Entre Viktor Orban et le pape François, entente cordiale ou discorde?

Le pape François rencontrera le Premier ministre hongrois Viktor Orban le 12 septembre 2021 en marge du Congrès eucharistique. Un face à face attendu tant les deux hommes  s’opposent sur l’accueil des migrants.

Les visions en matière de gestion des flux migratoires du Premier ministre Orban et du pape François ne pourraient sans doute pas être plus aux antipodes. La position du Hongrois s’était particulièrement révélée lors de la crise migratoire de 2015 quand des centaines de milliers de Syriens avaient transité à travers l’Europe centrale. Le chef du gouvernement a alors érigé une barrière infranchissable entre la Hongrie et la Serbie pour empêcher les entrées illégales.

Depuis, Viktor Orban a considérablement diminué le système d’asile que possédait la Hongrie jusque-là et a permis aux forces de l’ordre d’utiliser tout moyen de contraintes contre les migrants illégaux. Une politique à l’opposé de celle défendue par le pape François qui exhorte inlassablement les pays européens à accueillir, intégrer et protéger les réfugiés.

Les deux hommes se rencontreront pendant une demi-heure selon le programme officiel, dans une salle du Musée des Beaux-Arts de Budapest. Le Premier ministre sera aux côtés du président Janos Ader, tandis que le pape devrait être accompagné du cardinal secrétaire d’État Pietro Parolin et du secrétaire pour les relations avec les États, Mgr Paul Richard Gallagher.

Du point de vue de l’étiquette diplomatique cet entrevue a soulevé des questions pour plusieurs raisons. En premier lieu parce que le Saint-Siège parle d’une «rencontre», et non d’une «visite de courtoisie» comme c’est généralement le cas lors d’un entretien avec un responsable politique.

Une rencontre embarrassante?

Par ailleurs, le pontife rencontre la plupart du temps le chef du gouvernement d’un pays qu’il visite en tête-à-tête, comme ce fut encore le cas en Irak ou au Japon. Enfin, I.Média a appris que lors d’un récent échange en privé avec un journaliste, le pape avait manifesté le souhait de ne pas «se trouver dans la même salle» que le premier ministre hongrois.

Un embarras constaté de nouveau récemment lors d’une interview avec la radio espagnole COPE lorsque le pontife avait affirmé «ne pas savoir» s’il allait rencontrer le Premier ministre, bien que la réunion soit officialisée depuis plusieurs mois. «Jamais leur rencontre n’a été remise en question», assure une source diplomatique proche du pape. Le pontife, avance encore celle-ci, a essayé ici de «minimaliser la rencontre avec Orban» sachant bien que les médias n’ont pas une vision positive de sa politique.

Pourtant, le pape et Viktor Orban se sont déjà croisés à deux reprises au Vatican. D’abord en 2016, au lendemain de la crise migratoire qui a secoué l’Europe, en marge d’un rassemblement de leaders catholiques, l’International Catholic legislators network et une seconde fois en 2017 pour le 60e anniversaire du Traité de Rome. Même s’il n’a jamais été question d’un tête-à-tête formel, les images du pape souriant lors de leur poignée de main attestent de l’ambiance «extrêmement cordiale» de leur entrevue, souligne Eduard Habsburg, qui sera présent pour accueillir le successeur de Pierre à l’aéroport de Budapest.

Des convergences entre les deux hommes?

«Viktor Orban a un langage direct», observe le diplomate, ajoutant que les médias en profitent pour caricaturer son discours. Mais derrière les apparences, le chef du gouvernement hongrois convergerait avec les prises de positions du pontife et plus largement du Saint-Siège, notamment autour des questions de la défense de la liberté religieuse ou des chrétiens persécutés.

La Hongrie ces dernières années, explique-t-il encore, a également développé un vaste programme d’aide destiné à soutenir les populations étrangères défavorisées sur son territoire. «Le pape est très conscient de cela», assure Eduard Habsburg. Un groupe de Hongrois accompagné de Syriens a rencontré le pape en marge d’une audience générale, se souvient-il, l’évêque de Rome s’était alors saisi avec enthousiasme du drapeau de la Hongrie pour la traditionnelle photo. Quand à Viktor Orban, «il n’a jamais critiqué publiquement les positions» de l’Argentin, souligne-t-il.

Si les tensions entre les deux hommes ont été souvent évoquées, chacun semble vouloir respecter les formes pendant cette visite. Le Premier ministre bien que protestant – mais dont l’épouse est catholique – assistera à la messe de clôture du pontife tandis que ce dernier a affirmé se rendre dans le pays sans a priori: «l’une des choses que j’ai apprises, c’est de ne pas arriver avec un scénario: lorsque je suis devant une personne, je la regarde dans les yeux et je laisse les choses sortir. Il ne me vient même pas à l’esprit de penser à ce que je vais lui dire», a-t-il déclaré à radio Cope. (cath.ch/imedia/ah/bh)

I.MEDIA

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