Botswana: le peuple Bochiman menacé dans sa survie (050293)
Gaborone, 5février(APIC) Les San ou Bochiman, un peuple ancien du désert
du Kalahari, au Botswana, sont menacés dans leur survie. En cause: la politique ethnique de répartition des pâturages du pays. Pourtant tant réclamée
Dans les années 70, pourtant, cette politique était réclamée comme celle de
la « dernière chance » pour la population rurale du Botswana, pays où l’élevage des bovins reste la principale source de richesse. Cette répartition
n’a pas donné les résultats escomptés. Pire, elle a entraîné l’appauvrissement des petits éleveurs de bétail Iseana. Et le problème se fait de plus
en plus grave, avertit le « Bulletin d’Information Africaine », un bimensuel
édité par les Pères Blancs.
A cause de cette politique – à moins que ce soit en dépit d’elle -, la
possession du bétail et l’accès aux pâturages sont devenus en fait l’apanage de quelques privilégiés. Au cours de ces deux dernières années, la plus
grande partie du « désert » de Kgalagadi (Kalahari), qui, avec une superficie
de 200’000 km2, occupe près de la moitié du pays, a été divisée en « ranchs »
entourés de clôtures n’appartenant pas à plus de dix personnes, parmi lesquelles le président Ketumile Masire et ses deux frères.
Le désert de Kgalagadi n’est pas un désert de sable, mais – comme le savent ceux qui ont vu le film « Les dieux sont tombés sur la tête » – une garrigue ténue, à pluviosité limitée, soutenant toutes sortes de troupeaux et
des groupes de nomades San ou Bochiman, chasseurs infatigables qui vivent
du produit de leur chasse et de la récolte des fruits et des racines sauvages.
Mal de vivre
Le premier résultat visible de la construction de ces clôtures a été
d’empêcher les troupeaux de se déplacer librement en quête de pâturages.
Beaucoup n’ont pas survécu, menaçant ainsi la subsistance des Bochiman,
dont la survie dépend de ces animaux. La réponse « bénéfique apportée au
« problème San » fut d’intensifier les efforts jusque là plutôt timides pour
les persuader d’adopter un style de vie plus sédentaire. Tous les nomades
San restant furent groupés dans un camp installé près de la ville de Ghanzi, au nord-ouest du pays, en vue de les préparer pour le jour où on leur
donnerait une terre à cultiver. Des instructeurs furent rassemblés pour
former des travailleurs du Botswana afin que ceux-ci puissent à leur tour
enseigner au peuple San.
Au nombre de plusieurs milliers, les San, qui avaient déjà vécu près
d’une année dans les camps, souffraient de toutes les maladies dont peut
souffrir un peuple privé de son mode de vie traditionnel. En décembre 1992,
les adultes mouraient au rythme de cinq par jour, affirme le bulletin des
Pères Blancs.
Nul ne prétend que la nourriture ou les conditions sanitaires sont mauvaises dans le camp. Si cela avait été le cas, les enfants seraient sans
doute morts les premiers. « Ce qui est arrivé, explique-t-on, c’est qu’on
les a privés de la seule manière de vivre qui leur était familière et
qu’ils ont pratiquement perdu la volonté de vivre. Pour un peuple comme les
San, si limité en nombre, le taux actuel de morts est un vrai désastre. Ils
pourraient disparaître en tant que peuple en l’espace de deux ans ».
Bientôt le sable?
Même à supposer que les San survivent, l’environnement dont ils dépendent ne survivra pas. Dans certaine régions, le bétail, retenu par les clôtures, détruit l’écosystème fragile de Kgalagadi, épuisant les pâturages à
un rythme qui ne fut jamais celui des troupeaux d’antilopes, d’éléphants,
de rhinocéros et autres animaux. Dans les « ranchs » clôturés il y a
plusieurs années, des secteurs entiers sont déjà dénudés: la végétation y a
pratiquement disparu. C’est tout le territoire du Khalagadi qui pourrait
ainsi être réduit à un vrai désert de sable. Et ce à brève échéance.
Selon la revue, ça n’est pas vraiment un génocide. « Ce mot est sans doute trop fort, mais il est bien clair que l’on est en train de supprimer un
peuple ancien et sans défense. Il est regrettable que l’on donne priorité à
l’enrichissement de quelques grands et puissants au détriment du bien-être
de tout un peuple ». (apic/cip/pr)
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