Le pape plaide pour une culture de la renonciation

«La culture ne doit pas être assujettie au marché», a déclaré le pape François dans une lettre publiée dans le quotidien La Stampa le 12 août 2021. Il a appelé les écrivains à «stimuler les consciences, les déranger pour qu’elles ne se laissent pas anesthésier» par l’indifférence ou le pessimisme.

Le pape François répondait à une lettre que lui avait envoyée le romancier italien Maurizio Maggiani, le 1er août dernier, dans laquelle ce dernier déclarait s’être rendu compte que la chaîne de production de ses livres impliquait l’exploitation de travailleurs pakistanais. Il avait posé la question suivante au pontife: «Cela vaut-il la peine de produire de la beauté si c’est grâce à des esclaves?» 

Touché par le courrier, le pontife, lui a répondu que «pour un chrétien, toute forme d’exploitation est un péché». «Même la littérature, le pain des âmes, une expression qui élève l’esprit humain, est blessée par la voracité d’une exploitation qui agit dans l’ombre, effaçant les visages et les noms», a-t-il déploré.

Cependant, pour le pape, «renoncer à la beauté serait une retraite injuste, une omission du bien». Il souligne néanmoins que l’écrivain a toujours la possibilité de «secouer l’indifférence et de donner une voix aux sans-voix et faire entendre la voix de ceux qui sont réduits au silence». 

Dénoncer et renoncer

Grand lecteur, le pape François a donné en exemple Dostoïevski pour sa «lecture profonde de l’âme humaine et son sens religieux» mais aussi parce qu’il «a choisi de raconter des vies pauvres». L’écrivain, affirme-t-il, a le devoir de «coucher sur le papier la voix inconfortable de la conscience». 

Le monde, selon le Souverain pontife, a besoin d’une «dénonciation qui n’attaque pas les personnes, mais qui met en lumière les sombres manœuvres qui étouffent la dignité des êtres humains au nom du dieu argent». L’écrivain doit être capable de montrer ces structures du péché, a-t-il ajouté. 

Cependant, dénoncer ne suffit pas, a prévenu l’ancien professeur de littérature. Il faut aussi, selon lui, «avoir le courage de renoncer», non pas à la littérature et à la culture mais «aux habitudes et aux avantages» qui portent atteinte, «à travers les mécanismes pervers de l’exploitation» à la dignité des personnes. Il s’agit, a-t-il conclu, de dire non pour un plus grand oui. (cath.ch/imedia/cd/bh)

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