La richesse n’est pas le bonheur

Les économistes libéraux nous ont donné des règles de comportement que la majorité de la population occidentale suit mais qui s’avèrent inopérantes aujourd’hui en période de crise dans la marche de notre société.

La première est celle du rapport coût–bénéfice individuel. On la vérifie en matière de vaccin. Beaucoup raisonnent pour eux-mêmes en ignorant l’avenir et le bien commun. Choisir de ne pas se faire vacciner par une simple analyse coût–bénéfice est un raisonnement à courte vue et sans considération de l’autre. On agit sans ménager le futur et sans tenir compte des interactions entre les personnes et les peuples. Mais ce raisonnement en termes de coût–bénéfice immédiat est tellement présent que les gouvernements l’utilisent pour inciter la population à se faire vacciner en agitant l’épouvantail du passe-sanitaire.

Le second leurre est la croyance que nous n’avons le choix qu’entre des biens matériels: les vacances ou le travail, la voiture ou le logement, la viande ou les légumes. L’existence de biens spirituels ou moraux n’entre pas ou peu en ligne de compte. Les vies relationnelles avec l’autre ou avec Dieu n’interfèrent pas fondamentalement dans les choix de notre société de consommation. Nous avons une addiction à l’échange et sommes rétifs au don. La perte du sentiment religieux dans notre société trouve là l’essentiel de ses racines.

Le changement climatique nous prend à revers  dans cette vision. Le climat n’est pas un bien matériel que l’on peut acquérir. Il  est un bien collectif que nous partageons  et qui nous contraint à changer notre comportement et nos priorités. Il faut d’abord l’accueillir pour ensuite essayer de vivre avec. On se situe dans le rapport à la vie et à la création, question morale et spirituelle et non dans la question du plus de biens ou de moins de biens.

«Nous avons été éduqués, contre toute évidence, dans la peur de manquer.»

Le dernier leurre est celui de la croyance que la rareté domine notre vie. On l’a constaté au moment de la naissance de la pandémie où la population s’est précipitée dans les magasins pour acheter du papier–toilette, dans notre pays qui possède un des niveaux de vie les plus élevés du monde! Cette vision était raisonnable à l’issue de la dernière guerre et nous avons tous connu des parents ou des grands-parents qui gardaient soigneusement le moindre bouton ou le moindre bout de tissu.

Mais elle s’est transmise aux générations suivantes. Nous avons été éduqués, contre toute évidence, dans la peur de manquer. Le problème est que cette fausse domination de la rareté nous entraîne dans le toujours plus. Plus de biens matériels, un logement plus grand, une plus grosse voiture, plus à manger mais aussi plus de loisirs et plus d’argent.

Inconsciemment, nous avons donc assimilé la richesse au bonheur. Nous prenons conscience de la fausseté de cette conception quand nous rencontrons des populations qui, dans le Sud ou en Asie, sont heureuses et vivent avec beaucoup moins que nous. Nous le constatons aussi chez les religieuses et les religieux qui vivent avec joie leur vœu de pauvreté.

La Béatitude heureux les pauvres en esprit contredit ce leurre de l’assimilation de la richesse au bonheur.  Mais les chrétiens en sont-ils réellement convaincus?

Jean-Jacques Friboulet

8 septembre 2021

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