Quand nombre de catholiques, outre-Rhin, tournent le dos à l’Eglise et quittent l’institution, la crise atteint un point culminant. D’autant que la gestion des abus sexuels dans l’Eglise représente un gros caillou pour la démarche synodale engagée en Allemagne avec le soutien du cardinal bavarois.

Le geste de Mgr Marx honore son ministère de prêtre et d’évêque. Le rouge cardinalice – symbole du témoignage évangélique demandé aux cardinaux, jusqu’à verser leur sang – répond ici symboliquement au rouge brandi par les fidèles du cardinal Woelki à Cologne. Deux visages de l’Eglise s’en dégagent.

Bernard Litzler | Lundi 7 juin 2021

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